Le Forum économique et social du cinquantenaire de l'indépendance, organisé à l'initiative du Conseil national économique et social (CNES), à compter du 18 juin 2013 aurait pour objectif d'identifier les grandes lignes du développement socio-économique de l'Algérie au-delà de l'horizon 2015.Encore une rencontre pour combler le vide, alors que le diagnostic a été effectué depuis des années tant par les experts algériens, qu'internationaux, par la presse nationale, parfois par certains membres du gouvernement plus lucides, ayant assisté à plusieurs audiences de tous les membres du gouvernement par le président de la République, et les solutions du moins dans leurs lignes directrices connues. S'il faille éviter la sinistrose car tout ce qui a été entrepris durant la période 2000/2010 n'a pas été totalement négatif, après une décennie sanglante entre 1990/1999 où la demande sociale a été comprimée et l'économie à l'arrêt, il faut également éviter l'autosatisfaction source de névrose collective comme en témoigne les tensions sociales qui touchent tous les secteurs et toutes les wilayas de l'Algérie , reflet d'une aisance financière et des inquiétudes pour l'avenir résumé par cette phrase lapidaire : un Etat riche mais une population de plus en plus pauvre. L'objet de cette contribution est de situer avec objectivité le débat qui engage la sécurité nationale. I.-L'Algérie ne saurait occulter les mutations mondiales , dont la nouvelle restructuration productive mondiale, la guerre récente des monnaies , aspirant adhérer à l'organisation mondiale du commerce (OMC) et étant liée à un Accord de libre-échange avec l'Europe, signé en toute souveraineté par le gouvernement algérien, applicable depuis le 01 septembre 2005 postulant un dégrèvement tarifaire progressif allant vers zéro horizon 2017/2020 qui aura un impact sur le choix des projets futurs, les entreprises algériennes étant les plus fragiles du bassin méditerranéen. Le report de trois années horizon 2020 suffira-t-il ? Dans cet Accord, l'Algérie s'engage à aller résolument vers une économie de marché qui a ses propres règles de fonctionnement, n'existant pas d'économie de marché spécifique mais des spécificités sociales. Elle s'est engagée d'aller vers la libéralisation de son économie, ce qui saurait signifier ouverture sauvage mais une ouverture maitrisée. Pourtant des divergences se sont manifestées depuis la promulgation des lois de finances complémentaire 2009/2010 encadrant et limitant l'investissement étranger. Dialogue de sourd : l'Algérie reproche à l'Europe le manque d'enthousiasme dans l'investissement invoquant que les baisses tarifaires auraient entraîné un manque à gagner de 2 milliards de dollars en 2012 et seraient de 7 milliards de dollars horizon 2017 selon le document présenté par l'Algérie à Bruxelles lors de l'évaluation de l'Accord et l'Europe reproche à l'Algérie le manque de visibilité dans les réformes micro-économiques et institutionnelles. Les contraintes seront plus dures si l'Algérie adhère à l'organisation mondiale du commerce (OMC). Les questions fondamentales toujours en suspens posées surtout par l'Europe et les Etats-Unis d'Amérique, comme la dualité des prix du gaz, la libéralisation des services, la libre circulation des biens et des capitaux et une nette volonté politique d'accélérer le processus de privatisation des segments concurrentiels, restent toujours posées II.- La population algérienne était de 35,6 millions d'habitants au 1er janvier 2010 et l'Office des statistiques ((ONS) donne une population de 37,1 millions d'habitants au 1er janvier 2013. Concernant la structure de la population, la répartition par âge fait ressortir que la population âgée de moins de 15 ans constitue 28,2% de la population totale. La population active dépasse les 10,5 millions et la demande d'emplois additionnelle varierait entre 300.000 à 400.000 personnes par an, nombre d'ailleurs sous-estimé puisque le calcul de l'ONS applique un taux largement inférieur pour les taux d'activité à la population féminine, représentant pourtant la moitié de la population active et dont la scolarisation est en forte hausse. Pourtant le taux de chômage officiel est estimé à environ 10% en 2012 mais incluant les sureffectifs des administrations, des entreprises publiques, les emplois dans la sphère informelle et les activités temporaires de moins de six (6) mois en majorité des emplois improductifs refaire les trottoirs ou désherber les routes. Or, taux d'emploi est fonction