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«Le sang sèche vite en entrant dans l'Histoire...»

Les martyrs n'ont pas affronté la mort pour rien, mais bien pour la récupération et l'indépendance de leur patrie. C'est cela le but suprême de leur action. Mais, paradoxalement, c'est d'abord un investissement, humain personnel : chacun est mort pour une famille ; mort qui n'a eu de répercussions négatives que sur leurs parents et leurs enfants, et non sur l'ensemble de la nation.
Après l'indépendance de l'Algérie, à quelques rares exceptions, toutes les rues du pays furent débaptisées. Les personnalités françaises n'avaient plus droit de cité en Algérie. Dorénavant les rues de ce pays, porteraient en arabe et en français, les noms de chaque algérien mort pour la libération de l'Algérie. Et j'avais parmi ces noms celui de mon père, mon frère et mon oncle, en plus de nombreux amis. Dans l'euphorie du recouvrement de notre souveraineté nationale nous avons laissé notre habitation du Clos Salembier à quelqu'un d'autre, et nous sommes allés habiter une grande maison, abandonnée par d'anciens colons. La maison était très grande et démontre de l'opulence de son ancien propriétaire, qui, dans sa fuite, y a même laissé des armes et munitions. Cette luxueuse villa se trouvait sur la rue Jules Ferry, qui fut rebaptisé au nom de mon père Mohamed-Chabane. D'autres rues et lieux furent baptisés au nom de mon frère et mon oncle puisque eux aussi chouhada, tombés au champ d'honneur, les armes à la main, pour la libération de la patrie algérienne. Le fait d'avoir perdu des hommes de la famille pour la libération du pays, à la limite et avec le temps, cela paraissait normal, ce qui me fait le plus de peine, c'est que ma mère n'a pas survécu jusqu'à la commémoration du cinquantenaire de l'indépendance. Je suis un peu déçu, car elle n'était plus là pour assister à la commémoration de l'indépendance, elle qui avait tant souffert de la répression coloniale, elle était morte des suites et conséquences de la torture de l'armée française dont elle avait été victime. Cette femme, ma mère, a épousé le Mouvement national en épousant son mari Chabane Mohamed, mon père. Et dès le départ au maquis, six mois après le déclenchement de la lutte armée, de son fils Mohamed, elle allait s'impliquer entièrement dans le combat de libération dans lequel s'était engagé son fils, pour l'indépendance du pays, suivi en cela par tout le reste de la famille. Madame Chabane, née Lamarani Fifi Il faut dire aussi que ma mère possédait les vertus et les peurs des femmes de ce temps : pieuse, inquiète, généreuse, toujours occupée à la tâche avec l'humilité et l'obstination des mères Algériennes qui aiment leurs familles plus que leur vie. Autant son mari et son frère Hassène que tous ces enfants, tous étaient persuadés que cette femme modeste est la plus extraordinaire des mères. Elle lègue à sa famille cet amour intense qui donne aux fils de la méditerranée un orgueil et une assurance, la certitude qu'ils sont aimés, et doivent l'être. La conviction aussi qu'ils sont uniques. Cette Mère en plus de tout ce qu'elle avait milité avec mon père en France, à notre retour en Algérie démontra encore de sa bravoure, en acceptant sans l'ombre d'une hésitation que sa maison serve de refuge et de cache aux moudjahidines. Elle-même avait fait sans rechigner, tout ce que lui avait demandé l'organisation. Elle accompagna son frère Hassène jusque dans les maquis de la dangereuse région de Palestro. Et plus tard encore elle participa à la mission de son mari, qui, travaillant à l'hôpital, ravitaillait l'ALN en produits pharmaceutiques. Elle fut arrêtée avec son époux dans les maquis du Titteri (Médéa). Il faut souligner que Madame Chabane Fifi, a été arrêtée et torturée à chaque départ d'un des membres de sa famille, jusqu'à moi qui, à la mort de mon père, ait estimé de mon devoir de le remplacer dans le combat de libération et, après avoir milité de mon propre chef, en faisant ce que me dictait ma conscience d'enfant. Fils d'une famille révolutionnaire, j'ai composé mon propre