Lors de la rencontre avec la presse nationale, le président de la République M. Abdelamajid Tebboune le sujet du pétrole et du gaz de schiste a été abordé, dossier stratégique engageant la sécurité nationale, ne devant pas être utopique 98% des recettes en devises directement et indirectement provenant des hydrocarbures, irriguant toute la société algérienne, et encore pour longtemps du fait que tous les pouvoirs depuis l'indépendance politique n'ont pas engagé les véritables réformes structurelles, je le cite : «si nous voulons élever le niveau de vie, cette richesse doit être exploitée, mais l'exploitation du gaz de schiste nécessite un débat national» Dans ce cadre, je voudrais dénoncer certains propos d'anti nationalistes que certains voudraient faire porter aux populations du Sud, pouvant affirmer ayant vécu durant la route de l'unité africaine vers les années 1972/1973 en tant qu'officier d'administration pour la route de l'unité africaine à El Goléa et In Sahah que les populations du Sud tiennent à l'unité nationale et qu'il faut savoir uniquement dialoguer avec ces populations paisibles. Je rappelle les principaux axes directeur de l'audit réalisé sous ma direction «Pétrole et gaz de schiste: opportunités et risques» assisté de 20 experts nationaux, internationaux et les cadres du secteur, 10 volumes 980 pages remis au gouvernement de l'époque, le 25 février 2015, que je viens de transmettre le 24 janvier 2020, pouvant être utile pour la décision, à Mr le Président de la République et à Mr le Premier ministre. 1- Privilégier le dialogue productif loin des idéologies Le problème stratégique de l'Algérie est d'éviter des débats stériles étant une opportunité face à l'épuisement des réserves, l'énergie étant au cœur de la sécurité nationale mais évaluer également les risques passant renvoyant globalement à la gouvernance, qui doit être rénovée, l'objectif stratégique étant une économie hors hydrocarbures dans le cadre des valeurs internationales. De l'avis de la majorité des experts, l'énergie étant au cœur de la sécurité nationale, c'est une opportunité pour l'Algérie, sous réserve de sa rentabilité économique, (non rentable actuellement pour l'Algérie le cout d‘un puits étant estimé entre 15/20 millions de dollars), de la protection de l'environnement et des nappes phréatiques d'eau du Sud. À ce titre, il est souhaitable qu'une institution indépendante créée, relevant non d'un département ministériel, évitant d'être juge et partie, mais du président de la République ou du premier Ministre associant la société civile de chaque région, des experts indépendants, des représentants du Ministère de l'Energie et d'autres départements ministériels, travaillant en étroite collaboration avec les institutions internationales. Je rappelle que le président de la république et le premier ministre ont tenu à souligner que l'Algérie est à l'ère de l'exploration, et l'exploitation qui ne verra pas le jour avant 2020/2025 sous réserve du respect de l'environnement et de la rentabilité, principes contenus dans la loi des hydrocarbures. 2- Huit précisions sur le gaz de schiste s'imposent Les experts ont tenu à rappeler que le problème central est de définir le futur modèle de consommation énergétique allant vers un MIX énergétique Il s'agit de ne pas privilégier une énergie aux dépens d'autres, afin de ne pas polluer le paysage médiatique, laisser aux experts le soin de débatte scientifiquement, tenant compte des nouvelles mutations énergétique. I- La fracturation est obtenue par l'injection d'eau à haute pression (environ 300 bars à 2 500/3000 mètres) contenant des additifs afin de rendre plus efficace la fracturation dont du sable de granulométrie adaptée, des biocides, des lubrifiants et des détergents afin d'augmenter la désorption du gaz. II- Il faut savoir d'abord que le gaz de schiste est concurrencé par d'autres énergies substituables et que les normes internationales donnent un coefficient de récupération en moyenne de 15/20% et exceptionnellement 30%, pouvant découvrir des milliers de gisements mais non rentables financièrement, les réserves se calculant selon le couple prix international des énergies et coût. III- 1000 puits donnent environ 50 milliards de mètres cubes gazeux par an.. Pour les 1000 puits, la durée de vie ne dépasse pas cinq années, devant se déplacer vers d'autres sites assistant donc à un perforage sur un espace déterminé comme un morceau de gruyère. IV- Environ 1000 puits est une hypothèse puisque même pour le gaz traditionnel, le maximum de forage n'a jamais dépassé 200 puits. Même dans cette hypothèse maximale de 200 puits donnant 10 milliards de mètres cubes gazeux non conventionnel, un peu plus que le projet GALSI actuellement gelé, dont le coût est passé de 2,5 à 4 milliards de dollars fin 2014, non rentable au vu du prix actuel, dont la capacité prévue était de 8 milliards de mètres cubes gazeux. V- La rentabilité implique – au vu de la structure des prix actuels au niveau international, concurrencé par le gaz conventionnel- un coût minimum de 12 dollars le MBTU et un prix de cession supérieur à 15/17 dollars le MBTU, tenant du coût de transport- s'alignant sur l'Asie puisqu'aux USA le