du taux de croissance et des structures des taux de productivité. Selon les données statistiques tant de l' ONS que le bilan officiel de la situation socio-économique, malgré une injection massive de la dépense publique , l'Etat dépense 2 fois plus que la moyenne des pays émergents d'Asie avec des résultats deux fois moindres. Le taux de croissance global de l'économie est relativement faible, sachant qu'un accroissement par rapport à un taux de croissance faible de l'année précédente (ce qui est le cas de l'Algérie) donne toujours en valeur relative un taux de croissance faible même si le taux est supérieur l'année qui suit. Il aurait été de 2% en 2007/2008, 3% en 2009, (contre 5% entre 2005/2006) et selon les estimations internationales à 4 % en 2010, à 3,5% en 2011 et à 3,6% entre 2012 et 2,8% en 2013. 98 % des exportations du pays sont toujours issues des seuls hydrocarbures et important environ 70/75% des besoins des ménages et des entreprises publiques et privées. Ceux-ci ont généré quelque 600 milliards de dollars de recettes en devises entre 2000 et 2012, selon les bilans de Sonatrach. III- Cette manne a permis à l'Algérie d'éteindre la majeure partie de sa dette extérieure et de diminuer artificiellement sa dette intérieure, et de disposer de réserves de change considérables, 200 milliards de dollars selon le FMI, en janvier 2013 , et selon les données de la banque d'Algérie début juin 2013, les réserves de change de l'Algérie, ont baissé d'un milliard de dollars entre fin décembre 2012 et fin mars 2013, l'encours des réserves de change de l'Algérie ( non compris les 173 tonnes d'or) étant évalué à 189,768 milliards de dollars à la fin mars 2013 contre 190, 661 milliards à fin décembre 2012. Environ, 86% sont placées en bons de trésor américains et en obligations européennes à un taux fixe de 3%, et 8 milliards de dollars en DTS du FMI (dont 5 en prêts) à un taux inférieur à 1%. Face à cette aisance financière, selon différents conseils de ministres, la dépense publique est passée successivement de 55 milliards de dollars en 2004, à 100 milliards de dollars en 2005 puis à 140 milliards de dollars fin 2006 et qui a été prévu entre 2004/2009 à 200 milliards de dollars mais faute de bilan on ne sait pas si l'intégralité de ce montant a été dépensé. Quant au programme d'investissements publics 2010/2014, le gouvernement a retenu des engagements financiers de l'ordre de 21.214 milliards de DA (ou l'équivalent de 286 milliards de dollars) et concerne deux volets, à savoir le parachèvement des grands projets déjà entamés entre 2004/2009, l'équivalent à 130 milliards de dollars (46%) et l'engagement de projets nouveaux pour un montant de 11.534 milliards de DA soit l'équivalent de près de 156 milliards de dollars. Qu'en sera-t-il des restes à réaliser pour les nouveaux projets inscrits au 31/12/2004 à la fois faute de capacités d'absorption et d'une gestion défectueuse ? Quant au fonds de régulation des recettes géré par le trésor, différence entre le prix réel des hydrocarbures et le prix fixé par la loi de finances (37 dollars) à ne pas confondre avec les fonds souverains qui sont des fonds d'investissement (le gouvernement algérien ayant écarté le recours à cette procédure), il est artificiellement gonflé par le dérapage du dinar par rapport au dollar( se calculant en dinars) et gonflant indirectement la fiscalité hydrocarbures voilant l'importance du déficit budgétaire, dont d'ailleurs la dépense publique se fonde sur la base d'un cours de 110 dollars avec prédominance du budget de fonctionnement. En cas d'un cours de 85/90 dollars il sera épuisé au bout de 3 à 4 années. IV- Paradoxe, le PIB algérien reste modeste à 188,6 milliards de dollars en 2012 selon le FMI, dont plus de 40-45 % générés par les hydrocarbures et en réalité, tenant compte des effets indirects de la dépense publique via toujours les hydrocarbures, restant que moins de 20% pour les véritables producteurs de richesses. Comme on ne saurait minimiser la corruption qui freine la mise en œuvre d'affaires saines. Un rapport, rendu public le 29 mai 2O13 par la Banque africaine de développement (BAD) sur la fuite des capitaux en Afrique, fait ressortir que le montant des capitaux transférés en dehors de l'Algérie de manière illicite, (dominée par les surfacturations) entre la période allant de 1980 à 2009, a atteint la somme astronomique de 173,711 milliards de dollars US. Nous assistons de ce fait à un environnement des affaires contraignant. Dans ses différents