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Mémoires anachroniques de l'Andalousie perdue
Publié dans La Nouvelle République le 15 - 05 - 2019

En cette période, l'Andalousie continuait à s'organiser et se pacifier sous le règne de souverains tout autant difficiles que souples et habiles à la fois. L'émir Abd er-Rahmân I qui avait engagé la dynastie des Omeyyades à Cordoue dans le sens de l'essor et de l'élévation, énonçait par cette mission d'une grande importance l'ébauche d'un Etat apte à commander cette partie de l'Europe.
A sa mort, l'émir Hicham Ier prit le pouvoir au détriment de ses deux frères aînés, Souleyman et Abdallah. L'Andalousie était prospère et paisible ce qui amenait le souverain à s'offrir le luxe d'organiser très souvent ces «fameuses expéditions estivales» aux Asturies. L'émir se faisait appeler «le Juste» et aimait les artistes et les poètes car lui-même était poète. Son fils El Hakem Ier, lui succéda en 796 et y resta au pouvoir jusqu'en 822. Et contrairement à son père, il eut du mal avec de nombreuses révoltes et surtout avec ses oncles, Souleyman et Abdallah, qui ne voulaient en démordre avec cette «histoire» de succession. Une querelle dynastique en quelque sorte. Il les fait exécuter après qu'il eût déjoué un coup d'Etat, qu'ils avaient soigneusement préparé. Ce souverain, .qui a su autant jouer de la terreur que d'une politique sage laissait à son fils Abd er-Rahmân II un Etat relativement stable. Ce dernier a été un souverain bienfaiteur et défenseur de la science. Abd er-Rahmâm II s'entourait d'artistes qui ont orienté judicieusement l'Espagne musulmane vers une civilisation culturelle qui a fait longuement sa renommée. Il était considéré comme l'un des chefs musulmans les plus cultivés de son temps, ce qui ne l'empêchait pas d'être très rigoureux par ailleurs quand il s'agissait de s'élever contre les séditions qui apparaissaient lors de différends ethniques ou religieux. La révolte concertée de Tolède en 828, ainsi que l'agitation intérieure menée par les chrétiens ont été vite maîtrisées. En 844, les Vikings, appelés par les Arabes les « madjus », ont débarqué à Séville, dans cette ville qui se développait à un rythme soutenu, et où il y a eu la première construction entreprise : la Grande mosquée, à partir de 829-830, à l'emplacement actuel de l'église du Salvador… Ils l'ont occupée pendant sept jours et en ont profité pour essayer de la piller entièrement, s'il n'y eut cette riposte rapide des Andalous, fiers de leur appartenance à ce pays. Cet événement mérite d'être relaté pour montrer à quel point les jeunes Andalous, qui n'étaient pas du tout préparés pour les travaux guerriers, en ce temps où ils favorisaient l'art et la culture, ont démontré encore une fois ce dont ils étaient capables devant un ennemi féroce, adepte de génocide et de dévastation. Le commandant Moussa Ibn Moussa El Fateh, un des descendants de ces jeunes conquérants qui sont venus en 711 de Césarée, a été dépêché par l'émir personnellement à Séville pour mettre de l'ordre dans cette cité qui a été assiégée par des Nordiques, navigateurs hors pair – il faut leur reconnaître cette qualité –, par ces Vikings qui furent d'abord des commerçants au long cours. Mais, toujours pour l'Histoire, il faut dire que plus qu'à l'hypothèse mauresque – c'est-à-dire la conquête musulmane en Espagne qui leur aurait coupé la route de la Méditerranée –, c'est sûrement à la faiblesse militaire de l'ancien Empire carolingien, à la mort de Charlemagne, qu'on doit l'attirance particulière que les côtes du nord de l'Europe exercèrent sur ces marins, selon les analyses d'historiens. Peu importe toutes ces motivations. Le souverain et son commandant Moussa Ibn Moussa El Fateh ne s'arrêtaient pas à ces résultantes par trop philosophiques en ces moments où le danger prenait de plus en plus d'ampleur. Il y avait péril en la demeure et Séville menaçait ruine. En effet, elle menaçait de disparaître à jamais, elle qui se soulevait régulièrement contre le pouvoir cordouan qui ne l'oubliait, pourtant pas, sur le plan du développement, mais qui aussi n'arrivait pas à imposer raisonnablement son autorité. - Tu pars à la tête d'une armée que j'ai désignée. Ce sont pour la plupart des jeunes sans expérience, mais volontaires et assez résolus et