Au-delà des réserves, objectives ou zélées, émises sur l'article 3 bis introduit dans l'avant-projet de révision de la Constitution, consacrant le caractère officiel de la langue amazighe, il y a lieu de reconnaître dans cet amendement une avancée jamais rêvée depuis l'indépendance. Cet article stipule que «tamazight est également langue nationale et officielle. L'Etat œuvre à sa promotion et à son développement dans toutes ses variétés linguistiques en usage sur le territoire national». Une formulation qui est contestée par des esprits chagrins qui y voient une contradiction avec la nouvelle mouture de l'article 3 qui présente la langue arabe comme «langue officielle de l'Etat». Or, ce qui est aussi prévu dans le même article (3bis), c'est que la proposition prévoit la création d'une académie algérienne de la langue amazighe, placée auprès du président de la République : «L'académie qui s'appuie sur les travaux des experts est chargée de réunir les conditions de promotion de tamazight en vue de concrétiser, à terme, son statut de langue officielle», ce qui signifie clairement qu'à terme, tamazight recouvrira pleinement son officialité. Il appartient aux différents acteurs et intervenants scientifiques, associatifs et autres de prouver, par le travail, leur volonté de porter cette langue ancestrale des Algériens à un niveau digne d'une langue officielle de l'Etat et de la nation. Parce que ceux-là même savent que, en l'état actuel, tamazight n'est pas encore en mesure de relever tous les défis. Il lui reste d'être codifiée, selon une transcription unifiée et définitive, avant d'être généralisée et initiée aux Algériens non berbérophones, plus nombreux que ceux qui pratiquent cette langue. Aussi, faut-il un temps pour former un encadrement, en nombre et en qualité, pour parvenir à satisfaire toutes les demandes, immenses en la matière. Donc, pour éviter une «amazighisation» au rabais, à l'image de ce qu'a été le cas l'arabisation durant les premières décennies de l'Indépendance, il ne faut surtout pas se précipiter en se lançant dans une aventure sans issue. Car avant d'être militante ou dogmatique, tamazight est d'abord une revendication citoyenne.