groupe d'action, et fait ce qu'il fallait, jusqu'à ce que mes activités soient découvertes par l'ennemie, et alors j'ai rejoint l'ALN ; j'avais 17 ans. Dès la proclamation de l'indépendance pendant que tous et toutes fêtaient la libération, ma mère elle, était contente que nous soyons enfin indépendant, mais il lui manquait quelque chose de trop important qui empêcher sa joie totale. Beaucoup de combattants de l'ALN étaient descendus des maquis et avaient pris possession des casernes où était auparavant l'armée française, et s'occupaient du maintien de l'ordre à Alger. Et beaucoup de ces moudjahidine rendez visite à leurs familles. Mais ma mère ne voyait ni ses deux fils, ni son frère revenir, et elle se posait des questions. Sont-ils tous morts ? Sont-ils blessés au point de ne pas pouvoir se déplacer ? Ou sont-ils obligés de rester là où ils sont ? Ces questions-là, la tarabustaient sans cesse ; elle ne pouvait plus rien faire d'autre que de penser à eux. A ces deux garçons et son frère. Depuis le temps, elle s'était faite à l'idée que son mari, avec qui elle a été arrêtée dans la région de Médéa, a été tué , elle avait fini par accepter sa mort, en implorant Dieu que le reste de sa famille vive encore. Presque un mois déjà depuis que le pays est indépendant. Les permissions dans l'ALN commençaient à fonctionner, puisqu'elle avait vu des moudjahidine revenir de loin pour voir leurs familles. Et ma pauvre mère, elle, le cœur meurtri, n'avait encore revu aucun des siens, il y avait de quoi s'alarmer. Chaque soir, c'était le même calvaire, où sont-ils ? Que sont-ils devenus ? Et un beau matin elle appela Mahfoud, un de mes amis du quartier du Clos Salembier, qui avait fait partie de mon groupe, et lui demanda s'il acceptait d'aller avec elle chez les moudjahidine, pour retrouver les siens. Mahfoud lui répondit que oui. Celle-ci le chargea de trouver quelqu'un de confiance qui a une voiture et qui accepterait de la conduire chez les moudjahidine pour chercher les membres de sa famille. Pour Mahfoud, la mission était facile, puisque d'une part la famille Chabane était connue pour être une famille de moudjahidine et d'autre part, la mère Fifi était une veuve de chahid que tout le monde estimait et respectait. La voiture ayant été trouvée. Ma mère rassurée d'avoir deux jeunes hommes pour la protéger, se prépara au voyage, comme si elle allait au combat. Elle avait réuni ses enfants et expliquer ce qu'elle allait faire. Et à sa fille ainée, elle avait laissé l'argent nécessaire pour nourrir ce qui restait de ses enfants, trois filles et deux garçons, cinq orphelins de guerre, plus leur grand-mère. A la recherche de ses hommes : le parcours de la combattante Dès lors, avec les deux militants, elle prit le départ pour l'endroit où elle avait elle-même été arrêtée et où elle pensait retrouver son frère Hassène parmi les combattants de l'ALN. Direction Médéa, puis Douar Zegmotta, c'est le nom qu'elle avait retenu du village où elle et son mari Chabane furent arrêtés trois ans et demi auparavant. Au fur et à mesure, qu'ils traversaient les villes et villages, et que la mère Fifi voyait des moudjahidine qui ressemblaient à l'un des siens, elle disait au chauffeur de s'arrêter et prenait le temps de vérifier si ce n'était pas l'un de ses fils ni son frère. C'était l'indépendance, et les troupes de l'ALN descendues dans les villes et villages étaient les seuls hommes en tenues militaires. La mère avait indiqué au chauffeur le lieu où il devait se diriger. Médéa, là où elle-même et son époux Chabane avaient pris contact avec l'agent de liaison chargé de les diriger vers les maquis où ils devaient rencontrer Hassène, c'était en 1959. Ainsi la voiture ave ses passagers redémarrait pour continuer sa route vers Médéa. La mère Fifi était pressée de retrouver les siens. Elle se disait que si elle retrouvait son frère Hassène, lui devrait savoir où se trouverait le fils Mohamed. C'est ainsi que de maison en maison, de question en réponse, elle put retrouver la maison où elle avait séjourné avant de monter au maquis. Elle réussit à trouver le