audacieux pour contenir les assauts de ces sauvages nordiques qui nous viennent du froid pour nous piller et brûler ce que nous avons mis beaucoup de temps pour édifier. Je dois te dire que ta mission n'est pas simple, elle est difficile. Tu dois défendre l'un des fleurons de la côte atlantique. Tu dois défendre Séville, cette ville qui, durant une longue période de l'Histoire, et de par son emplacement stratégique, a été un port fluvial d'échanges importants entre Biled El Andalus et l'Italie, l'Angleterre, les Flandres et le nord de l'Europe. Tu dois savoir également que déjà, en 807 de notre ère, des pillards Vikings qui sont venus de Normandie, n'ont pas hésité à remonter le Guadalquivir, depuis «San Lucar de Barrameda» situé à coté de Cadix, pour l'attaquer, sur plusieurs dizaines de kilomètres en amont, avant de la dévaster. Ces mêmes pillards sont revenus cinq ans après, en 812, pour conquérir la région, mais notre armée les a combattus et repoussés. Et les revoilà maintenant, à la tête d'une grande force, plus de 80 drakkars qui remontent encore le Guadalquivir pour l'attaquer de nouveau. Je te confie cette mission et te rappelle que ces hordes de féroces combattants n'ont pitié de personne et que leurs incursions sont toujours marquées par des bilans désastreux, confia le souverain Abd er-Rahmân II à son commandant qui allait vers le front. - Je ferai de mon mieux ô commandeur des croyants ! Séville est notre ville, elle est dans Biled El Andalus et la mission, par laquelle vous m'honorez et reconnaissez la valeur des miens, ces Berbères d'origine, à la fidélité éprouvée, je la remplirai avec la résolution et la force qu'Allah m'accordera une fois sur le champ de bataille, répliqua le commandant, avec l'assurance du brave soldat. Oui, nous étions en 844 et les colonnes de Vikings avaient déjà terminé leur raid sur La Corogne, en Galice, au nord-ouest de la péninsule, puis se trouvaient dans Séville qu'ils ont investie par le Guadalquivir. Le commandant Moussa Ibn Moussa El Fateh, sitôt arrivé avec ses troupes, commençait par mettre en exécution ses plans d'attaques et de défenses, selon les règles d'une telle conjoncture dans pareille expédition. Il devait battre, pour les faire sortir, ces hommes qui venaient des mystérieuses brumes des fjords nordiques, qui ignoraient la peur et vénéraient les «dieux d'Asgard». Lui et ses combattants adoraient Allah, Dieu Unique et Miséricordieux, ce Dieu qui leur donnait la force et l'intelligence de contenir les assauts dangereux de ces hordes de sauvages. Le commandant Moussa, à la tête de cette armée de jeunes soldats, attaquait comme personne ne l'aurait fait dans une situation aussi périlleuse que celle-là. Le courage, il en avait à revendre… la force, il la tenait de cette motivation qui lui dictait d'aller toujours de l'avant pour l'émancipation d'un pays que ses ancêtres ont conquis. Il combattait pour l'affranchissement d'un peuple que l'Islam a émancipé pour asseoir le message de paix et de civilisation qu'il nous recommande d'appuyer et de soutenir. La bataille devait durer plusieurs jours. Elle faisait rage sur tous les fronts. El Fateh, ne voyait que l'aboutissement de cette opération en faveur de son armée. Motivé de cette manière, il ne voulait en aucun cas reculer, même au regard de pertes considérables, – des centaines de martyrs parsemaient les rues de Séville – pour laisser l'ennemi piller, saccager, incendier et tuer davantage. Une stratégie guerrière, peu commune, lui a été opposée, mais la volonté de ses combattants et le courage qui leur donnait encore plus de vitalité, ont fait qu'il ne pouvait abandonner ce projet de lutte implacable pour la liberté des siens et qui prenait, s'il n'y avait sa riposte foudroyante, des proportions considérables et dangereuses, peut-être pour toute l'Andalousie. Le commandant El Fateh en était sorti vainqueur de cette dure épreuve qui, pour un jeune comme lui, allait démontrer encore une fois la valeur de ces fiers soldats dont les coups d'essai, se terminaient toujours en coups de maître. Les Vikings ont été vaincus et chassés de Séville qui devait aussitôt se reconstruire pour jouer son rôle économique et politique dans la région. Cependant, malgré leur sauvagerie, les Normands reconnaissaient les mérites de leurs adversaires, ces