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Le Nouvel An amazigh au cœur de la tradition
Publié dans La Nouvelle République le 11 - 01 - 2016

Le 12 janvier est célébré dans tout le Maghreb, Yennayer, le nouvel an berbère correspondant à l'an 2966 du calendrier agraire.
Yennayer, également appelé « Thabburt u segwas » (la porte du nouvel an) est, avant tout, une valeur symbole, ancrée dans la mémoire collective et revisitée par des mythes et légendes populaires. Aux origines de cette célébration, une légende. Celle de cette vieille femme qui, sortant un jour de soleil et, pensant que l'hiver est passé, s'était moquée de lui. L'hiver, furieux, demanda à Fourar -premier mois du printemps- de lui prêter deux jours pour se venger. Il envoya un violent orage qui, selon certaines versions, a vu la vieille femme emportée par les flots, et selon d'autres, l'a transformée en statue de pierre. La légende se déroulait durant la période séparant les deux cycles solaires, les solstices et équinoxes et c'est ainsi que Yennayer s'est prolongé jusqu'au 11 février alors qu'il devait s'arrêter le 9 février. La part d'histoire... Le démarrage du calendrier amazigh commence à partir de l'an 950 avant J.-C), date à laquelle l'empire des Pharaons est menacé par un roi d'Ethiopie. Le Ramsès fait appel à son allié berbère Chechnaq pour l'aider à combattre l'armée éthiopienne. En tête d'un fort contingent, Chechnaq quitte Tlemcen et vient livrer bataille dans la vallée du Delta, sauvant ainsi l'empire des Pharaons. C'est à partir de cette victoire que commence la datation annuelle berbère. Yennayer qui veut dire le 1er du mois ou le commencement du mois ne se résume pas seulement à la célébration d'une date, c'est également une prière à la fertilité, à la profusion et à la prospérité. Autour de la célébration de Yennayer Si la célébration de Yennayer diffère relativement d'une région à une autre, il reste que dans la plupart des foyers, on entreprend de rafraîchir la peinture de la maison, on change ce qui est usé et vieux, notamment les supports de l'âtre (inyen)... Des gênets, uzzu, sont déposés sur le toit de la maison, pour empêcher la malédiction d'entrer. Le 9 janvier est une journée consacrée aux enfants qui, pour l'occasion, mettent de nouveaux vêtements. Le 10 janvier, place aux adolescents et le lendemain aux adultes. Ainsi, dans le Djurdjura, à Béchar, dans les Aurès, l'Ahaggar ainsi qu'au Maroc, des plats succulents sont préparés, notamment le couscous au poulet. Pour préparer la sauce, on utilise des légumes secs et on évite les aliments épicés ou amers qui augurent d'un mauvais présage pour le reste de l'année. A cela s'ajoute du kasbasu, uftiyen (soupe préparée à partir de pois-chiches, de fèves et de pois cassés), de la talabagat (viande hachée), accompagnée d'un aghaghe (jus), de tagalla (pain), tighriffin (crêpes), de gâteaux et divers autres beignets. Le repas de Yennayer doit être dégusté sans modération, y compris par les enfants. Quant aux récalcitrants, qui ne veulent pas terminer leur assiette, on les menace d'appeler tseriel ou aâdjouzet Yenneyer. Yennayer d'une région à l'autre Dans certaines régions, le premier jour, Amenzu n'Yennayer, on ne mange que des produits végétaux : la viande est laissée pour le lendemain. On mange des fruits secs : figues, raisins, noix, dattes... que l'on appelle « treize ». Cette célébration est également l'occasion d'offrir de beaux habits neufs et d'autres cadeaux aux jeunes filles, comme cela se fait dans l'Ahaggar. On procède également, à cette occasion, à la première coupe de cheveux des petits garçons, comme on taille les arbres à la même période, car cela symbolise la longévité. Chez les Beni Snous de Maghnia, la fête dure trois jours. Le premier jour s'appelle «Nefkat el ham», le deuxième «Nefkat el Karmouss» et le troisième jour « Ras el aâm ». Le premier jour, femmes et enfants vont cueillir sept plantes vertes, à savoir le romarin (amezir), des asphodèles (aberwaq), de la férule (oufal), du fenouil (abesbas) et du lentisque (amedagh). Ces plantes, porte-bonheur, sont ensuite séchées sur les terrasses des maisons. Les enfants rapportent aussi de la montagne du diss (adless) en touffes, de l'argile rouge et des pierres assez grosses pour supporter la marmite. L'ancien âtre est alors détruit et on en reconstruit un nouveau où sera cuit « imensi n'Yennayer » (le dîner du réveillon). Les hommes se réunissent tôt le matin du premier jour sur la place du village pour organiser une battue de laquelle ils rapporteront lièvres et perdrix qui seront ensuite partagés équitablement sur les habitants de la communauté. Au dîner du second jour, on prépare uniquement des plombs (berkoukès). Après le repas, quelques grains sont déposés sur les pierres de l'âtre, à côtés des poutres qui soutiennent le toit. On ne lave pas les plats ayant servi à la préparation et à la consommation du dîner de Yennayer. A cette occasion, on prépare aussi des crêpes (baghrir...) et des beignets, on confectionne en offrande des colliers de figues et de raisins secs, des pains farcis d'œufs, ainsi que des corbeilles de grenades, de noix et de noisettes. Le dernier jour, les enfants jouent au lion. Deux hommes placés l'un devant l'autre, la face tournée vers le sol se saisissent. Les jeunes les recouvrent d'un drap qu'ils attachent avec des tresses de halfa. Les enfants emmènent la bête dans les maisons pour effrayer les petits. Aux habitants de donne au lion son dîner. On leur offre alors des figues et des beignets. Le lion danse au son du tambourin le long du chemin, puis le joyeux cortège s'en va pique-niquer et déguster son « butin ».

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