rapports le World Economic Forum (WEF-Forum économique mondial), ou d'autres rapports internationaux élaborés entre 2000/2013 », soulignent que des lois trop restrictives ou encore désuètes sont des obstacles aux investissements, que leur mise en œuvre peut engendrer des coûts additionnels pour les investisseurs Selon ce rapport, l'Algérie doit d'améliorer sa compétitivité du point de vue de la sophistication des affaires , de l'efficience du marché du travail, de l'efficience du marché des biens , du développement technologique et de l'innovation , améliorer l'efficacité des institutions , l'innovation et de l'enseignement supérieur et de la formation. A part le secteur des hydrocarbures, celui des télécommunications, certains segments des services à rentabilité immédiate, l'Algérie ne semble guère intéresser les investisseurs étrangers. v.- Pour le gouvernement, le taux d'inflation a été de 1,6 % en 2005, 3% en 2006, à 3,5 % en 2007, 4,5% en 2008, 5,7% en 2009 4% en glissement annuel pour 2010/2011 et approchant 9% en 2012. Le taux d'inflation officiel repose sur un indice largement dépassé, alors que le besoin est historiquement daté. Un agrégat global comme le revenu national par tête d'habitant peut voiler d'importantes disparités entre les différentes couches sociales. Une analyse pertinente doit lier le processus d'accumulation la répartition du revenu ( 70% percevant moins de 200 euros par mois net) , le modèle de consommation par couches sociales. Certes, le SNMG a plus que doublé en passant de 6.000 à 18 000 dinars ces dernières années, à prix courants, mais devant déflater par le taux d'inflation réel pour déterminer le véritable pouvoir d'achat, 10% où les ménages en dessous de 200 euros consacrent 80% de leurs revenus. Aussi, une interrogation s'impose : comment est-ce qu'un Algérien, qui vit au SNMG, (120 euros par mois, soit 4 euros par jour alors que le kilo de viande est depuis les six mois de 2010 de 10 euros) fait face aux dépenses incontournables : alimentation, transport, santé, éducation. La cellule familiale, paradoxalement, la crise du logement (même marmite, même charges) et les transferts sociaux, mal gérés et mal ciblées ont atteint plus de 1.400 milliards DA en 2012, soit 18% du budget général de l'Etat et plus de 10% du PIB jouent temporairement comme tampon social ? VI- Le bilan de l'investissement productif est mitigé. Selon les chiffres communiqués par l'Agence de développement des investissements, indiquent que ce sont les projets locaux qui sont dominants avec 99% des déclarations de projets. Pour ce qui est de la répartition des projets par secteur, c'est celui des transports qui attire le plus d'investissements depuis 2009 avec 60% en majorité des micro- projets, suivi par le secteur du bâtiment, des travaux publics et de l'hydraulique (16 %), du secteur de l'industrie (10 %), celui de l'agriculture (2 %). D'une manière générale les investissements directs étrangers significatifs réalisés restent insignifiants en dehors des hydrocarbures, avec un déclin entre 2009/2012 avec une baisse de tout se finançant sur fonds publics grâce à la règle des 49/51% généralisable à tous les secteurs dont on peut démontrer que al balance devises est négative et que transfert technologique et managérial est marginal. C'est que l'économie se caractérise par un secteur public hypertrophié par rapport au secteur privé et la dominance du secteur informel contrôlant environ 40% de la masse monétaire en circulation, et dont la superficie économique dépasse les 50%. Environ 42% des effectifs ne sont pas déclarés et 30% de leur chiffre d'affaires échappent au fisc dépassant 200 milliards de dinars annuellement, soit au cours actuel 2,6 milliards de dollars selon l'UGCAA. Les transactions commerciales se font sans aucune facturation, 70 à 80% des transactions utilisent le « cash », comme moyen de payement, ne payent pas leurs cotisations à la Casnos et que l'approvisionnement des 2/3 de la population provient de la sphère informelle. Comme résultat 90% de l'activité économique est dominée par le commerce de détail (tertiaitrisation de l'économie) et pour le secteur industriel en déclin (moins de 5% du PIB) 83% sont constitués de PMI/PME avec une organisation familiale peu ouvertes à l'innovation. Le pays est fortement dépendant des biens de capital et des biens de consommation intermédiaires et finaux presque tous importés n'ayant pas jeté les bases d'un appareil productif capable d'affronter la concurrence internationale et les tendances relatives des grands agrégats économiques bien que positives, révèlent une macroéconomie sous contrôle relatif. Les hydrocarbures représentent l'essentiel des exportations et la persistance des déficits publics a produit un système d'éviction sur l'investissement productif et une dette publique intérieure et extérieure épongée artificiellement par la rente des hydrocarbures. VII.