Le wali de Tizi Ouzou, Abdelhakim Chater, a estimé, samedi, que la pensée, dense et féconde, de l'islamologue, philosophe et historien de réputation internationale, Mohamed Arkoun, (1928/ 2010) doit être développée, diffusée et mise à la disposition d'un large public. «La pensée du Pr Mohamed Arkoun mérite d'être vulgarisée», a indiqué le wali S'exprimant à l'ouverture des travaux d'un colloque international sous le thème «Mohamed Arkoun : une pensée universelle en quête d'un Islam des lumières», organisé par l'Assemblée populaire de wilaya (APW) en collaboration avec l'association Le Défi, M. Chater a mis en avant les travaux de recherches, nombreux, de cet islamologue qui constituent, a-t-il dit, des références obligées pour tous les chercheurs sur l'islam et la publication de nombreux ouvrages foisonnants qui font autorité. «L'œuvre éditoriale du professeur Mohamed Arkoun est remarquable pour la réflexion profonde qu'il engageait et l'expression vivante et libre qu'il employait», a-t-il observé. Pour le Pr Arkoun, a poursuivi M. Chater, la revivification et la modernisation de la pensée musulmane et de la pensée arabe passent nécessairement par les sciences de l'homme et de la société très pratiquées en Occident. «Le Pr Arkoun s'est attaché à montrer que l'humanisme n'est pas l'apanage de la seule Europe. Il s'est fait l'investigateur du passé sur lequel il a porté une réflexion philosophique, guidé par son adhésion aux valeurs culturelles et spirituelles de sa religion ancestrale reçue de sa mère et de son oncle et le désir de tirer avantage des mouvements de la pensée contemporaine de l'Occident.» Lui succédant, le président de l'Assemblée populaire de wilaya (APW) de Tizi Ouzou, Youcef Aouchiche, a indiqué que Mohamed Arkoun a été l'un des premiers à procéder et à encourager une lecture scientifique de tous les aspect de l'Islam. «Homme de paix et humaniste convaincu, Mohamed Arkoun prônait un dialogue permanent et dépassionné entre les religions et les cultures et entre les humains, au-delà de leurs croyances et convictions idéologiques», a-t-il poursuivi. Pour le P/APC, ce colloque qui se tient en présence de la fille, du frère de Mohamed Arkoun et d'éminents chercheurs, dont l'islamologue Ghaleb Bencheikh, le président de la Fondation de Islam de France, a pour objectif de maintenir, éveillés, la réflexion et le raisonnement critique des universitaires, théologiens, intellectuels mais aussi des citoyens quant à la nécessité de défendre les fondements de l'islam. Qui (islam, ndlr) est, par essence, une religion qui prône la modération et le juste milieu, en évitant toute surenchère idéologique qui ouvre la voie à tous les excès. De son côté, le recteur de l'Université Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou, Ahmed Tessa, a mis en avant la vision, rénovée, de Mohamed Arkoun sur l'Islam, débarrassée, a-t-il dit, du dogme et des lectures étriquées du contexte coranique. «Mohamed Arkoun s'est, à travers sa relecture éclairée du sacré, attelé à un chantier gigantesque qui est resté longtemps embrigadé par les gardiens du temple moral et religieux», a observé M. Tessa. La transversalité de son approche a permis, a-t-il observé, d'entrouvrir les voies du renouveau d'une religion, trop exposée à la manipulation et à l'instrumentalisation politique et culturelle. «La rationalité scientifique comme postulat de la lecture du texte sacré est le fondement du renouveau tant recherché et, la re-contextualisation de cette lecture est aussi une exigence qui mettrait la religion musulmane à l'abri des surenchères», a-t-il considéré. Mohamed Arkoun qui a été, longtemps marginalisé et, parfois, volontairement isolé a vécu, poursuivi le recteur de l'UMMTO, incompris par les siens, tant, a-t-il poursuivi, ses vérités ne plaisent pas aux prêcheurs de la haine, aux semeurs de l'ignorance. «Reconnaître l'immensité et la pertinence de son œuvre est le premier pas vers cette justice qu'il faut lui rétablir», a encore indiqué l'intervenant considérant que c'est une infime justice que de lui consacrer un colloque. Au-delà de centaines d'articles, en arabe, en français et en anglais, publiés dans des livres collectifs, des revues scientifiques et des journaux, Mohamed Arkoun, ce natif de Taourit Mimoun, à Beni Yenni (Tizi Ouzou), village natal de l'écrivain Mouloud Mammeri, détient à son actif une trentaine de livres dans les trois langue, traduits en plusieurs langues y compris le persan, l'ourdou ou encore le kurde.