Dans la foulée des droits TV de la Premier League vendus en février pour près de 7 milliards d'euros pour 2016-2019, Angleterre rime avec démesure : cet été plus d'un milliard d'euros a été englouti au mercato et la concurrence étrangère peut craindre 2016. La première secousse a eu lieu le 10 février, lors de l'annonce du résultat de la renégociation avec Sky et BT qui avaient fait exploser de 70% le prix du match, désormais valorisé à 13,71 millions d'euros. La deuxième est survenue quand les premiers bénéfices depuis quinze ans (257,4 millions d'euros) ont été annoncés en juin après une décennie à 3,7 milliards d'euros de pertes accumulées. Le football anglais, même si cela n'est pas encore notable au niveau sportif, évolue désormais seul dans le championnat économique européen... alors qu'il n'a même pas encore commencé à toucher la nouvelle manne promise. Avec de telles recettes, les clubs anglais peuvent même espérer améliorer leur propre situation financière tout en continuant de dépenser à tort et à travers. En 2013/2014, la Premier League avait ainsi vertueusement réduit de 100 millions d'euros sa masse salariale tout en augmentant de 300 millions un chiffre d'affaires global. Celui-ci, d'un montant de 3,9 milliards d'euros, comptait même pour 35% du chiffre d'affaires des cinq grands championnats européens. Les agents se frottent les mains «L'impact de l'accord sur les droits de diffusion en Premier League se voit déjà clairement, analyse le cabinet Deloitte Dan Jones. Les droits TV comptent pour 78% de la croissance globale des revenus», indique-t-il. Sur un mercato boosté par quelques gros coups comme Anthony Martial, acheté par Manchester United 80 millions d'euros (en incluant de futurs bonus éventuels) ou Kevin de Bruyne recruté par Manchester City pour 75 millions d'euros, la mainmise de la Premier League est même encore plus notable. Selon Deloitte, la première division anglaise avait déboursé ainsi 1,234 milliard d'euros cet été pour renforcer ses effectifs. Et même 1,410 milliard si l'on ajoute le marché hivernal. Soit 42% des dépenses totales du Big 5 continental... En bout de chaîne, le public est également affecté. Pour la première fois dans l'histoire du championnat, la BBC a annoncé que le premier prix médian d'une place était désormais supérieur à 30 livres. Et même 131 livres à Arsenal les jours de match... Outre les joueurs, les agents se frottent également les mains : ils ont vu en un an leurs émoluments passer de 163,4 à 184,2 millions d'euros. En deux saisons, Liverpool leur a même versé 42,5 millions. Alors qu'aucun de leurs joueurs n'émargent dans le Top 5 des mieux payés et que Falcao, Rooney ou Agüero arrivent loin derrière Ronaldo, Messi ou Ibrahimovic, les clubs semblent maintenant prêts à passer à l'offensive pour ramener chez eux les meilleurs qui y étaient encore il y a peu. Tsunami en vue L'argent appelant l'argent, les grosses écuries ont également toutes assaini, au moins un peu, leurs passifs, bien aidés en cela par de juteux partenariats avec des équipementiers rassurés par la tournure prochaine des événements. Adidas verse ainsi 79 millions d'euros aux Red Devils depuis cette année et pendant dix ans. Chelsea, qui était redevenu bénéficiaire en 2014, va obtenir 59 millions annuels de la marque Yokohama. Enfin, les Citizens, après des années dans le rouge, viennent d'offrir au Cheick Mansour son premier bilan positif depuis 2008. Pourtant, 2015 n'a peut-être pas encore livré toutes ses surprises puisque la Premier League s'occupe maintenant de vendre ses droits à l'étranger, affaiblissant ainsi encore plus ses rivaux. A l'image d'Altice qui pourrait avoir payé plus de 300 millions d'euros pour détrôner Canal+ en France, la Premier League tablerait sur un nouveau petit gâteau de 1,32 milliard d'euros. «Le nouveau contrat anglais permet d'être encore plus dominant, je sais déjà ce qu'il va se passer l'été prochain, prévenait dès septembre Karl Heinz Rummenigge, le puissant président du Bayern. Le tsunami sera encore plus violent. On n'a vu que le sommet de l'iceberg», a-t-il prédit.