«En ce jour du 1er novembre 2014, je tiens à rendre hommage à nos chouhada et par la même occasion à feu mon père le moudjahid Ali qui a été emprisonné entre 1958 et 1962 à El-Harrach et à Lambèse, en espérant que l'Algérie en ces moments de grands bouleversements géostratégiques évitera les turbulences. L'Algérie est indépendante depuis plus de 50 ans. Dan ce contexte, gouverner étant de prévoir, de gérer la pénurie et non de dépenser sans compter se pose cette question stratégique : les pouvoirs successifs entre 1963-2014 ont-ils préparé le défi majeur de l'après-hydrocarbures pour les générations futures pour être à la hauteur des sacrifices de ceux qui ont libéré le pays? Le taux de croissance global de l'économie est relativement faible, sachant qu'un accroissement par rapport à un taux de croissance faible de l'année précédente (ce qui est le cas de l'Algérie) donne toujours en valeur relative un taux de croissance faible même si le taux est supérieur l'année qui suit. Pour le gouvernement, le taux d'inflation a été en moyenne de 3% entre 2008/2014, excepté 2012 où il a atteint les 10%». Le taux d'inflation officiel repose sur un indice largement dépassé, alors que le besoin est historiquement daté. Un agrégat global comme le revenu national par tête d'habitant peut voiler d'importantes disparités entre les différentes couches sociales. Dire que le salaire moyen de l'Algérien est de 30 000 dinars n' a aucune signification économique sans tenir compte de la concentration du revenu national au profit d'une minorité rentière. Une analyse pertinente doit lier le processus d'accumulation la répartition du revenu (70% percevant moins de 300 euros par mois net), le modèle de consommation par couches sociales, l'évolution des biens de première nécessité. L'on doit déflater par le taux d'inflation réel pour déterminer le véritable pouvoir d'achat. Aussi, une interrogation s'impose : comment est-ce qu'un Algérien, qui vit au SNMG, 200 euros par mois, soit 6 euros par jour alors que le kilo de viande dépasse 10 euros fait face aux dépenses incontournables : alimentation, transport, santé, éducation. La cellule familiale, paradoxalement, la crise du logement (même marmite, mêmes charges), les subventions et les transferts sociaux, 60 milliards de dollars soit 27/28% du PIB 2013/2014 jouent temporairement comme tampon social ? Comme cela pose la problématique de la dépendance alimentaire croissante. 3.- Les exportations pour 97% représentées par les hydrocarbures libellées en dollars, d'où l'importance d'être attentif aux fluctuations des taux de change au niveau international, ont fortement reculé ces dernières années. Une hausse du dollar et une baisse de l'euro réévaluent les exportations en valeur mais gonflent les importations algériennes –60% en euros. Le pays est fortement dépendant des biens de capital et des biens de consommation intermédiaires et finaux presque tous importés n'ayant pas jeté les bases d'un appareil productif capable d'affronter la concurrence internationale et les tendances relatives des grands agrégats économiques bien que positives, révèlent une macroéconomie sous contrôle relatif. Les hydrocarbures représentent l'essentiel des exportations et la persistance des déficits publics a produit un système d'éviction sur l'investissement productif et une dette publique intérieure et extérieure épongée artificiellement par la rente des hydrocarbures. Le montant des réserves de change, signe monétaire dues à des facteurs exogènes et non signe du développement, composée des réserves de change à hauteur de 46% en dollars et à 42% en euros, le reste étant constitué d'autres monnaies étrangères à l'image de la livre sterling et le yen japonais, dont 80% environ placées à l'étranger, notamment en bons de trésor américains et européens, ont été estimées à 56 milliards de dollars en 2005, 77,78 milliards en 2006, 110 milliards en 2007 à 138,35 milliards de dollars en 2008, pour 2009 à 147,2 milliards de dollars, 157 milliards de dollars en 2010 et à 194 milliards de dollars par la banque d'Algérie fin mars 2014 non compris les 173 tonnes d'or. Si la baisse des cours des hydrocarbures se maintient la fourchette de 85 dollars, le budget fonctionnant sur la base d'un cours de 120/125 dollars entre 2014/2015 contre 110/115 entre 2012/2013 a un répit quatre années. 4.