Des entreprises publiques de différents secteurs et des mutualités ayant déposé des sommes d'argent au niveau de Khalifa Bank n'ont pas pu les récupérer, ont déclaré hier des témoins auditionnés au tribunal criminel près la cour de Blida. Les témoins, entendus au 20e jour du procès Khalifa, ont convergé, cependant, à dire qu'ils n'ont pas rencontré, jusqu'à fin 2002, début 2003, de problèmes pour le retrait des valeurs de bénéfices ainsi que les actifs déposés auprès de Khalifa Bank, estimant que la période de retrait des bénéfices allait de 3 mois à 1 année. De son côté, l'avocat de Nacereddine Lezzar, au nom de la défense de Abdelmoumène Khelifa, a insisté, dans son intervention, s'il était possible ou pas pour ces entreprises de retirer l'argent déposé, avant l'arrivée en mars 2003 de l'ex-administrateur de la banque, Mohamed Djellab. Dans son témoignage de dimanche, Djellab avait déclaré que «la Banque Khalifa n'avait pas atteint le stade de cessation de paiement» quand il avait été désigné à ce poste. Il a expliqué que la caisse principale de Khalifa Bank disposait de 20 milliards de dinars à mars 2003, au moment où Mohamed Laksaci, gouverneur de la Banque d'Algérie, parlait de 5,3 milliards à fin mars 2003 et de 500 millions de DA vers avril et mai 2003. Bensaidoune Abdenour, un parmi la dizaine de témoins auditionnés durant la matinée et qui était directeur général de la Mutualité des travailleurs des industries d'électricité et de gaz, a indiqué au juge, que «la mutualité avait déposé la somme de 100 millions de dinars (50 en octobre 2001 et 50 autres en mars 2002), qui n'ont pas été remboursés». Il a ajouté que les responsables de l'organisme qu'il dirigeait «avaient pris la nouvelle du retrait de l'agrément de Khalifa Bank à travers les médias». Soulignant que la Mutualité «déposait aussi de l'argent dans les banques publiques car disposant de sommes importantes, Bensaidoune a admis qu'il ne «se posait pas de questions quant aux taux d'intérêts qu'offrait Khalifa Bank». Il a noté à ce propos que la défunte banque privée accordait des taux d'intérêts à raison de 12% au moment où ça ne dépassait pas 4,5% chez le CPA et la BEA. Fadila Berkane, ex-directrice générale de l'Entreprise nationale des systèmes d'information, a témoigné que l'entreprise avait déposé la somme de 100 millions de DA, précisant que le placement «a été effectué au temps de l'ancien DG, Ali Belkhiri». Elle a relevé cependant que la décision de dépôt «avait été prise sans la consultation du conseil d'administration», ajoutant avoir «écrit au liquidateur de la Banque pour récupérer l'argent déposé, mais sans suite». Beghoul Mohamed Saïd, ancien responsable de l'Entreprise nationale des puits (une filiale de Sonatrach), a été interrogé par le procureur général Zerg Erras, sur «les raisons qui l'ont poussé à déposer de l'argent là ou Sonatrach n'avait pas déposé». La société avait placé 150 millions de DA chez Khalifa Bank. Pour sa part, Mourad Cherabi, ancien DG de la Mutualité des travailleurs de l'électricité et du gaz à Sonelgaz a déclaré que le dépôt des fonds chez Khalifa Bank s'était opéré avec l'accord du conseil d'administration. Il a estimé le placement à 50 millions DA, déposé dans une agence sise à la rue Didouche Mourad (Alger). «L'argent n'a pas été récupéré», témoigne-t-il. L'ex- DG de l'Entreprise nationale de la navigation aérienne, Farouk Mustapha Hamed Abdelouahab, a affirmé au juge que l'entreprise «avait déposé la somme de 5 milliards de centimes dans l'agence de Chéraga au temps de l'ancien directeur Ait Si Ali Mouloud, conformément à la convention (valable une année) liant les deux parties». La convention en question a été ratifiée en 2002, a déclaré le témoin, par «l'ancien directeur de l'entreprise et Mir Amar, directeur de l'agence de Chéraga». Le témoin a indiqué avoir «essayé de reprendre l'argent mis dans la Banque privée, mais sans succès», expliquant cela par la situation «problématique» dans laquelle s'est retrouvée la Banque Khalifa. La décision de retrait d'agrément à Khalifa Bank, «irréversible» pour manque de liquidités Les membres de la commission bancaire appelés à témoigner dans le procès Khalifa se sont expliqués mardi devant le tribunal criminel de Blida sur «l'irréversibilité» du retrait de l'agrément à Khalifa Bank, indiquant que la décision a été prise pour manque de liquidités en mai 2003. Le magistrat de la Cour des comptes, délégué au sein de la commission bancaire, Namouss Amar, a déclaré devant le tribunal que «la désignation d'un administrateur visait à s'enquérir d'abord de la situation réelle et redresser la banque ensuite», mais le constat était que les fonds faisaient défaut pour payer les clients. Selon ce témoin, le gouverneur de la Banque d'Algérie avait demandé aux actionnaires le soutien financier mais l'argent était indisponible, précisant que même la Banque d'Algérie «ne pouvait pas refinancer Khalifa Bank, du fait de l'absence d'effet (garanties) à quoi s'ajoutent les nombreuses infractions à la loi sur la monnaie et le crédit relevées par les différents rapports de la commission bancaire». «Le retrait de l'agrément était irréversible», a-t-il dit. Benziada Brahim, inspecteur au ministère des Finances et membre de la commission a rappelé pour sa part que le retrait de l'agrément a été fait en présence de Guellimi Amar et Abdelaziz Ahmed Lakhdar Khelifa, actionnaires dans Khalifa Bank.