- Dans ce cadre de l'efficacité mitigée de la dépense publique, le rapport de la Banque mondiale 2008 remis aux autorités algériennes montre clairement, à partir d'enquêtes précises sur le terrain, la faible efficacité de la dépense publique du programme de soutien à la relance économique. D'où les effets mitigés de la dépense publique et les réévaluations permanentes qui , sans être exhaustif, sont les suivantes : l'existence d'un décalage entre la planification budgétaire et les priorités sectorielles ; l'absence d'interventions efficaces dues à un morcellement du budget résultant de la séparation entre le budget d'investissement et le budget de fonctionnement ; des passifs éventuels potentiellement importants ; des écarts considérables entre les budgets d'investissement approuvés et les budgets exécutés ; des longs retards et des surcoûts pendant l'exécution des projets. Pour la formulation, l'Algérie utilise un système de classification obsolète avec la lourdeur des procédures qui empêchent la clôture rapide de la période de fin d'exercice pour l'arrêt du budget du fait que le système de gestion budgétaire du pays est inadapté et a besoin d'être considérablement revu , ces surcoûts de transaction étant amplifiés par les longs circuits d'information, avec le chevauchement des responsabilités entre les diverses autorités et parties prenantes (25 commissions ministérielles et 48 commissions de wilaya dans le cas du PSRE). Le guide de management des grands projets d'infrastructures économiques et sociales élaboré en 2010 par la caisse nationale d'équipement pour le développement (CNED) sur le contrôle financier et la dépense d'équipement, stipulant que toutes les études de maturation des projets devront être validées par la CNED, avant le lancement des projets, et la soumission de toute réévaluation des projets au-delà de 15%, à l'aval du Conseil des ministres, contribueront ils à affiner l'action des pouvoirs publics en matière d'efficience des dépenses publiques ? VIII- Ces mesures mettront- elles fin au gaspillage des ressources eu égard au surcoût caractérisant la majorité des mégaprojets et surtout de la léthargie du système financier lieu de distribution de la rente (enjeux des réformes futures et donc du pouvoir) expliquant que les réformes annoncées depuis 1990 n'ont jamais été réalisées. Les banques algériennes n'arrivent pas à concurrencer sérieusement leurs consœurs selon « d'African Business ». Le système financier algérien est dans l'incapacité d'autonomiser la sphère financière de la sphère publique, cette dernière étant totalement articulée à la sphère publique dont l'Etat est actionnaire à 100%, le privé local ou international étant marginal, et les dernières mesures contenues dans la loi de finances 2010 devraient encore le restreindre. Après plus de 10 années d'ouverture, le marché bancaire algérien selon le rapport de la banque d'Algérie, de 2009 se compose de six banques publiques et de quatorze banques privées, mais ne devant pas confondre l'importance du nombre de banques privées actives en Algérie, puisque 90% du financement de l'économie algérienne dont 100% secteur public et plus de 77% secteur privé, se fait par les banques publiques avec une concentration au niveau des actifs de plus de 39% au niveau d'une seule banque, la BEA, communément appelé la banque de la Sonatrach. Seulement 10% du financement de l'économie sont pris en charge par les banques privées, De ce fait, le passage du Remdoc au crédit documentaire Crédoc, introduit par les lois de finances 2009/2010 comme seul mode de financement, outre qu'il ne garantit pas la traçabilité existante déjà au niveau du Remdoc, procédure normale sous d'autres cieux, peut devenir d' une efficacité limitée pénalisant bon nombre de PMI/PMI majoritaires en Algérie qui n'ont pas de couvertures financières suffisantes, et obligeant bon nombre de grandes entreprises publiques faute de management stratégique, à des surstocks coûteux. La raison fondamentale est que le système financier algérien bureaucratisé (guichets administratifs) est déconnecté des