Mesdames et messieurs les ambassadeurs, les responsables politiques et économiques des ambassades et des institutions internationales présents à cette conférence, devant remercier l'Union européenne, de cette aimable invitation, qui est le prolongement de la conférence donnée le 19 mars 2019 (14-16h) à l'Ecole supérieure de guerre MDN et le même jour au siège de l'ambassade (19-20h30) devant les attachés économiques de l'OCDE, ayant été initiée par l'ambassade des Etats-Unis d'Amérique, sur le thème «L'impact de la baisse des hydrocarbures sur les équilibres macro-économiques et macro- sociaux de l'Algérie», où nos prévisions se sont malheureusement avérées justes. Mesdames et Messieurs, dans une conjoncture de crise mondiale qui touche tous les pays de la planète due à l'épidémie du coronavirus, avec une dette publique mondiale et un taux de chômage sans précédent, depuis la crise de 1929, l'Algérie, acteur stratégique de la stabilité de la région méditerranéenne et africaine, un pays à fortes potentialités aura en principe un nouveau gouvernement, après les élections législatives du 12 juin, au plus tard courant juillet 2021 et nombreux sont les défis qui l'attendent. Sans une information interne fiable, tout contrôle externe est difficile et dans ce cas, la mission des institutions de contrôle serait biaisée. Dans les administrations, c'est presque impossible, du fait que les méthodes de gestion relèvent des années 1970 ignorant les principes élémentaires de la rationalisation des choix budgétaires. 4- Quels sont les scénarios possibles devant être réalistes, pouvant être combinés pour préserver les réserves de change à un niveau raisonnable, car dépenser sans compter et sans renouvellement de la gouvernance et la politique socio-économique serait suicidaire pour le pays conduisant le pays à la cessation de paiement courant 2022 : le premier scénario est un cours du pétrole supérieur à 100 dollars et du cours du gaz supérieur à 7/8 dollars le MBTU, l'Algérie fonctionnant dans le cadre de la loi de Finances 2021 à plus de 130 dollars le baril, un scénario dans la conjoncture mondiale actuelle irréalisable, le cours moyen entre 2021/2022 s'il y a augmentation de la production en volume physique et une en reprise de l'économie mondiale devant se situer entre une fourchette de 60/65 dollars, niveau défendu par les plus grands producteurs, l'Arabie Saoudite et la Russie. L'Algérie est un producteur marginal, les réserves de pétrole étant d'environ 10 milliards de barils et entre 2000/2500 milliards de mètres cubes gazeux, selon les déclarations en 2020 de l'ex-ministre de l'Energie. Le troisième scénario où au rythme actuel, l'Algérie ne pourrait plus honorer ses engagements internationaux du fait notamment de la forte consommation intérieure qui en 2030 dépassera les exportations actuelles (subventions) est d'accélérer la transition énergétique devant s'orienter vers un Mix énergétique. L'Algérie possède d'importantes potentialités dans l'agriculture, le tourisme, les nouvelles technologies, ayant une importante diaspora et dans les énergies renouvelables mais ne devant jamais oublier que le fondement du développement du XXIe siècle repose sur la gouvernance à travers des décentralisations (grands pôles économiques régionaux) évitant le mythe d'entités locales administratives budgétivores et bureaucratiques et la valorisation du savoir. Devant éviter l'utopie, dépendante encore pendant de longues années des hydrocarbures, l'Algérie possède la troisième réservoir mondial de pétrole/gaz de schiste mais dont les techniques économisant l'injection d'eau douce et de produits chimiques dans les puits ne seront opérationnels pas avant 2025 afin de préserver l'environnement et éviter la pollution des nappes phréatiques du Sud (audit sous la direction du professeur A. Mebtoul, pétrole gaz de schiste, opportunités et risques 8 volumes, Premier ministère 2015). Le quatrième scénario est une exportation hors hydrocarbures entre 2021/2022 au sein de filières internationalisées approchant 10 milliards de dollars. Or si les projets sont lancés fin 2021, sous réserve de la levée des contraintes bureaucratiques, de la rénovation du système financier, l'adaptation du système socio-éducatif, le seuil de rentabilité pour les PMI/PME ne sera atteint pas avant 2024 et pour les projets capitalistiques (dont le fer de Gara Djebilet, le phosphate de Tébessa) entre 2027/2028. Aussi, il sera difficile d'atteindre les exportations algériennes hors hydrocarbures pour 5 milliards de dollars (USD) d'ici fin 2021. Plus de 70% des exportations selon les statistiques douanières sont constituées de semi-produits et le montant réel hors dérivés hydrocarbures ne devrait pas dépasser les 2-2,5 milliards de dollars mais devant pour avoir le profit net, retirer tous les matières premières brutes ou semi brutes importées en devises. Le cinquième scénario est une restriction drastique des importations ce qui ne peut conduire à une inflation du fait du déséquilibre offre/demande et de vives sociales en paralysant toute l'activité économique, l'objectif étant une meilleure gestion et la lutte contre la corruption renvoyant à une nouvelle gouvernance. Le sixième scénario est un endettement extérieur ciblé et un partenariat gagnant- gagnant pour des segments à valeur ajoutée et une balance devises profitable à l'Algérie. Mails sans objectifs clairs, de profondes réformes une stabilité des institutions, la stabilité juridique avec de surcroît l'accroissement de l'endettement des Etats développés, dans cette conjoncture de la crise mondiale, il ne faut pas faire des illusions. Aussi, l'ensemble des scénarios montrent que la marge d'actions du futur gouvernement est étroite. En résumé, le XXIe siècle sera dominé par l'émergence de réseaux décentralisés, qui remplaceront les relations personnalisées d'Etat à Etat dans le domaine des relations économiques et de l'intelligence artificielle (le primat de la connaissance) qui révolutionnent tout le système économique mondial. Je ne saurai trop insister sur le développement durable qui doit avant tout se fonder sur un Etat de Droit, avec l'implication des citoyens à travers la société civile, une véritable opposition sur le plan politique, une véritable indépendance de la justice, tout cela accompagné par une cohérence et visibilité dans la démarche de la politique socio-économique et un renouveau de la gouvernance. Car toute déstabilisation de l'Algérie, comme je le soulignais dans des interviews (2016/2019), l'une aux USA, à l'American Herald Tribune, dans plusieurs médias français l'autre et en arabe des pays du Golfe, aurait des répercussions internes, mais également géostratégiques sur toute la région. Les partenaires étrangers ne doivent plus considérer l'Algérie et plus généralement l'Afrique, continent à enjeux multiples comme de simples marchés mais favoriser un partenariat gagnant-gagnant. Mais les étrangers ne peuvent faire les réformes structurelles à notre place. Les différentes composantes de la société algérienne, pour des raisons de sécurité nationale, doivent transcender leurs différends grâce à la tolérance. Evitons toute sinistrose, sous réserve d'une nouvelle gouvernance, l'Algérie, garante de la stabilité régionale, a toutes les potentialités pour devenir un pays pivot. Abderrahmane Mebtoul Professeur des universités, expert international