21 personnes sont mortes après l'attaque du musée du Bardo, à Tunis, selon le dernier bilan publié. L'Elysée avait confirmé dans la soirée de mercredi la mort de deux Français, ajoutant que sept autres ressortissants figuraient parmi les blessés, dont un se trouvait «dans un état grave». Neuf suspects ont été arrêtés jeudi lors de l'opération des forces de sécurité tunisiennes menée pour rechercher d'éventuels complices des deux assaillants abattus dans l'assaut des forces de l'ordre. Les deux terroristes ayant perpétré l'attaque au musée du Bardo, en l'occurrence Saber Khachnaoui et Yassine Laabidi, étaient tout deux originaires de la ville de Sbeitla, dans le gouvernorat de Kasserine près des frontières algériennes. Ils seraient revenus de Libye il y a seulement 3 mois et ils appartiendraient au groupe djihadiste Katibat Okba Ibn Nafaa, qui n'est autre qu'une nouvelle appellation du groupe Ansar Achariaa dirigé par Abou Iyadh, assurent des sources concordantes. Le musée du Bardo a retrouvé son calme jeudi matin. Dans le quartier, la circulation est à nouveau fluide et la rue qui mène au lieu de l'attentat était libre d'accès. De l'attaque de mercredi, il ne reste comme seule trace visible qu'un périmètre de sécurité délimité par un ruban jaune aux abords du musée. Les forces de l'ordre sont bien moins nombreuses que la veille et quelques voitures seulement ont accès au parking qui conduit au musée et à l'Assemblée nationale constituante qui le jouxte. Des députés se dirigeaient vers le Parlement, tandis que des dizaines de journalistes étrangers restaient assemblées dans la rue. Face au musée, près du café La gazelle, un groupe de Tunisiens menaient une discussion enflammée sur l'avenir du pays et l'extrémisme religieux. Retour au déroulement de l'attentat L'attentat, qui a duré près de quatre heures, a commencé en début d'après-midi, lorsque deux assaillants armés de kalachnikovs ont ouvert le feu sur des touristes qui descendaient de leurs autocars sur le parking du musée. Les hommes armés ont ensuite pourchassé les touristes à l'intérieur du musée du Bardo, a relaté le premier ministre de la Tunisie. S'exprimant devant la presse, Wafel Bouzi, un guide qui avait accompagné un groupe de touristes hispanophones au musée, a témoigné avoir aperçu sur le parking un «jeune homme de 25 ans, normalement vêtu, sans barbe», qui tenait une kalachnikov. «Il la manipulait, je pensais qu'il jouait avec, puis il a ouvert le feu.» «Nous nous sommes rendu compte qu'il ne s'agissait pas de pétards mais de terroristes qui tiraient sur toutes les personnes qui marchaient sur la place. Après, ils sont entrés dans le musée. Ils étaient à presque dix mètres, ils tiraient sur tout ce qui bougeait», a expliqué Josep Lluis Cusido, un touriste espagnol. «Je suis resté allongé par terre presque trois heures.» Le Parlement voisin a été évacué dès la fin de matinée. La «panique» a été «énorme» lorsque les coups de feu ont retenti, a relaté la députée Sayida Ounissi sur Twitter. La fusillade a eu lieu «en pleine audition des forces armées sur la loi antiterroriste», en présence du « ministre de la justice, de juges et de cadres de l'armée ». L'intervention des forces de l'ordre aux abords du musée s'est terminée vers 15h30. Il s'agit de la pire attaque terroriste en Tunisie depuis l'attentat qui avait fait 21 victimes, principalement des touristes allemands, devant une synagogue de Djerba en 2002. L'attaque avait été, rappelons-le, revendiquée par Al-Qaida. Selon le dernier bilan du ministère de la Santé dans la matinée de jeudi, 21 personnes sont mortes, en plus des deux assaillants. Parmi elles, 20 touristes et un Tunisien membre des forces de l'ordre. Trente-sept personnes sont toujours hospitalisées. Un couple d'Espagnols est sorti seulement jeudi matin de sa cachette dans le musée du Bardo. Ce qui prouve encore la défaillance du système sécuritaire. Les services de sécurité n'ont finalement pas passé au peigne fin les lieux. L'attentat revendiqué Le groupe djihadiste Etat islamique (EI) a revendiqué l'attentat contre le musée Bardo de Tunis qui a coûté la vie à 21 personnes et fait 47 blessés. Le groupe djihadiste, qui sévit en Syrie, en Irak et en Libye, a menacé la Tunisie d'autres attaques, affirmant qu'il ne s'agissait que «du début». Qualifiant l'attentat contre le musée d'«attaque bénie contre l'un des foyers des infidèles en Tunisie musulmane», la voix lisant le communiqué audio a affirmé que l'opération sanglante avait été menée par «deux chevaliers du califat, Abou Zakaria al-Tounsi et Abou Anas al-Tounsi». Ils étaient «munis d'armes automatiques et de bombes»et sont «parvenus à assiéger un groupe de ressortissants des pays croisés (...) semant la terreur dans le cœur des infidèles». «(...) Ce que vous avez vu, ce n'est