L'an dernier, le prince saoudien Turki bin Faiçal s'est offert le luxe, fait sans précédent, d'écrire un éditorial dans un grand journal israélien, appelant à la paix entre Israël et les pays du CCG et à la résolution du conflit israélo-palestinien. Comme l'administration d'Obama a poursuivi ces dernières années une politique de détente avec l'Iran, des rapports ont dévoilé une coopération secrète sur la sécurité entre Israël et les pays du CCG. Le site d'investigations Middle East Eye a dernièrement montré l'existence de vols secrets réguliers entre Abu Dhabi et Tel Aviv en dépit de la soi-disant interdiction faite aux citoyens israéliens d'entrer aux Emirats Arabes Unis. Dans son livre publié en 2012, After the Sheikhs: The Coming Collapse of the Gulf Monarchies, Chris Davidson, professeur à l'université de Durham, écrit que les pays du Golfe continueront à rechercher le soutien d'Israël à cause des pressions extérieures grandissantes qui se font sentir suite aux soulèvements régionaux. Même s'il dit que les pays du CCG sont constitués de « populations nationales pour la plupart anti-israéliennes et pro-palestiniennes hyper sensibles sur les sujets du Sionisme et d'Israël », le livre montre bien une coordination clandestine croissante sur les plans économique et politique entre les dirigeants des pays du CCG et leurs homologues israéliens au cours de ces dernières années. Il y a cependant des signes indiquant que même les sentiments populaires anti-israéliens dans ces pays sont en train de changer. Un récent sondage de l'opinion saoudienne réalisé par des étudiants du Centre Interdisciplinaire d'Herzliya, université israélienne, a montré qu'une minorité de Saoudiens considérait Israël comme une menace pour leur pays. Ils disaient plutôt que l'Iran ou l'Etat islamique naissant étaient leur principal objet d'inquiétude. Alex Mintz qui a supervisé le sondage d'opinion a déclaré: « La façon dont nous voyons les Saoudiens, ici en Israël, ne correspond pas exactement à ce qu'ils sont. Nous croyons savoir ce que pensent les gens en Iran, à Ghaza et en Arabie saoudite, mais aucune des personnes à qui j'ai parlé ne pensait que les Saoudiens diraient qu'ils avaient bien plus peur de l'Iran que d'Israël. Personne n'avait prévu ça. » Avec l'administration d'Obama qui cherche à conclure cet accord nucléaire crucial avec l'Iran le mois prochain, il semble probable que les pays du Golfe et Israël, alliés traditionnels des Américains mais unis dans leur refus de cet accord, continueront à construire leur coordination stratégique. Que d'anciens officiels de haut rang représentant à la fois les intérêts du Golfe et ceux d'Israël aient décidé de rendre publique leur coopération est le signe que cette alliance se renforce. Comme cette relation s'épanouit dans le contexte de la crise israélo-palestinienne et de la prédominance en Israël de partis politiques d'extrême droite, il semble clair que les dirigeants des pays du CCG ont décidé, suite aux printemps arabes, de placer leurs petits intérêts personnels au-dessus des principes annoncés haut et fort concernant la stabilité dans la région. (à suivre)