Amnesty International a dénoncé dans un rapport de multiples violations du droit international par la coalition menée par l'Arabie saoudite. Dans ce pays en proie depuis six mois à un conflit complexe, c'est un désastre humanitaire qui se joue à huis clos. C'est la guerre oubliée. Celle qui échappe aux radars journalistiques, braqués vers la Syrie où s'étend l'ombre de l'Etat islamique. Pourtant, depuis six mois, les bombes pleuvent sur le Yémen. «Des bombes tombent du ciel jour et nuit»: c'est même le titre du rapport publié par Amnesty International le 7 octobre, qui dénonce des crimes de guerre commis par la coalition menée par l'Arabie saoudite. Six mois de conflit Ce pays de 27 millions d'habitants, le plus pauvre du monde arabe, n'a jamais été véritablement unifié, et Nord et Sud s'écharpent depuis plus de trente ans. Au Nord, la rébellion chiite des Houthis monte en puissance depuis 2004. Un conflit avant tout politique et économique qui s'habille d'un vernis confessionnel. En mars 2015, à la demande du président du Yémen Abd Rabbu Mansour Hadi, l'Arabie saoudite déclenche l'opération «Tempête décisive» pour contrer les rebelles Houthis qui progressent dans le pays et se sont emparés en janvier du palais présidentiel à Sanaa, la capitale. L'Arabie saoudite accuse les Houtis d'être aidés en sous-main par l'Iran chiite. Ce conflit entre sunnites et chiites, entre Nord et Sud, est complexifié par la présence d'acteurs terroristes: fief d'al-Qaïda depuis toujours, le Yémen a vu naître sur son sol une branche de l'Etat islamique, qui a revendiqué un attentat faisant plus de 30 morts à Sanaa le 17 juin dernier. C'est bien le problème lorsqu'on parle du Yémen: il faut une longue introduction pour expliquer même sommairement un conflit dont la complexité ferait passer l'enfer syrien pour un jeu de quilles. 2 000 civils tués, des armes interdites utilisées En tout, le conflit a fait près de 5000 morts dont 2000 civils parmi lesquels 400 enfants. Il y a également 1.5 millions de déplacés à l'intérieur du pays. Ce sont les bombes de la coalition qui tuent le plus de civils. Dans son rapport, Amnesty dénonce «le mépris flagrant pour la vie des civils dont fait preuve la coalition militaire conduite par l'Arabie saoudite». La coalition «Restaurer l'espoir» en œuvre depuis avril 2015 est composée également du Bahrein, du Qatar, des Emirats arabes unis et reçoit l'appui des Etats-Unis. Amnesty, qui a analysé plus précisemment 13 frappes de la coalition ayant eu lieu entre mai et juillet 2015, met en évidence plusieurs violations du droit international: désignation de villes à large densité de population comme cibles militaires, attaques disproportionnées et indiscriminées, usage d'armes bannies par la communauté internationale. «Les raids aériens sont fréquents, et utilisent des armes interdites par la communauté internationale» comme les bombes à sous-munitions qui permettent de couvrir d'explosifs l'équivalent d'un terrain de football. Certaines de ces armes auraient été fournies par les Etats-Unis, indique Amnesty. Amnesty demande l'établissement d'une enquête internationale indépendante pour faire la lumière des violations par les parties du conflit. La résolution déposée par l'Arabie saoudite adoptée par l'ONU à Genève au début du mois d'octobre ne mentionne pas exactions de la coalition. L'ONG demande également la suspension des transferts d'armes à la coalition.