réseaux internationaux expliquant d'ailleurs le peu d'impact de la crise financière mondiale sur l'Algérie, démontrant une économie sous perfusion de la rente des hydrocarbures, les banques prenant peu de risques dans l'accompagnement des investisseurs potentiels. IX-Ces nouvelles mesures projectionnistes permettront –elles de relancer l'outil de production et les entreprises nationales, pourront-elles répondre aux défis de la mondialisation ? Doit-on continuer toujours d'assainir ou n'est-il pas préférable de projeter des investissements nouveaux pouvant tenir tête à la concurrence internationale ? Les entreprises locales profiteront –elles de cette situation de rente pour pousser à une meilleure intégration et combien d'entreprises publiques et privées locales ont –elles des laboratoires de recherche appliquée digne de ce nom y compris Sonatrach ? Aussi, de plus en plus d'experts algériens recommandent qu'au lieu de cette vision juridique peu opérante des 49/51% lui soient substitués la balance devises excédentaire et l'apport technologique et manageriel pour tout investissement étranger. A cela s'ajoute la nécessaire cohérence et visibilité qui sont les principes cardinaux du monde des affaires. Faute de quoi, ces mesures auront un impact très mitigé sur l'accumulation c'est-à-dire le développement futur du pays. Car il est suicidaire en ce monde en mouvement que le pouvoir d'Etat veuille tout régenter, limiter l'autonomie des entreprises publiques, soumette le secteur privé local à sa propre logique et également limiter le secteur privé international avec une logique essentiellement administrative juridique- (participation majoritaire dans le capital) invoquant le contrôle des secteurs stratégiques sans délimitations précises. Toutes les actions depuis 2009, semblent aller dans ce sens, comme en témoigne le gel de l'autonomie des entreprises publiques avec une gestion administré, les gestionnaires publics attendant les ordres d'en haut et de surcroît sans planification stratégique des autorités de tutelle. De nombreuses sociétés à capitaux publics sont retournées depuis 2009 dans le giron des ministères de tutelle, mettant fin de fait à leur autonomie. Ce retour au dirigisme inquiète les gestionnaires du secteur public. D'ailleurs l'assainissement des entreprises publiques a couté au trésor plus de 60 milliards de dollars entre 1971/2012 sans résultats probants, 70% des entreprises étant revenues à la case de départ au nom d'une paix sociale fictive et transitoire, qui combinée à l'injection d'une masse monétaire sans précédent risquant de conduire le pays à une hyperinflation que l'on essaie de comprimer transitoirement par des subventions. X-Pour calculer la durée de vie des réserves en Algérie, il s'agit de prendre en compte l'évolution des coûts et des prix internationaux, pouvant découvrir des milliers de gisements non rentables. La durée de vie des réserves est également influencée par le volume tant les exportations que de la forte consommation intérieure du fait du bas prix du gaz, un des plus bas au niveau du monde, bloqués par la décision du 30 mai 2005. Selon la déclaration du PDG de Sonatrach en date du 24 février 2013 les réserves algériennes en gaz conventionnel sont de 2000 milliards de mètres cubes gaz, loin des données euphoriques de 4500, soit 1,3% des réserves mondiales, encore que certains experts préconisent de limiter les gaz torchés et utiliser les techniques pour accroître les réserves. La consommation intérieure en 2012, selon le Creg est de 25/30 milliards de mètres cubes gazeux et avait extrapolé environ 50 milliards de mètres cubes gazeux horizon 2017/2020. Mais ce montant a été calculé avant l'annonce des nouveaux projets consommateurs d'une grande quantité de pétrole et de gaz. Mais avec ce paradoxe, les ménages étant les plus importants consommateurs d'électricité que les entreprises montrant une désindustrialisation du pays, loin donc des normes internationales, posant la problématique des subventions généralisées et non ciblées. Selon une récente étude du PNUD ayant exploité les données de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), l'Algérie figure parmi les pays arabes qui subventionnent le plus les produits énergétiques avec 10,59 milliards de dollars (quelque 800 milliards de DA) consacrés à la subvention des prix de l'énergie en 2010 L'électricité a profité de 2,13 milliards dollars (quelque150 milliards DA) de subventions, tandis que les carburants ont coûté 8,46 milliards