Les participants à une journée d'étude sur le défunt dramaturge Abdelkader Alloula, clôturée samedi dans la ville des Issers (Boumerdès), se sont accordés sur le fait que «le théâtre chez Alloula n'était pas qu'un simple spectacle, et une profession, mais allait bien au-delà en représentant une vision du monde et une prise de position réelle». «Alloua était une véritable institution d'idées sur la société, un militant engagé et un réformateur social», ont souligné les intervenants à cette rencontre, qui a vu la participation de nombreux écrivains et critiques du 4ème art. Dans sa communication intitulée «Abdelkader Alloula : l'homme, le parcours, le projet», le chercheur universitaire et dramaturge marocain Berached Abdelkrim a estimé que l'expérience d'Alloula dans le théâtre traditionnel dit «Al Halka», inspiré de son legs culturel, vise l'ancrage de «nouvelles valeurs, dans un pays nouvellement indépendant et vivant une étape transitoire». Il a par ailleurs souligné que «Alloula était très conscient de l'importance de la mission du théâtre». «C'est pourquoi il s'est attelé à fonder le théâtre de la Halka», a-t-il poursuivi, en partant du «principe que chaque époque, chaque lieu et chaque humain ont leur théâtre qui diffère des autres», expliquant par là l'«action d'Alloula contre tous les stéréotypes théâtraux étrangers». A leur tour, l'universitaire Abdelkrim Bengherbi de Mostaganem, et le journaliste algérien Hmida Ayachi ont soutenu que le défunt «Alloula était convaincu de la mission du théâtre, en tant que service publique destiné à consacrer une autre forme sociale, sur la base de nouvelles idées et principes». Pour l'universitaire Abdelkrim Bengherbi «Alloula a pu surtout se libérer des jeux stéréotypés, dont particulièrement le modèle italien très répandu en Europe et dans le tiers monde», et ce en adoptant un «théâtre du vécu», qui a consacré le théâtre de la Halka. «Un théâtre(Halka), qui va vers les gens et en fait un partenaire, dans un sorte de bain de foule personnifié par le «Hakaouati», dans une scène sans décor ni fioriture», a-t-il affirmé. La manifestation ouverte, vendredi, à la salle des expositions de la ville des Issers (ex-salle Afrique), a été inaugurée par la présentation de nombreuses pièces théâtrales. La journée de samedi a englobé l'animation de communications par l'universitaire Abdelkrim Bengherbi de Mostaganem, et le chercheur universitaire et dramaturge marocain Berached Abdelkrim, outre la projection de documentaires sur le défunt Alloula et son oeuvre, réalisés par l'homme de théâtre Ali Aissaoui, en plus d'un film vidéo sur la pièce «El-Aaleg» (Les Sangsues), écrite et mise en scène par Alloula lui même. La manifestation a été organisée par la coopérative théâtrale Cirta, en collaboration avec la direction de la culture, l'Office national de culture et d'information et l'Office national des droits d'auteur et des droits voisins. Natif de Ghazaouet où il a vu le jour le 8 juillet 1939, Abdelkader Alloula a grandi et vécu à Oran. Ses débuts dans le 4e art remontent à 1956, lorsqu'il intègre la troupe Echabab après la fin de ses études secondaires à Oran. En 1963, il rejoint le Théâtre National Algérien (TNA) et prend part à divers spectacles. Entre 1964 et 1968, il met en scène plusieurs textes d'auteurs contemporains dont Tewfik El Hakim ou Gorki. En 1965, il participe à la création de l'Institut national d'art dramatique et chorégraphique (INADC) de Bordj El Kiffan, puis, entre 1972 et 1975, il dirige le Théâtre Régional d'Oran (TRO) qui porte aujourd'hui son nom, où il défend un théâtre amateur et des créations collectives. En 1990, il adapte, pour la télévision, de nombreuses nouvelles dont «Lila Maâ Majnoun», «Es Soltane Oual Guerbane», «El Wissam», «Echaâb Fak», «El Wajeb el Watani» (réalisateur Bachir Bérichi), et est également l'auteur de deux scénarios réalisés par Mohamed Ifticène, Gorinne en 1972 et Djalti en 1980. Abdelkader Alloula est assassiné le 10 mars 1994 à Oran, à la sortie de son domicile, rue de Mostaganem.