que le début. Vous n'allez jouir ni de sécurité ni de paix», poursuit l'enregistrement. Le chef du gouvernement, Habib Essid, a affirmé lors d'une conférence de presse qu'il a tenu jeudi à la Kasbah, que le président de la République, Béji Caïed Essebssi, a annoncé la guerre contre le terrorisme dans son sens propre du mot.Essid a ajouté qu'une enquête a été ouverte concernant l'attaque terroriste du musée du Bardo afin de déterminer les responsables et prendre les procédures nécessaires contre toutes personnes dont l'implication sera démontrée. Habib Essid a affirmé que des opérations de surveillances et de recherches intensives seront menées dans toute la république tunisienne. Marche internationale prévue à Tunis Le ministre auprès du chef du gouvernement, chargé des relations avec l'Assemblée des représentants du peuple et leader du Nidaa Tounes, Lazhar Akermi, a assuré lors de son passage à Studio Shems que la Tunisie appellera à une marche internationale contre le terrorisme en réaction à l'attaque terroriste du musée du Bardo. Akermi a ajouté que les différents chefs d'Etat seront invités à participer dans cette marche contre le terrorisme à l'image de la marche organisée par la France suite à l'attaque terroriste de Charlie Hebdo. Réactions L'ex-président de la République Mohamed Moncef Marzouki a affirmé que l'attaque terroriste du musée du Bardo n'est pas uniquement une agression contre la vie des innocents mais également une agression contre les valeurs arabes et islamiques et une agression contre l'économie tunisienne et une tentative de perturber le processus démocratique Tunisien. «Les autorités ont pris toutes les mesures pour que de telles choses n'arrivent plus.» «J'espère qu'avec les moyens dont nous disposerons nous deviendrons plus performants (...). Toutes les autorités sont averties et j'espère qu'un tel désastre n'arrivera plus», a-t-il dit après avoir rendu visite aux blessés à l'hôpital Charles-Nicolle de Tunis. Lors d'une conférence de presse tenue jeudi à Tunis, Marzouki a appelé à conjuguer les efforts des enseignants, hommes de religion, sécuritaires et militaires pour lutter contre le terrorisme. «Par cet attentat, les terroristes ont entamé la danse du coq égorgé», a-t-il indiqué sur Mosaïque FM. «Ils ont profité de l'état de liberté que vit notre pays pour diriger cette frappe violente contre nous», a-t-il poursuivi. «Mais cette petite bande de brigands, ces mercenaires ne briseront pas la volonté de notre peuple, uni pour affronter le terrorisme», a-t-il affirmé. «Ils ont choisi un but facile (des touristes) parce qu'ils sont lâches.» Il a enfin envoyé un message aux terroristes en Tunisie : «Vous allez dans une impasse. Vous allez être vaincus. Le peuple a choisi un régime et une constitution et non pas le terrorisme.» Contacté par téléphone, Moncef Chikhrouhou, dirigeant au parti Alliance démocratique (opposition), professeur d'université et ex-patron du journal Le Temps, dira : «Il y a des point négatifs et positifs de cet attentats. Pour ce qui est positif, l'attaque de mrecredi visant la culture et la démocratisation et aussi l'économie, a échoué parce que les groupes terroristes en sont réduits à des actions de désespoir. Ils ont attaqué auparavant des soldats de l'armée et ont tenté de prendre le Mont Chaâmbi mais ont échoué grâce à la vigilance commune des services tunisiens et algériens. Ils sont, aujourd'hui, réduits à chercher la propagande par des actes ideux visant la mort d'homme et de femmes tunisiens et étrangers. Leur acte est nihiliste, ce qui prouve qu'ils n'ont aucune chance de prendre pied dans nos pays d'Afrique du nord. Parmi les aspecta négatifs, il faut surtout citer le manque de résultat probants de la part de différents gouvernements (Troïka et majorité actuelle) qui n'ont pas réussi à mettre en place un programme économique et social par rapport aux aspirations légitimes du peuple tunisien.» Le tourisme touché de plein fouet Habib Essid a qualifié de «terrible» «l'impact économique» pour la Tunisie alors que le tourisme, déjà en crise, est l'un des secteurs stratégiques pour le pays. La première conséquence est l'annonce par le groupe italien Costa Croisières de l'annulation de toutes les escales de ses navires prévues à Tunis, suivie de peu par une annonce similaire de MSC Croisières. Les deux compagnies avaient des bateaux faisant escale dans le port de La Goulette, dans la banlieue de Tunis, mercredi. Plusieurs des victimes faisaient partie de leurs passagers. Mais le président tunisien a vite réagit en rassurant les touristes étrangers : «Les touristes et les amis de la Tunisie peuvent venir en toute sécurité. Ce n'est pas parce que la Tunisie a été frappée par cette attaque que la politique de la peur sera installée», a fait savoir Caïd Essebsi.