de dollars (environ 650 milliards de DA). Ces subventions représentent, selon l'organisme onusien, 6,6% du PIB algérien en 2010. Aussi, la consommation intérieure risque d'être fortement augmentée après les décisions courant 2012 d'installer d'importantes capacités d'électricité fonctionnant au gaz. En effet, suite aux coupures récurrentes d'électricité, il a été décidé de doubler la capacité d'électricité à partir des turbines de gaz. Sonelgaz dans son programme 2012/2017 vise à investir, avec l'appui du gouvernement pour lui permettre d'augmenter sa production de 8.000 Mégawatts supplémentaires, portant le total à 12.000 Mégawatts pour un montant de 36,55 milliards d'euros. Dès lors, avec cette augmentation de la consommation intérieure, du fait de la décision de ne pas modifier les prix intérieurs, il y a risque d'aller vers 70 milliards mètres cubes gazeux horizon 2017-2020 de consommation intérieure, dépassant le volume des exportations de 2012 et rendant problématique les extrapolations d'exportation de 85 milliards de mètres cubes gazeux prévus dès 2014.. Si l'on prend l'hypothèse d'exportation de 85 milliards mètres cubes gazeux et 70 milliards de mètres cubes gazeux de consommation intérieures, il faudrait produire dès 2017 entre 155 milliards de mètres cubes gazeux supposant d'importants investissements dans ce domaine, limitant le financement des secteurs hors hydrocarbures et donnant une durée de vie de 13 ans maximum soit horizon 2026 à moins de grandes découvertes. Quant au gaz de schiste, contrairement à certaines déclarations, reprenant un vieux rapport de 2002 à la demande de Sonatrach, triplant récemment ses réserves, l'Algérie étant un pays semi-aride, 1 milliard de mètres cubes gazeux nécessitant 1 millions de mètres cubes d'eau douce, sans compter plusieurs centaines de produits chimiques injectés dans les nappes, supposant la maitrise de la technologie, son exploitation en Algérie n'est pas pour demain, le cout étant trop élevé, devant éviter cette mentalité rentière et nous mettre au travail et penser à une transition énergétique maitrisée. La définition de l'entreprise et du manager c'est la prise de risque et sans cela l'on ne peut aller à l'innovation et conquérir des marchés où la concurrence internationale est vivace. XI- En conclusion, le bilan socio-économique 2000/2013 par rapport à l'importance de la dépense, sans compter c'est à dire sans gestion et management stratégique, est mitigé. La présentation du bilan économique 2000/2013 avec le manque de visibilité et de cohérence montre clairement un paradoxe : une aisance financière, grâce à des facteurs exogènes et non d'une bonne gouvernance et des inquiétudes pour l'avenir de l'Algérie. En restant dans l'actuelle trajectoire il n'est pas possible de préparer l'après hydrocarbures. Il faut donc changer de politique et éviter l'aveuglement de continuer dans cette voie suicidaire. Il s'agit de mettre fin aux graves dérives et dangers de l'économie prédatrice et mafieuse afin qu'entre 2013 et 2020, l'Algérie puisse doubler le produit intérieur brut, avec une diminution des sections rentes, couplée avec une profonde justice sociale, si elle veut éviter de graves dérives sociales et politiques. Pour cela la bonne gouvernance à tous les niveaux sera déterminante avec le rétablissement de la morale (donc du travail) de ceux qui aspirent à gérer la Cité, la corruption ayant atteint un niveau rarement égalée menaçant les fondements de l'Etat algérien. Les réformes, en profondeur, évitant les replâtrages qui diffèrent les tensions, économiques et politiques solidaires impliquent donc une société où domine un Etat de droit, où c'est la norme du droit qui devrait reprendre sa place pour légitimer le véritable statut de la citoyenneté. Le passage de l'Etat de « soutien » à l'Etat de droit est de mon point de vue un pari politique majeur car il implique tout simplement un nouveau contrat social et politique entre la Nation et l'Etat. Pourtant l'Algérie du fait de ses potentialités peut surmonter la crise multidimensionnelle actuelle pour peu que le langage de la vérité l'emporte sur la démagogie, pouvant devenir un acteur déterminant face aux enjeux géostratégiques mondiaux(1). (1) Intervention du professeur Abderrahmane MEBTOUL à l'Assemblée Nationale Française au séminaire international organisé par l'Institut Maghrébin d'Etudes et de Prospectives - 21 juin 2013 « « L'intégration du Maghreb face aux enjeux géostratégiques : l'Algérie un acteur déterminant»