Andalous d'une autre trempe. Ils ne les considéraient pas comme les autres peuples de l'Europe, faibles, sans âme et incongrus. Ils les considéraient à leur juste valeur parce qu'ils voyaient en eux des combattants implacables, intraitables, respectueux des règles de la guerre et des hommes, ils reconnaissaient en eux, en vérité…, les véhicules de civilisation. Etait-ce une ruse de leur part pour laisser le temps travailler en leur faveur ou était-ce l'observation sincère du vaincu ? En tout cas, le roi normand avait envoyé une mission diplomatique à Cordoue pour s'entretenir avec l'émir Abd er-Rahmân II et lui demander d'aller vers des «relations pacifiques entre les deux pays». Le souverain andalou ne put qu'accepter cette proposition et envoya, à son tour, une délégation, chargée de nombreux cadeaux, en pays normand pour concrétiser ce vœu qui souhaitait que de «meilleures relations» s'établissent dans les plus proches délais. Cette mission était dirigée par Yahia El Ghazal, accompagné de Yahia Ibn Habib, deux autres fins limiers de la politique et de la diplomatie, issus de cette lignée d'ancêtres convaincus qui n'ont jamais dit non à une quelconque mission, fut-elle difficile et périlleuse. En tout cas, leurs interlocuteurs étaient émerveillés après leur premier contact avec ces jeunes aguerris qui leur ont laissé une telle impression qu'ils se voyaient complexés et désarmés devant tant de clarté et de réalisme. A Séville, Moussa Ibn Moussa El Fateh qui a pris de l'assurance après sa victoire sur les Vikings, pensait que sa mission était virtuellement terminée. Et de là, il voulait se retirer de cette région tellement convoitée et qu'il a défendue avec une extrême impétuosité et une sincère exaltation. Mais le souverain voyait autrement sa présence dans l'émirat de Cordoue et, dans un esprit de continuité, il lui ordonna de rester encore pour superviser des projets notables et plus
marquants pour la sécurité. - J'ai décidé, après ces incursions répétées de ces hordes de pillards qui nous viennent des pays du froid, de prendre toutes les dispositions qui s'imposent pour garantir la sécurité et la sérénité de nos citoyens, et je vous demande de m'aider en cela, déclara l'émir de Cordoue, devant cette armée qui stationnait aux portes de la ville, en profitant d'une visite à Séville libérée. - Mais quel sera notre rôle ô commandeur des croyants, puisque nous avons terminé notre mission avec ceux qui sont venus de loin pour nous attaquer et piller nos richesses ? répliqua le commandant Moussa Ibn Moussa El Fateh. - Détrompe-toi, noble officier, ta mission n'est pas terminée. Celle qui va suivre est plus déterminante pour le bien de cette ville qui aura certainement à jouer un rôle important à l'avenir ! De toute façon, il est clair que nos grands parents, quand ils sont venus dans ce pays, n'avaient aucunement pensé à une expédition hégémonique et encore moins expansionniste. Ils avaient en tête le respect des populations et de leurs confessions, le désir d'affranchir ceux qui, parmi eux, vivaient les affres de l'intolérance et de l'inquisition et, dans une large mesure, ils avaient l'ambition de transmettre, avec une vision claire et sincère, le dernier message divin à un peuple croyant mais qui vivait dans la tourmente de souverains autoritaires et despotiques. Ainsi, nous ne sommes pas venus dans cette partie du monde pour guerroyer ni pour voir couler du sang pendant toute notre existence. Nous sommes venus pour réaliser et édifier ce qui n'a pas été fait depuis des siècles à cause de luttes intestines et de désaccords qui se terminent inévitablement dans la tempête des soulèvements et des massacres. De là, tu dois comprendre que ta mission, comme celle de tes ancêtres en Biled El Andalus, n'est pas une mission de colonisation, mais une révolution dans le vrai sens du terme, une révolution qui va féconder le passé et préparer l'avenir. Quant à notre armée, avec ses garnisons, ses troupes, ses équipements, sa logistique, elle est nécessaire bien sûr, mais ce n'est pas notre premier souci par rapport à l'expansion de la culture et aux moyens que nous devons mettre à la disposition des gens pour leur consentir un bon épanouissement dans un pays, comme celui-ci, qui doit avancer parce qu'il a énormément de possibilités. Tu