Une grève générale largement suivie a paralysé jeudi la ville de Jerada au nord-est du Maroc, au lendemain d'un sit-in de mineurs qui a dégénéré en affrontements entre manifestants et forces de l'ordre qui ont fait usage de force, ont rapporté des médias marocains, déplorant des dizaines de cas de blessés et d'arrestations, alors qu'une personne a été sauvagement écrasée par un véhicule des forces de répression. A l'appel des militants du Hirak de Jerada, nom donné localement au mouvement de contestation, comme dans le Rif (nord), une grève générale a été observée dans l'ancienne ville minière en réponse à l'intervention «brutale», la veille, des forces de répression pour disperser un sit-in tenu par des mineurs. Mercredi, plusieurs dizaines d'ouvriers ont décidé d'observer un sit-in dans les puits de charbon, bravant la décision injuste d'interdire toute manifestation non-autorisée au préalable. Quelques heures après la publication, mardi 13 mars, d'un communiqué du ministère de l'Intérieur marocain prévenant qu'il est «habilité à interdire des manifestations illégales» à Jerada, des dizaines de mineurs ont entamé, à partir de 7 heures du matin, un sit-in ouvert dans les puits de charbon, situés non loin du quartier F5 (Village Youssef) dans la périphérie de la ville. Suite à cela, les autorités ont dépêché sur place des armadas de policiers et de supplétifs pour réprimer la manifestation. Le dispositif répressif a été renforcé par la présence d'hélicoptères sillonnant les lieux des affrontements, selon des acteurs du Hirak. La manifestation a vite tourné en scène de répression après l'intervention des services de l'ordre qui ont fait usage de bombes lacrymogènes. Des vidéos largement diffusées par les réseaux sociaux montrent des face-à-face tendus, et une image de choc d'un manifestant écrasé par un véhicule sécuritaire. La tension est montée d'un cran le weekend dernier après quatre arrestations parmi les militants du Hirak. Une grève générale a notamment été annoncée pour ce mercredi, ainsi qu'une marche et plusieurs grandes manifestations pour demander leur libération. Les autorités, qui avaient jusqu'ici opté pour un "dialogue ouvert" afin d'apaiser la situation, ont lancé mardi 13 mars un avertissement aux manifestants, se disant prêtes à apporter des «réponses fermes face aux agissements et comportements irresponsables». Dimanche dernier, ils étaient des milliers à manifester. Plusieurs militants, accompagnés de femmes et d'enfants, ont marché des dizaines de kilomètres en direction d'Oujda. D'autres ont même décidé d'organiser des rassemblements à Rabat, affirme Mohammed Kerzazi, membre de l'Association marocaine des droits de l'homme (AMDH). Mardi matin, la police a formé un cordon pour contenir les manifestants qui se dirigeaient vers la place centrale de la ville où se sont déroulés les principaux rassemblements depuis l'éclatement de la protestation. Selon des sources locales, les militants auraient été arrêtés alors qu'ils participaient à un débat sur l'avenir du Hirak et les propositions faites par le chef du gouvernement lors de sa visite à Oujda en février. Le Maroc a connu ces derniers mois deux autres mouvements de contestation sociale, dans le Rif (nord) après la mort tragique d'un marchand de poissons en octobre 2016 et dans le sud désertique après des coupures d'eau liées à la surexploitation agricole. Une répression s'était brutalement abattue sur la région où la police a arrêté plus de 450 personnes.