lieu avec difficulté puisque cela remontait à trois ans en arrière, lorsqu'elle fut arrêtée avec son mari qui fut tué par la suite. Le refuge où elle avait séjourné avec son époux et le fils à Hassène, était là devant elle ; et d'un seul coup, tout lui revenait à l'esprit comme si c'était hier. Les ayant vus descendre de la voiture immatriculée à Alger, et scrutés sa maison, un homme vint à eux, souriant. Il souriait comme tous les Algériens à l'époque, qui sortis de la guerre n'avaient plus aucune appréhension, ni peur ni crainte, alors il rit de tout pour un rien, pour un oui pour un non, il éclatait de rire. Pour ceux qui avaient eu le bon sens d'y prêter attention, l'Algérie était devenue un grand théâtre où après que ce soit jouer la dramatique pièce de La guerre d'Algérie, c'était maintenant la fin du spectacle et tout le monde avait quelque chose à raconter qui fait rire. Car même si la guerre avait été rude, elle avait révélé quelques situations d'un comique hilarant. Le monsieur qui venait à la rencontre de ma mère l'avait reconnue, et lui disait tu es la sœur de Si Hassène, je me souviens de toi quand tu as été arrêtée avec ton mari et un petit garçon et quand les soldats vous ont emmenés dans leur camion. La veille femme qui était avec vous, courait derrière le camion en criant : «Moi grand fellagha, emmenez moi avec eux. Moi grand fellagha, et elle tombait et se relevait pour dire aux soldats «moi grand fellagha» pour qu'il l'arrête et la prenne avec eux. Les soldats du camion lui disaient, aller fous le camp la vieille, on a que faire de toi, dégage. A l'écart Mahfoud et son ami le chauffard s'étaient retirés pour rire. Ils se marraient en imaginant la grand-mère, qu'ils connaissaient, titubant courant derrière un camion militaire en criant moi «grand fellagha, emmenez-moi avec eux, moi grand fellagha.» Mahfoud et son ami Ali, pouvaient se permettre de rire ; ils avaient tant de fois pleuré sous l'émotion qu'ils ressentaient, lorsque la mère Fifi évoquait ses enfants et son frère. Ces deux jeunes hommes vivaient quant à eux une expérience qu'ils n'avaient jamais imaginée. Une femme le cœur déchiré, cherchait ses deux enfants et son frère. Ali dont le père était un moudjahid, ne cessait d'encourager ma mère ; quant à Mahfoud qui avait eu deux
frères dans l'ALN, l'un était tombé au champ d'honneur, et l'autre blessé sur le champ de bataille avait été arrêté et condamné à mort puis grâcié, a vu ce qu'avait souffert sa mère. Et il savait que si l'un des deux frères, Abdel Waheb, n'était pas revenu, sa mère serait certainement devenue folle. Ils raconteront, lorsque le périple prit fin, que souvent, ils avaient imaginé un retour en catastrophe à la maison sans avoir retrouvé personne de ceux qu'elle recherchait. Cette femme serait devenue folle si elle n'avait retrouvé aucun de ses proches. Et l'homme qui, en riant, avait rappelé l'histoire de la vieille femme qui courait derrière le camion militaire, cessa de rire, et avec sérieux dit : «Cette femme, c'est moi qui l'ai recueillie. Elle m'a dit qu'elle était la mère de Si Hassène et je lui ai donné de l'argent pour monter dans le car en direction d'Alger». La mère Fifi lui dit : «Oui c'est la mère à Hassène, mon frère. Donc c'est ta mère !», lui répliqua le monsieur avec étonnement. Ce monsieur s'était oublié et toute cette histoire avait été racontée dehors devant la porte de la maison ; tous les gens du quartier s'étaient rassemblés autour de cette discussion, écoutant et imaginant les choses comme le leur dessinait leur esprit. Prenant conscience qu'ils devaient faire entrer ces voyageurs à la maison, il les invitat à y entrer. Et la mère Chabane se retrouva dans la même pièce où trois ans plus tôt elle avait passé la nuit avec son époux et Khaled le jeune fils à Hassène. Celui qui les avait accueillis, comprenant que ma mère recherchait son frère et ses deux fils. Ne voulant pas prendre sur lui de divulguer des secrets de l'ALN, il alla chercher le chef de la région, qui, lui, saurait quoi dire. (A suivre)


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