Le représentant spécial du secrétaire général de l'ONU et chef de la Mission d'appui des Nations unies en Libye (Manul), Martin Kobler, a proposé lundi une stratégie en six points pour sortir la Libye de sa crise politique et sécuritaire. En présentant son rapport sur la Manul au Conseil de sécurité, M. Kobler a précisé que cette stratégie doit inclure, entre autres, la création d'une architecture sécuritaire intérimaire inclusive face à Daech et l'approbation du gouvernement d'entente nationale par la Chambre libyenne des représentants. «En ce moment critique de la transition, les faits doivent être reconnus pour ce qu'ils sont : aujourd'hui, la Libye n'a toujours pas de gouvernement approuvé officiellement», a relevé M. Kobler. Il a expliqué que la mise en œuvre de l'Accord a été retardée car certaines parties n'ont pas honoré leurs engagements. La Chambre des représentants doit encore approuver le gouvernement d'entente nationale, a-t-il exigé. L'Accord politique libyen doit demeurer le seul cadre légitime de la transition jusqu'à l'adoption d'une nouvelle Constitution, a précisé M. Kobler. «Après deux tentatives infructueuses en février et en avril, il est grand temps que le président de la Chambre assume ses responsabilités et convoque une session parlementaire, dans un climat débarrassé des menaces et des intimidations, pour voter sur le gouvernement d'entente nationale proposé», a commenté le chef de la Manul. La détérioration rapide de la situation humanitaire et l'escalade des tensions militaires liées à la lutte contre Daech exigent «audace, détermination et mesures décisives», a dit M. Kobler. Le nombre de personnes déplacées en Libye a atteint 435 000 personnes, tandis que 6 000 familles ont dû fuir la ville de Syrte en raison des opérations contre Daech. Il est vital que le Conseil de la présidence travaille avec son effectif complet de neuf membres. «J'encourage les membres qui n'assistent pas aux réunions à le faire», a dit M. Kobler. Au titre de son quatrième point, il a exhorté le Conseil de la présidence à agir rapidement pour répondre aux besoins des Libyens, ajoutant que les Nations unies sont prêtes à lui apporter leur concours. A ce propos, il a affirmé que le Conseil de la présidence, en sa qualité de commandant suprême de l'Armée libyenne unie, doit être le seul récipiendaire légitime de l'aide internationale dans le domaine de la sécurité. Enfin, il faut une «architecture sécuritaire intérimaire inclusive» pour éviter les hostilités entre les différents acteurs libyens impliqués dans la lutte contre Daech, a proposé M. Kobler. Le chef de la Manul, qui a insisté sur les progrès considérables de la lutte contre Daech ces dernières semaines, a en effet mis en garde contre les risques d'affrontements directs entre les différentes forces en raison d'un manque de coordination. «La possibilité d'une nouvelle escalade militaire doit inquiéter tout le monde», a-t-il prévenu. M. Kobler a jugé «cruciale» la décision du Conseil de la présidence d'établir un centre d'opérations conjoint contre Daech. Il a aussi estimé «essentiel» que la Manul rétablisse sa présence en Libye afin de répondre aux besoins les plus pressants des Libyens. Un point de vue partagé par le représentant de la Libye, Ibrahim Dabbashi, qui a espéré que la Mission reviendra le plus tôt possible à Tripoli pour faire progresser la mise en œuvre de l'accord et l'installation des institutions de l'Etat. Il a jugé aussi «très positive» l'unanimité internationale en faveur du soutien au nouveau gouvernement d'entente nationale. Toutefois, a-t-il ajouté, c'est encore «insuffisant» car le succès passe par la pleine mise en œuvre de l'accord, avec notamment la mise en place d'une force capable d'assurer l'ordre et la sécurité dans la capitale. Ibrahim Dabbashi a critiqué les rapports du secrétariat général de l'ONU sur la Libye, estimant qu'ils «manquent de professionnalisme». Il a ainsi demandé que l'on s'abstienne de «termes irréalistes» , affirmant que cela ne peut que compliquer la situation politique en Libye. A ce titre, il a jugé prématuré de parler à ce stade de monopole intégral de l'Etat sur l'usage de la force, comme le mentionne le rapport du secrétaire général. Pour le représentant, la MAanul est la première concernée par l'application «honnête» de l'accord politique. Il a fait observer qu'il n'y avait à ce stade aucun plan concernant les mesures à prendre après la libération de Syrte, annoncée pour la prochaine quinzaine. «Nous ne voulons pas voir la ville tomber entre les mains d'Al-Qaida après l'avoir libérée de celles de Daech», a-t-il déclaré. Au cours de cette réunion, le président du Comité de l'application de l'embargo sur les armes et du gel des avoirs, Ramlan Bin Ibrahim, a présenté le rapport couvrant la période allant du 3 mars au 6 juin, expliquant qu'à la demande de la Libye, le Comité avait, le 27 avril, ajouté sur sa liste un navire qui transportait des exportations illicites de brut.