La télévision de l'Assemblée française LCP, émission « Ces idées qui gouvernent le monde», animée par le docteur Emile Malet, directeur général de la revue « Passages », de l'organisation ADAPES, président du Forum mondial du développement durable et ami de l'Algérie, a organisé un important débat sur l'impact du réchauffement climatique et la sécurité mondiale qui a été enregistrée le 13 octobre, et qui sera diffusée le lundi 24 octobre 2022, à 22h30 heure Algérie. Comme le note avec justesse lors de la présentation de l'émission du docteur Emile Malet, perturbations climatiques extrêmes. sécheresses maximales et inondations dévastatrices, canicules terrestre et maritime. Tempêtes et ouragans. Biodiversité frappée et mutilée. Morts et blessés humains, animaux aussi… Rien ne nous fut épargné au cours de cette période estivale 2022. Et ce nuage catastrophique fut quasiment ubiquitaire, de France avec des brasiers d'une violence inouïe à l'ensemble du bassin méditerranéen, en Asie et en Afrique, au Moyen Orient et autour des contrées du Pacifique ». Les intervenants ont été Brice Lalonde, ancien ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, ex-sous-secrétaire général de l'ONU, coordonnateur exécutif de la Conférence des Nations unies sur le développement durable (Rio+20), le professeur Hervé Le Treut, spécialiste de la simulation numérique du climat, membre de l'Académie des sciences, professeur à l'Ecole polytechnique et à la Sorbonne, Fabienne Keller, Députée européenne, diplômée de l'Université de Californie, Ecole polytechnique, Daniel Salmon, sénateur d'Ille-et-Vilaine, EELV, professeur des Ecoles et Abderrahmane Mebtoul, professeur des Universités, expert international, où d'ailleurs je donnerai une interview au grand quotidien le Monde.fr, le 17 février 2022 et le 25 octobre à la télévision française Beur TV sur les tensions énergétiques en Europe et les relations Algérie-Europe via la France et la place de l'Algérie. Cette présente contribution présente les grands axes des interventions sur un sujet qui engage la sécurité du monde et bien évidemment celle de l'Algérie sous segment de l'Afrique.En raison de la montée des eaux, des famines ou encore des tempêtes, de nombreuses personnes seront contraintes, pour s'adapter au dérèglement climatique, de quitter leur maison ou leur pays : près de 220 millions de migrants climatiques sont envisagés d'ici à 2050 à cause de toutes ces catastrophes. Par ailleurs, le changement climatique accroît les risques sanitaires : vagues de chaleur, cyclones, inondations, sécheresses, propagation facilitée de maladies. Sixièmement, les dérèglements climatiques perturbent la distribution des ressources naturelles, leur quantité et leur qualité. De plus, les rendements agricoles et des activités de pêche sont impactés. Les rendements agricoles pourraient baisser d'environ 2% tous les 10 ans tout au long du 21e siècle, avec des fluctuations chaque année. Cela mène à une insécurité alimentaire (augmentation du prix des denrées, difficultés d'approvisionnement, etc.) et des tensions autour des ressources. Quelles seront les coûts supportés en cas de non modification de la trajectoire actuelle ? Car si l'Afrique, l'Asie dont la Chine et l'Inde plus de 4 milliards d'habitants sur les 8 milliard avaient le même modèle de consommation énergétique que l'Europe et les USA, moins d'un milliard d'habitant pour un PIB mondial dépassant les 40%, il faudrait selon les experts trois à quatre fois la planète terre. Plusieurs rapports de différentes institutions internationales qui ne se recoupent pas forcément en raison de la situation très complexe évaluent les coûts du réchauffement climatique. Ainsi, l'AIE les engagements gouvernementaux actuels ne permettraient d'atteindre que 20% des réductions d'émissions nécessaires d'ici 2030. Pour atteindre les objectifs, il faudrait investir chaque année jusqu'à 4.000 milliards de $ au cours de la prochaine décennie, en dirigeant la majorité de ces investissements vers les économies en développement. Des estimations plus larges sont réalisées pour chiffrer les investissements nécessaires à plus long terme. Morgan Stanley prévoit par exemple qu'il faudrait 50.000 milliards de $ pour transformer ce que le groupe bancaire décrit comme les cinq industries clés : énergies renouvelables, véhicules électriques, hydrogène, captage / stockage du carbone et biocarburants. Selon le réassureur Swiss Re, assureur des assureurs, il faudrait 270.000 milliards de dollars d'ici 250, et les objectifs de l'accord de Paris ne pourront être atteint qu'en 2069, soit 20 ans de retard, devant miser sur l'efficacité énergétique en premier lieu dans le transport (estimation de l'investissement à 114.000 milliards de dollars, de l'énergie,(78.000 milliards de dollars) du BTPH (65 milliards de dollars), de l'industrie(15 milliards de dollars sans compter les coûts dans , la santé et de l'agriculture et celui des loisirs nouveaux mode du tourisme nécessitant la réforme du système financier mondial du fait que les obligations vertes représentent en 2021 seulement 2% de la valeur du marché obligataire mondial. Sans changement de trajectoire, le PIB mondial pourrait être en baisse de 7 à 10% vers 