L'épée de Damoclès plane sur la tête de centaines d'enseignants et leur famille depuis plus d'une semaine suite aux mises en demeure qui leur sont parvenues de la direction de l'éducation de la wilaya de Tipasa. Nous avons, à ce titre, contacté de nombreux éducateurs, dont la majorité se trouve à la retraite depuis déjà de longues années. Ils ont été choqués par le manque de tact de leur tutelle, malgré les nombreuses années de travail alors qu'à l'indépendance de l'Algérie, ils ont relevé le défi de prendre en charge les élèves. Après plus de deux générations de bons et loyaux services, les voilà obligés de quitter leurs logements sous peine d'une expulsion manu militari. Le cas de Mohamed Dahraoui, enseignant à l'école Nafi de Hadjout, est édifiant ; il n'arrive toujours pas à comprendre ce qu'il lui arrive. La voix enrouée par tant d'émotion, il explique : «J'habite dans un logement de fonction de trois pièces avec mon épouse et mes 12 enfants. Nous sommes quatre enseignants à habiter ces logements qui ne sont pas dans le périmètre de l'école, et, donc, cessibles selon la loi. En 1994, j'ai introduit un recours à la mairie de Hadjout pour faire valoir mes droits d'acquéreur potentiel. Dans ma demande, j'ai précisé que compte tenu de mon bas salaire (de l'époque), il m'était impossible de l'acheter au comptant, ayant à ma charge 12 enfants et leur mère. J'ai alors sollicité l'APC de bien vouloir m'établir un échéancier afin d'assurer un toit à ma famille. Mais, hélas !, depuis cette correspondance aucune réponse ne m'est parvenue.» Affecté par tant d'ingratitude, notre interlocuteur continue : «Je me suis déplacé des dizaines de fois pour relancer ma demande mais à chaque fois on me répondit que mon affaire serait réglée et, par conséquent, je ne devais pas m'inquiéter.Aujourd'hui, je me sens blasé par tant de conduites et de reniement. J'ai donné les plus belles années de ma vie au secteur de l'éducation et voilà que l'administration exige de moi d'évacuer le logement. Pour aller où ?» Cet enseignant exemplaire, connu pour sa sagesse et sa générosité, a formé des centaines de jeunes qui sont à l'heure actuelle ingénieurs, médecins, avocats, etc. Le pire, c'est que des étrangers au corps enseignants, au nombre de deux, ont acquis leur logement, alors que ce sont des sinistrés qui ont, à l'époque, été installés provisoirement dans ces deux appartements. Le cas de M. Dahraoui est malheureux, alors que d'autres enseignants qui habitent dans des logements d'astreinte à l'intérieur de l'établissement ont acquis leur appartement. Toujours est-il que cette opération initiée par le ministère de l'Education nationale arrive dans des conditions dramatiques avec toutes les conséquences que cela suppose. A-t-on pensé un seul moment que bon nombre d'enseignants malades risquent de se voir jetés à la rue. Il serait souhaitable de protéger ces milliers d'enseignants à travers le pays qui se sont dévoués avec âme et conscience tout au long de leur existence pour former notre jeunesse.