es là en bâtisseur et non en mercenaire, prêt à tuer ou à te faire tuer. Et le bâtisseur est celui qui éprouve du plaisir à construire pour les autres, tout en se protégeant, évidemment, des malheurs que peuvent lui engendrer ces autres qui ne construisent pas, mais qui détruisent. Aujourd'hui, pour permettre à nos populations de vivre dans la sécurité, vaquer à leurs occupations et évoluer dans la quiétude la plus totale, je décide la construction de chantiers navals, afin de constituer une flotte qui nous permettra de repousser à l'avenir aussi facilement les tentatives d'incursions venant de nos ennemis. Je décide également de renforcer la côte à l'aide de forteresses et de tours de guet. Ainsi, nous serons efficaces et pourrons travailler sans redouter ces pirates qui écument les mers et s'attaquent aux populations sans défense. C'est pour cela que ta mission n'est pas encore terminée. Tu as accompli le «petit djihad» contre les Vikings, il te reste le «grand djihad», essentiel et plus noble, celui de l'édification de Biled El Andalus qui attend beaucoup de nous. C'est pour cela également que je te nomme à la tête de toutes les équipes qui vont être chargées de réaliser ces grands projets. J'ai confiance en toi et je sais, maintenant plus que jamais, ce que valent et ce que représentent des jeunes de ton apanage dans un pays, comme le nôtre, qui a besoin de se refaire complètement. Oui, j'ai confiance en ta génération car elle représente la fine fleur de ces Berbères, tes ancêtres, qui ont toujours défendu le droit et la justice, qui ont protégé le faible, la veuve et l'orphelin, qui ont su être forts avec les impitoyables oppresseurs et enfin, qui ont su garder la tête haute et ne jamais courber l'échine. C'est par ces paroles, devant l'ensemble des troupes réunies, que le souverain Abd er-Rahmân II, termina sa mission d'inspection à Séville. Moussa Ibn Moussa El Fateh buvait, en se délectant, les paroles de l'émir, tellement elles le réconfortaient en même temps qu'elles galvanisaient ses troupes. Il connaissait déjà sa place et son rang dans le cœur du maître de l'émirat de Cordoue. Alors, ces compliments le stimulaient davantage et lui permettaient de prendre encore plus au sérieux la nouvelle mission qu'il lui confiait. Il s'était mis au travail peu après qu'il ait reçu les instructions et les moyens nécessaires pour ouvrir les différents chantiers. Une activité inhabituelle et intense réunissait beaucoup de soldats qui devenaient, pour la circonstance, des bâtisseurs d'un ordre nouveau. Les chantiers rayonnaient du bruit de ces hommes vigoureux qui se surpassaient en besogne et de leur matériel qui grinçait et claquait en une musique rythmée, donnant plus d'hardiesse à ces corps pétillant de bonheur et ruisselant de sueur. Quelques années après, toute la côte devenait plus sûre car mieux prémunie par une infrastructure suffisante qui allait permettre de surveiller et défendre cette région stratégique à plus d'un titre. Ces forteresses et ces grandes tours se dressaient sur le rivage, dans une apparence imposante et impressionnante, parce que le cauchemar était loin de disparaître. En effet, 13 ans après, en 857, sous le règne de l'émir Mohamed Ier, un autre raid a été mené par de grands chefs vikings Halsteinn et Björn Jarnsida. Ces deux derniers ont mis de grands moyens dans l'expédition en plus des 62 navires qui passaient le détroit de Gibraltar. Algésiras a été pillée. La côte du Maghreb ainsi que la Murcie, les Iles Baléares et le Roussillon ont été également pillés. Et, en poursuivant leur expédition, ces mêmes Vikings normands ont essayé leur ultime incursion à Séville, puisque nombreux parmi leurs chefs la connaissaient fort bien. Le commandant Moussa Ibn Moussa El Fateh, élevé au rang de dignitaire de l'émirat de Cordoue – pour les exploits contre les Normands et l'édification des infrastructures de défense – sortait, encore une fois, à la rencontre des pillards à l'embouchure du fleuve de Séville. La bataille faisait rage et Moussa Ibn Moussa El Fateh, à la tête de cette fière armée de l'Andalousie, sortait vainqueur non sans faire sombrer plusieurs navires dans cette embouchure qui racontera demain la déroute d'une armée de Vikings qui s'évaluait par sa férocité et sa barbarie. Mais, indépendamment