2050. Les prévisions du NGFS, qui s'appuient sur la simple mise en place des politiques actuelles, envisagent une perte de production équivalant à environ 5 % du PIB mondial d'ici 2050, et jusqu'à 13 % d'ici 2100. L'université de Princeton estime que les USA devront investir 2.500 milliards de $ (soit 11% de leur PIB) d'ici 2030 pour pouvoir atteindre l'objectif net zéro en 2050. La Commission européenne, quant à elle, parle d'un investissement de 3.500 milliards de € au cours des dix prochaines années (soit 25% du PIB), tandis que l'université de Tsinghua University prévoit que le plan chinois coûtera au cours des quatre prochaines décennies 138.000 milliards de RMB (environ 21.600 milliards de $), ce qui représente 122% du PIB du pays. Quelles actions mener ? Les intervenants de cette émission ont montré l'importance de l'adaptation qui s'applique aux usages et aux activités humaines, qui sont en capacité d'évoluer afin de limiter les risques liés aux impacts du changement climatique (ex : réduction de la consommation d'eau pour anticiper la pénurie d'eau). Les méthodes d'adaptation sont développées à toutes les échelles : au niveau national au sein de politiques publiques (ex : Plan national d'adaptation au changement climatique), au niveau régional (ex : stratégie d'adaptation au changement climatique dans le Grand Ouest), au niveau local (ex : mise en place d'éco-quartiers au sein d'une ville) ou au niveau individuel (ex : récupération et réutilisation des eaux de pluies pour nettoyer sa voiture ou arroser les plantes). Les mesures d'adaptation concernent également la sécurité alimentaire des populations, dans le secteur de l'agriculture, pour s'adapter aux impacts du changement climatique et notamment de la raréfaction de l'eau, il est possible de choisir de planter des cultures adaptées au climat local ne nécessitant pas ou peu d'irrigation (agriculture climato-intelligente). De même, dans les villes, il devient de plus en plus fréquent de rencontrer des bâtiments présentant des toits ou murs végétalisés : ces techniques de végétalisation permettent une meilleure gestion des eaux de pluies mais également de lutter contre les îlots de chaleur (zone urbanisée où la température est plus élevée, une réorientation des approvisionnements alimentaires vers un modèle plus résilient et à faible impact, une agriculture plus durable en somme ; des investissements dans des infrastructures qui résistent mieux aux futures conditions météorologiques extrêmes ; la création de soutiens sociaux pour aider les millions de personnes qui seront déplacées les milieux environnants). La baisse de production d'électricité issue du charbon et le passage décisif aux véhicules électriques permettront de réduire les émissions de particules polluantes qui sont à l'origine d'une myriade de pathologies, notamment l'asthme. Les effets positifs de la transition énergétique sur la santé devraient entraîner une réduction des frais médicaux, diminuant ainsi le coût net de l'investissement initial. L'évaluation des effets combinés (effet positif de l'augmentation des dépenses d'investissement contrebalancé par la perte de production) est par nature incertaine. Selon l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), une « transition décisive » pourrait entraîner une hausse de 2,5% du PIB mondial à l'horizon 2050. Pour réduire les coûts, impossible à supporter les Etats à terme, il a été proposé : premièrement, de développer la transition énergétique, notamment le développement des énergies renouvelables, les panneaux photovoltaïques pour le marché local combiné avec la thermique pour les interconnexions pour pouvoir exporter. Soutenu dans de nombreux pays par des subventions gouvernementales, l'investissement dans les panneaux solaires a réduit les coûts de façon spectaculaire au cours des dernières décennies. Depuis 2010, leur prix moyen a baissé de 82% aux USA, pour atteindre l'équivalent de 0,068 $ par kilowatt/heure (kWh), contre 0,32 $ /kWh pour le charbon ; le solaire et l'éolien terrestre sont désormais les sources d'énergie les moins chères, et les futurs investissements dans d'autres technologies devraient également faire baisser les coûts liés à la transition ; deuxièmement simuler la productivité : l'investissement dans les nouvelles technologies devrait aussi permettre d'améliorer l'efficacité, de renforcer la productivité globale et d'augmenter la croissance économique potentielle ; troisièmement, l'augmentation des investissements dans les infrastructures clés qui peuvent générer des externalités positives supplémentaires, en améliorant la résilience d'un réseau électrique. En conclusion, le monde connaît un bouleversement inégal depuis des siècles, d'un côté pluies diluviennes, inondations de l'autre côté, sécheresse et incendies. Le réchauffement climatique n'est pas une vue de l'esprit. Etant une question de sécurité mondiale, les dirigeants sont appelés à avoir une autre gouvernance, mais pas seulement locale mais mondiale. Fondamentalement, si nous échouons à passer à un monde à faible émission de carbone, c'est l'intégrité globale de l'économie qui sera menacée. Dr Abderrahmane Mebtoul, professeur des universités, expert international