MBTU varie entre 4/5 dollars et en Europe après la catastrophe au Japon entre 9/12 dollars le MBTU, existant une déconnexion du prix du gaz sur celui du pétrole depuis plusieurs années. Pour s'aligner sur le prix de cession actuel, devant tenir compte de la profondeur (le cout n'est pas le même pour 600 mètres ou 2000/3000 mètres supposant le bétonnage), le coût du forage du gaz non conventionnel d'un puits devrait être moins de 5/7 millions de dollars pour être rentable, alors que selon les experts il donnerait dans la situation actuelle 18/20 millions de dollars par puits. VI- L'exploitation de ce gaz implique de prendre en compte que cela nécessite une forte consommation d'eau douce, et en cas d'eau saumâtre, il faut des unités de dessalement extrêmement coûteux, autant que les techniques de recyclage de l'eau. VII- Surtout cela peut avoir des effets nocifs sur l'environnement, (émission de gaz à effet de serre), la fracturation des roches pouvant conduire à un déséquilibre spatial et de l'équilibre écologique Et en cas de non maîtrise technologique, elle peut infecter les nappes phréatiques au Sud, l'eau devenant impropre à la consommation avec des risques de maladies comme le cancer. VIII- Seuls les USA maîtrise, encore imparfaitement, cette technologie de fracturation hydraulique. Un co-partenariat incluant des clauses restrictives avec d'importantes pénalités en cas de non-respect de l'environnement et la formation des Algériens pour tout opérateur étranger, USA et autres, est indispensable. 3- D'autres techniques en cours économisant l'eau et les produits chimiques Aujourd'hui, pour récupérer le gaz de schiste, la technique utilisée est la fracturation hydraulique, consistant à injecter un fluide consistant d'environ 90% d'eau, 8 à 9,5% de «proppants» (sable ou billes de céramique) et 0,5 à 2% d'additifs chimiques – sous très haute pression. L'utilisation des gaz liquides permet de se passer complètement ou en grande partie d'eau et d'additifs. Pour les mousses, par exemple la réduction est de 80 % du volume d'eau nécessaire étant gélifiées à l'aide de dérivés de la gomme de Guar. Ainsi sans être exhaustif, du fait de larges mouvements écologiques à travers le monde, des alternatives à la fracturation hydraulique sont encore à un stade expérimental et demandent à être plus largement testées, l'objectif étant de minimiser l'impact environnemental de la fracturation hydraulique tant pour les volumes traités que pour la qualité des eaux traitées et de diminuer significativement la consommation d'eau et/ou d'augmenter la production de gaz. La fracturation au gel de propane est en cours d'utilisation sur environ 400 puits au Canada et aux États-Unis (plus de 1.000 fracturations déjà effectuées). L'eau pourrait aussi être remplacée par du propane pur (non-inflammable), ce qui permettrait d'éliminer l'utilisation de produits chimiques. Les premiers puits utilisant cette méthode ont été fracturés avec succès en décembre 2012 aux États-Unis. Nous avons la fracturation exothermique non-hydraulique (ou fracturation sèche) qui injecte de l'hélium liquide, des oxydes de métaux et des pierres ponce dans le puits, la fracturation à gaz pur peu nocive pour l'environnement surtout utilisée dans des formations de roche qui sont sensibles à l'eau à maximum 1500 m de profondeur ; la fracturation pneumatique qui injecte de l'air comprimé dans la roche-mère pour la désintégrer par ondes de chocs, n'utilisant pas d'eau, remplacée par l'air mais utilisant certains produits chimiques en nombre restreints ; enfin la stimulation par arc électrique (ou la fracturation hydroélectrique) qui libère le gaz en provoquant des microfissures dans la roche par ondes acoustiques, utilisant selon les experts pas ou très peu d' eau, ni proppants ou produits chimiques, mais nécessitant beaucoup d' électricité. Selon certains experts, horizon 2040/2050, l'hydrogène est une piste sérieuse enrichissant le «mix» ou le bouquet énergétique mondial, pour le transport et le stockage des énergies intermittentes et pourrait aussi permettre de produire directement de l'énergie tout en protégeant l'environnement, l'hydrogène en brûlant dans l'air n'émettant aucun polluant et ne produisant que de l'eau. Un rapport rédigé le 22 janvier 2014 par des experts pour le parlement français à partir de tests expérimentaux montre qu'un (1) kg d'hydrogène libère environ trois fois plus d'énergie qu'un (1) kg d'essence, mais que pour produire autant d'énergie qu'un litre d'essence, il faut 4,6 litres d'hydrogène comprimé à 700 bars (700 fois la pression atmosphérique). Cette étude rappelle également qu'il suffit d'un kilo de d'hydrogène (H2), stocké sous pression, (représentant un coût d'environ huit euros) pour effectuer une centaine de kilomètres dans un véhicule équipé d'une pile à combustible. Toujours selon ce rapport, à terme, avec le développement conjoint des véhicules à hydrogène et des piles à combustible destinées aux bâtiments et logements, on peut tout à fait imaginer le développement d'un réseau de production et de distribution transversale et décentralisée d'énergie. (A suivre) Dr Abderrahmane Mebtoul, professeur des universités, expert international