Le lancement de la campagne céréalière et celle de la tomate industrielle appelé à intervenir au début du mois de juillet en Algérie a inspiré de nombreux agriculteurs et propriétaires terriens de toutes les régions du pays à interpeller les pouvoirs publics pour une meilleure approche dans la gestion de ce secteur stratégique. Cette initiative vise à garantir le lancement des travaux de matérialisation des projets liés au développement agricole. Particulièrement ceux ayant pour finalité l'adaptation de nos agricultures aux changements climatiques, l'augmentation de la productivité agricole et ceux destinés à l'analyse des sols. Profitant du changement intervenu ces dernières 48heures dans la composition du nouveau gouvernement, les agriculteurs interpellent le nouveau ministre de l'Agriculture et de la Pêche Abdesselam Chelghoum quant à étudier de nouvelles orientations dans la gestion de son secteur. C'est pourquoi, ils ont appelé à la multiplication des contacts avec les acteurs directs du secteur et à l'élargissement de la coopération avec toutes les structures. L'argument avancé est le triple défi, portant sur la garantie de la sécurité alimentaire, le développement de la production agricole et la protection de l'environnement. PDG d'une des plus importantes entreprises privées de transformation de tomate fraîche et d'un laboratoire national, Abdelhamid Boudiaf a estimé nécessaire d'opérer des changements approfondis dans l'approche des cultures agricoles pour mieux appréhender le dossier du développement durable. «La subvention de 5,50 DA/kg de tomate fraîche accordée par les pouvoirs publics est un leurre. Elle n'est d'aucune utilité et se répercute négativement sur le pouvoir d'achat du consommateur. Il y a lieu de la supprimer et procéder à une baisse de la TVA de 17 à 6%. J'ai la certitude que cela fera disparaître la fraude fiscale et permettra la relance de la facturation. La mécanisation de l'activité agricole est un autre leurre. Elle ne peut être rentable que si les parcelles cultivées dépassent les 100 hectares. Or, chez nous, rares sont celles qui atteignent les 5 hectares», a précisé Abdelhamid Boudiaf. Son franc-parler lui avait valu d'être victime d'une cabale. Elle lui avait coûté plusieurs mois de privation de liberté avant qu'il ne soit totalement blanchi par la justice, 13 années après. Interrogé sur l'excédent de récolte de tomate fraîche annoncé, le patron de la société «El Bousten» a indiqué : «Cette année, l'amélioration des rendements de tomate fraîche à l'hectare sous-entend, une production excédentaire du concentré de tomate. Mais faudrait-il d'abord supprimer le goulot d'étranglement que créent les banques pour l'octroi des crédits de campagne». Il reste néanmoins que le refus d'octroi de ce crédit de campagne n'est pas le seul obstacle auquel est confronté le secteur agricole toutes filières confondues y compris l'élevage. L'inexistence de main-d'œuvre locale générée par le refus de nos jeunes d'assumer diverses fonctions agricoles et d'élevage, en représente un autre. Selon le ministère de l'Agriculture, annuellement 800 000 postes de travail à travers le pays ne trouvent pas preneurs. «Nous risquons de voir des milliers d'hectares de tomate fraîche voués à l'abandon. C'est pourquoi, nombre de producteurs agricoles appellent à l'embauche d'ouvriers migrants subsahariens et autres. Cela se fait partout à travers le monde, même aux Etats-Unis et en Europe, pourquoi pas chez-nous», s'interroge Abdelhamid Boudiaf. Il faut dire que même si elle a marqué le pas ces deux dernières années, l'agriculture algérienne est en plein essor. Il s'agit des résultats générés par l'application de différents dispositifs d'aide de l'Etat. Les facteurs qui ont impacté positivement dans la hausse de la production agricole sont la multiplication des barrages, l'irrigation au goutte-à-goutte, la promotion de l'agriculture traditionnelle et l'augmentation du volume des investissements pour améliorer la productivité agricole. Abordant l'impact des changements climatiques dans la production agricole nationale, notre interlocuteur a cité le Canada et la Russie. Selon lui, dans ces deux pays, l'agriculture nourrit son monde alors que la terre est travaillée moins de 4 mois/an pour cause d'intempéries. La Californie est un autre exemple où l'agriculture sous serre est à l'origine d'importantes recettes induites par les exportations des agrumes. «Tout autant que la Californie, le Grand Sud algérien a des eaux albiennes qui peuvent servir au développement d'une agriculture sous serre. Pourquoi ne pas étudier des opportunités d'investissement à ce niveau», a proposé le grand patron de la conserverie «El Bousten». Il entend faire partie des pionniers engagés pour la création d'une agriculture innovante, durable et responsable. Son ambition est aussi de se renforcer sur le marché local en offrant des produits bio tout en développant son activité export. Dans sa ligne de mire, il est visé la conquête des marchés européens et une plus forte présence en Afrique. Il n'est pas le seul à être convaincu du développement accru de nombreuses filières agricoles telles que celles des agrumes, maraîchage, arboriculture fruitière, l'élevage, la transformation laitière, les plantes aromatiques, les cultures annuelles, l'apiculture et l'aquaculture.