«La violence a tissé ses relations au sein de quelques clubs et même joueurs inconscients du danger, qui pèse sur une rencontre de football», voilà une pierre jetée dans un contexte qui réclame plus de mobilisation pour enterrer à tout jamais, ce caillou mortel. Un entraîneur, qui préfère garder l'anonymat, reconnaît que le mal est entretenu par quelques éducateurs, qui ne se contrôlent pas et vont même jusqu'à provoquer l'adversaire au moment où il récupère la balle sortie en touche... «Oui, nous avons notre part de responsabilité. Ce que vous ignorez, c'est que je ne sais pas comment vous l'expliquer, il y a ce stress, cette peur de perdre qui nous perturbe, notamment lorsque vous jouez devant votre public. Une défaite ou un ratage d'un penalty, c'est la catastrophe... Et pour corriger notre faute, quelque chose nous pousse à provoquer l'arbitre assistant lorsqu'il ne siffle pas une faute ou refuse un but. L'Entraîneur, lui aussi, va dynamiter la partie en allant réclamer justice auprès de l'arbitre assistant... Les supporters réagissent et mettent le feu à la baraque. Le central, lui, donne des signes de nervosité, aimerait sifflet la fin de la partie et éviter la marée humaine... Oui, l'entraîneur est aussi un provocateur... Je suis en retraite, je ne peux que regretter aujourd'hui, ce qui s'est passé lors de quelques unes des rencontres...» Un aveu, qui complète un autre, celui d'un joueur, qui reconnaît maintenant que la mécanique de la lutte contre ce fléau est enclenchée, il y a espoir que les choses se calment. Il a ajouté «oui, nous avons notre part de responsabilité, pas souvent mais elle est là collée à la peau. Souvent, il y a des joueurs qui ne s'entendent pas avec d'autres et le terrain devient ainsi l'espace idéal pour rendre la monnaie de sa pièce... Cela se passe particulièrement à la fin de la saison où le risque de la rétrogradation menace le club, alors on se dit, il faut trouver une issue, perdre c'est la catastrophe, gagner, c'est la partie adverse qui prendra le relais. En fait, on est coincé, et lorsqu'on est à l'extérieur, souvent je me dis le mieux est de perdre, quitter la ville tranquille alors si nous remportons les trois points, les risques d'une cavale qui n'a pas de nom, se déclenchera du côté des locaux... La violence n'épargnera pas l'arbitre qui sera accusé d'être la cause de la perte... En attendant la fin de la partie, le directeur du jeu est sur les nerfs, il est plus que vigilant, il accepte quelques fautes pas méchantes pour éviter une réaction de ceux qui sont sur le banc de touche, et bien entendu ceux des gradins. Alors que tout le monde sait que pour le football ou tout autre sport, il y a un vainqueur et un perdant.» Un troisième avoue : «Moi, j'ai été insulté sur le terrain par un joueur adverse, j'ai reçu par deux fois, une bouteille d'eau sur la tête au moment où j'allai récupérer le ballon, l'arbitre à tout vu mais que pouvait-il faire ? Lui aussi est comme moi, il laisse jouer... En seconde mi-temps, poursuit-il, j'avais l'impression que la tension a atteint un niveau dangereux, les joueurs locaux poussent leurs supporters à faire plus de bruit, ce qui est naturel, mais ce bruit est suivi d'insultes et de qualificatifs pas beau à entendre. A un certain moment, on est obligé de réagir à chaque fois que nous recevons des coups gratuits, on ne va pas se laisser faire jusqu'à quitter le terrain sur des béquilles ou un pansement sur le crane ! Sur les gradins, la tension monte et au coup de sifflet final, on a toujours l'impression que c'est notre fin. C'est vous dire que nous sommes aussi responsables de ce qui se passe, c'est à nous de calmer le jeu, c'est à nous de montrer à nos supporters que le sport n'épouse pas la violence, que les trois points ne pèsent rien devant une vie d'un homme, joueur ou d'un supporter. Nous devons trouver une solution rapidement, nous avons tous intérêt à ce que ce cirque mortel s'arrête...» Ce cirque, nous le retrouvons sur tous les stades du monde, où des joueurs continuent à faire tourner à plein régime les urgences des hôpitaux. Un autre me murmure à l'oreille : «Dieu nous protège pour que ce qui s'est passé au stadium de Port-Saïd (nom donné aux affrontements meurtriers ayant eu lieu le 1er février 2012 à Port-Saïd en Egypte), à l'occasion d'un match de championnat d'Egypte de football entre Al Masry de Port-Saïd et Al Ahly du Caire, n'arrive pas chez nous. C'était la plus grande tragédie de l'histoire du football égyptien. La victoire des locaux sur un score de (3-1) sur Al Ahly SC, champion en titre. Des supporters d'Al-Masry armés de couteaux et de barres de fer déferlent sur le terrain, pourchassant d'abord les joueurs d'Al Ahly SC, puis leurs fans. L'entraîneur d'Al-Ahly, Manuel José est agressé par des supporters en tentant de rejoindre les vestiaires. «José et le joueur international Mohamed Aboutreika rapportent que des supporters sont morts dans leur vestiaire. Le bilan s'élève à 74 morts et des centaines de blessés.» Le 26 janvier 2013, à l'issue du procès, vingt et une personnes étaient condamnées à la peine de mort par la justice égyptienne, reconnues coupables d'être impliquées dans les violences. Un autre cas, aussi grave, s'est produit en 2013 au Brésil cette fois-ci, c'est un arbitre de football, âgé de 20 ans, qui tue un joueur en le poignardant, et qui se fait à son tour décapiter. La scène s'est déroulée dimanche 30 juin lors d'un match amateur à Pius XII, dans l'Etat de Maranhão (nord du Brésil), rapporte Globoesporte, un important site d'actualité sportive brésilien, cité par le «Corriere della Sera». L'arbitre venait d'exclure un joueur, Josenir dos Santos Abreu (31 ans), qui répond par un coup de pied. L'arbitre sort un couteau et poignarde Abreu à deux reprises, le blessant mortellement. Des spectateurs envahissent alors le terrain, armés de bâtons et de pierres, et lynchent l'arbitre meurtrier avant de le décapiter et d'exhiber sa tête sur une perche. Dans un autre monde de cette violence, on trouvera dans les archives, les traces récentes de l'agression de Brandao sur Thiago Motta dans les couloirs du Parc des Princes, l'attaquant brésilien a cassé le nez au joueur du PSG, Pierre Ménès. «On savait que Brandao était un bourrin violent sur le terrain. C'est donc aussi un voyou en dehors. Quand va-t-on se débarrasser de lui ?» Ces dossiers, qui font quotidiennement les «unes» des journaux et l'objet d'émission radio-télé, devraient durer encore longtemps afin que chacun puisse prendre acte des conséquences de cette violence, qui est une machine entretenue pour broyer les innocents, pour les règlements de compte et pour permettre aux voyous d'imposer sur les gradins leur territoire, tracer les frontières. La solution ne passe pas et ne passera pas par la théorie, mais par des actions directes qui seront menées d'abord par les clubs, les entraîneurs, les joueurs et les arbitres. Les premiers qui devraient réussir cette opération, ce sont bien les joueurs sur le terrain qui changeraient de comportement pour endosser le vrai maillot pour lequel, ils jouent, celui du club, de la sportivité et de la valeur olympique. Aux entraîneurs de se démarquer des provocateurs et considérer l'arbitre comme un partenaire incontournable.