de ces batailles et de ces pertes énormes de part et d'autre, chez les musulmans et chez les ennemis, pour des buts diamétralement opposés, n'y avait-il pas cette assurance du côté des Andalous que, malgré tout, les «clauses» de leur conquête de la péninsule Ibérique, étaient en train de se concrétiser dans la pratique, en une civilisation qui allait révolutionner cette grande région de la Méditerranée ? En effet, l'arme dans une main et la pioche et la truelle dans une autre, les «conquérants-promoteurs de Biled El Andalus» ont su démontrer dans la réalité qu'ils venaient effectivement pour construire et s'imposer devant le temps et les hommes, en édifiant un monde de culture et de progrès. Libérer Séville des mains de Vikings, n'était pas suffisant pour de jeunes chefs qui avaient l'habitude d'aller plus loin dans le sacrifice et l'abnégation. De plus l'émir en place n'était pas sans envergure. Nous l'avons dit, il fut le souverain bienfaiteur et défenseur de la science. En son temps, «les artistes ont orienté judicieusement l'Espagne vers une civilisation culturelle qui a fait longuement sa renommée». En effet, ce n'était pas suffisant puisqu'en 844, cette année des Vikings, comme «l'année des sauterelles» ou l'année d'une quelconque épidémie, par exemple – cela se mesurait ainsi –, de l'autre côté, chez ceux qui concevaient autrement leur présence dans un si beau pays comme l'Andalousie, on déployait d'énormes efforts pour construire ce qui allait rester pour l'éternité. N'était-ce pas toutes ses qualités et ces impulsions qui ont sommé le calife de commencer l'édification d'un bel ouvrage, «El Qaçar», l'Alcazar de Séville ou (Reales Alcázares de Sevilla) ? - «L'Alcazar de Séville sera un palais fortifié que nous allons élever dans cet emplacement… Il sera une merveille architecturale», martela Abd er-Rahmân II, le jour de la pose de sa première pierre… Et de continuer : - «Il sera paré des plus beaux jardins où s'épanouiront des plantes magnifiques et rares. Il y aura une quantité de fleurs, de toutes les couleurs, et les senteurs que dégageront les orangers, le jasmin et les glycines, senteurs qui se joindront au clapotis des jets d'eau et au ruissellement des sources, ajouteront du charme et de la splendeur dans ce paradis terrestre». Ce monument sera modifié à plusieurs reprises durant la période musulmane, notamment sous les Almohades. Et au XIe siècle, pendant le déclin du califat omeyyade et sa restructuration en Taïfas, coïncidant avec l'arrivée des Almoravides dans la péninsule, l'émir El-Mu'tamid Ibn Abbad trouvera également le temps et l'occasion pour édifier d'autres dépendances et introduire de nombreuses modifications dans l'Alcazar, tout en faisant de ce splendide monument le siège de son pouvoir et, de Séville, sa capitale. Avec l'édification de l'Alcazar, il y a eu en cette époque d'autres performances venant de virtuoses dont un exilé de Bagdad, un musicien de grand talent, se nommant Zyriab qui a suscité la jalousie de son maître Ishaq El Mawçili, à la cour de Haroun er-Rachid, et qui a été contraint de quitter Bagdad, parce que menacé par ce dernier. Il est allé se produire ailleurs, là où ses talents artistiques, pouvaient plaire. C'était en l'an 822 qu'il est arrivé à Cordoue, où il a trouvé à sa rencontre l'émir Abd er-Rahman II
en personne. Ce geste inhabituel chez un autre monarque, lui paraissait extraordinaire et quelque peu étrange, mais très vite il a compris que c'était la preuve de tout l'intérêt qu'on prêtait à la musique et l'estime dont jouissaient les artistes dans la société musulmane de l'époque. Manifestement, Cordoue s'érigeait alors en centre sensible d'une civilisation prospère et bénéficiait, déjà, d'une bonne réputation culturelle et artistique. Pendant cette période, à la cour du souverain omeyyade, se distinguait un nombre appréciable d'éminents musiciens et d'excellents chanteurs, tels les Zerkoun, Alloun, Ibn En-Nachit, ou Mançour... Mais Zyriab, l'Abbasside, n'a pas mis beaucoup de temps pour les éloigner tous, du fait qu'il était parfait dans tous les compartiments de la musique : une voix sans égale, un apport nouveau, dans lequel se mêlaient les dernières pratiques de l'école de Bagdad et celle de sa propre invention.


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