«Madeleine», «Rosa», «les Flamands», «Mathilde», «la Quête» : il y a quarante ans, le 9 octobre 1978, à Bobigny au nord de Paris, s'éteignait Jacques Brel au terme d'un cancer qu'il traînait depuis quatre ans. Sa mort ne l'aura pas fait sombrer dans l'oubli, bien au contraire. Il reste l'un des compositeurs-interprètes majeurs de la francophonie et certains de ses textes sont même régulièrement étudiés à l'école en France. Mais c'est évidemment en Belgique qu'il laisse l'empreinte la plus vive. Lors de l'élection du Belge le plus célèbre du XXe siècle, les francophones ont élu Jacques Brel et encore aujourd'hui son souvenir est vivace. Jacques Brel sera ce soir en concert au casino dans la très cossue station balnéaire de Knokke-le-Zoute, mais contrairement à ce qu'il redoutait il n'est jamais devenu chanteur pour femmes finissantes, pas plus d'ailleurs qu'il n'a fini gouverneur de tripot à Macao. Ce qui se donne ce soir est en fait un récital de 1963, quinze ans avant sa mort, ainsi que le concert du 6 octobre 1966 à l'Olympia de Paris, le concert de ses adieux trois ans plus tard. Ces deux captations, qui ont été restaurées pour le cinéma, seront d'ailleurs projetées dans 170 salles, en Belgique, en France et en Suisse ce mardi soir à l'occasion du quarantième anniversaire de la mort de Jacques Brel. La maladie ne l'avait pas écarté de la scène Ce n'est pas la maladie qui avait écarté le chanteur de la scène. Jacques Brel était connu pour ses formules lapidaires et il est resté connu pour certaines, dont celle-ci : «Quand il n'y a plus rien à dire, il faut se taire». Ce champion de l'autodérision né en 1929 dans la commune bruxelloise de Schaerbeek n'est pas pour autant resté muet après 1966 puisqu'il s'est concentré sur sa carrière au cinéma avec Mon oncle Benjamin, l'Emmerdeur et l'Aventure c'est l'aventure. Il y a eu aussi Franz et le Far West, les deux films qu'il a réalisés lui-même, mais qui n'ont pas rencontré un grand succès… Mais même s'il a abandonné la scène, il chante toujours et certains albums de cette période tardive contiennent des morceaux d'anthologie comme par exemple «Vesoul», jamais chanté sur scène… Jacques Brel continue à faire parler de lui Jacques Brel est éternel, jusqu'en Nouvelle-Zélande même, même si c'est surtout d'Askoy II dont il a été question. Askoy II c'est le bateau sur lequel Jacques Brel embarque pour un tour du monde en 1973. Mais après le cancer diagnostiqué dans l'année qui a suivi, c'est dans les îles Marquises, en Polynésie, qu'il élit domicile. Ce bateau lui survivra quelques années, mais s'échoue en 1994 sur une plage néo-zélandaise. Quinze ans plus tard, des passionnés anversois l'ont dégagé de sa gangue de sable et rapatrié vers la Belgique avec l'intention, dès l'an prochain, de lui faire reprendre la mer. Bel hommage maritime au Brel navigateur...