-D'où l'importance de la rationalisation des choix budgétaires et éviter les effets mitigés de la dépense publique et les réévaluations permanentes qui , sans être exhaustives, sont les suivantes : l'existence d'un décalage entre la planification budgétaire et les priorités sectorielles ; l'absence d'interventions efficaces dues à un morcellement du budget résultant de la séparation entre le budget d'investissement et le budget de fonctionnement ; des passifs éventuels potentiellement importants; des écarts considérables entre les budgets d'investissement approuvés et les budgets exécutés ; des longs retards et des surcoûts pendant l'exécution des projets. Pour la formulation, l'Algérie utilise un système de classification obsolète avec la lourdeur des procédures qui empêchent la clôture rapide de la période de fin d'exercice pour l'arrêt du budget du fait que le système de gestion budgétaire du pays est inadapté et a besoin d'être considérablement revu , ces surcoûts de transaction étant amplifiés par les longs circuits d'information, avec le chevauchement des responsabilités entre les diverses autorités et parties prenantes (25 commissions ministérielles et 48 commissions de wilaya dans le cas du PSRE). Le guide de management des grands projets d'infrastructures économiques et sociales élaboré en 2010 par la Caisse nationale d'équipement pour le développement (Cned) sur le contrôle financier et la dépense d'équipement, stipulant que toutes les études de maturation des projets devront être validées par la Cned, avant le lancement des projets, et la soumission de toute réévaluation des projets au delà de 15%, à l'aval du Conseil des ministres, contribueront-ils à affiner l'action des pouvoirs publics en matière d'efficience des dépenses publiques ? Ces mesures mettront- elles fin au gaspillage des ressources eu égard au surcoût caractérisant la majorité des mégaprojets et surtout de la léthargie du système financier lieu de distribution de la rente. 5.-Le système financier algérien est dans l'incapacité d'autonomiser la sphère financière de la sphère publique, cette dernière étant totalement articulée à la sphère publique dont l'Etat est actionnaire à 100%, le privé local ou international étant marginal, et les dernières mesures contenues dans la loi de finances 2010 devraient encore le restreindre. Après plus de 10 années d'ouverture, le marché bancaire algérien selon le rapport de la banque d'Algérie de 2009 se compose de six banques publiques et de quatorze banques privées, mais ne devant pas confondre l'importance du nombre de banques privées actives en Algérie, puisque 90% du financement de l'économie algérienne dont 100% secteur public et plus de 77% secteur privé, se fait par les banques publiques avec une concentration au niveau des actifs de plus de 39% au niveau d'une seule banque, la BEA, communément appelé la banque de la Sonatrach. Seulement 10% du financement de l'économie sont pris en charge par les banques privées, (moins de 6000 personnes sur un total d'emplois de plus de 35.000) avec une concentration de plus de 52% toujours pour les actifs pour trois banques. De ce fait, le passage du Remdoc au crédit documentaire Crédoc, introduit par les lois de finances 2009/2010 comme seul mode de financement ainsi que la règle des 49/51% n‘ ont pas permis de limiter les importations qui ont explosé, (importations de biens et de services plus de 65 milliards de dollars pour 2013/2014) pouvant devenir d'une efficacité limitée pénalisant bon nombre de PMI/PMI majoritaires en Algérie qui n'ont pas de couvertures financières suffisantes, et obligeant bon nombre de grandes entreprises publiques faute de management stratégique, à des surstocks coûteux. La raison fondamentale est que le système financier algérien bureaucratisé (guichets administratifs) est déconnecté des réseaux internationaux démontrant une économie sous perfusion de la rente des hydrocarbures, les banques prenant peu de risques dans l'accompagnement des investisseurs potentiels. 6.-Que deviendra l'Algérie avec la baisse de ses recettes car malheureusement, malgré tous les discours depuis plus quarante ans , en ce mois de novembre 2014, l'Algérie est toujours une économie rentière. Sonatrach c'est l'Algérie et l'Algérie c'est Sonatrach. Les réformes impliquent donc une société où domine un Etat de droit, où c'est la norme du droit qui devrait reprendre sa place pour légitimer le véritable statut de la citoyenneté. Le passage de l'Etat de «soutien» à l'Etat de droit est de mon point de vue un pari politique majeur car il implique tout simplement un nouveau contrat social et politique entre la Nation et l'Etat. La présentation du bilan socio-économique montre clairement le manque de visibilité et de cohérence, fruit de rapports de forces contradictoires pour le partage de la rente des hydrocarbures avec une concentration excessive pour une minorité rentière et un paradoxe, une aisance financière et des inquiétudes pour l'avenir. Sans un retour à la confiance impliquant la la moralisation de ceux qui dirigent la Cité devant donner l'exemple pour mobiliser la société, il est impossible d'envisagerles réformes structurelles, fondementdu développementdurable. Face à cette situation d'incertitudes, tout le monde veut avoir sa part de la rente hypothéquant l'avenir des générations futures. La distribution récente de salaires sans contreparties productives, sous la pression des événements en est le témoignage vivant. Le danger qui guette donc l'Algérie est d'aller vers un suicide collectif. Un débat national sans exclusive, le blocage étant d‘ordre systémique, devient urgent afin de réaliser un développement harmonieux et une transition démocratique pacifique s'adaptant tant aux mutations sociales internes qu'aux nouvelles mutations mondiales. [email protected] (Suite et fin)