L'Algérie est décidée à réhabiliter sa machine industrielle pour se donner les moyens d'un renouveau économique. Il n'y a rien qui soit plus impératif que cette démarche qui consiste à restructurer des secteurs industriels mis en sommeil par les crises successives et par des choix économiques antérieurs qui étaient censés accompagner l'ouverture à l'économie de marché. Pourtant, force est de constater que la démarche de réhabilitation, pour nécessaire qu'elle soit, doit procéder d'une redéfinition des conditions et des préalables qui doivent présider à cette réhabilitation qui est souvent conséquente en matière d'accompagnement et de renflouement financiers. Il est vrai que ces entités industrielles, une fois remises sur pied et remises en marche, assurent la stabilité sociale de dizaines de milliers de travailleurs, pourvoient le pays en produits que souvent on est réduit à importer, et permettent également, moyennant une performance industrielle compétitive, d'envisager des marchés à l'exportation. Mais il est tout aussi vrai, et les expériences en la matière sont nombreuses pour étayer ce propos, que sans l'identification et la neutralisation des conditions originelles qui ont conduit au fiasco industriel et financier de ces entités, la même expérience pourrait être répétée. L'Etat se retrouverait alors, de nouveau, dans une logique de renflouement social, comme s'il consentait à repousser les horizons de l'échec qui serait alors, du fait de la persistance des causes, la seule issue probable. Ces entités publiques que l'on renfloue à coups de millions, parfois de milliards de dinars, sont, certes, essentielles pour réhabiliter le tissu industriel national, mais il est absolument indispensable qu'elles réintègrent le marché avec une logique économique différente de celle qui les a menées à la faillite, qu'elles adoptent les techniques de management universelles qui ignore la distinction entre la gestion publique et la gestion privée, qu'elles bannissent les approches socialisantes des décisions qui structurent le fonctionnement de l'entreprise, notamment la logique de la pléthore aux dépens de la qualité de la ressource humaine, qu'elles se penchent continuellement sur la réalité de la compétition économique au niveau de leurs secteurs respectifs, etc. Cela alors que bien souvent, les stratégies de développement adoptées, au moment du renflouement, situent la barre des objectifs très haut en parfaite opposition avec les moyens matériels et humains disponibles et, surtout, en totale ignorance de la compétition économique qu'imposent les marchés local et international. Des entités industrielles conçues initialement pour avoir des capacités de production énormes qui les habilitent à répondre à une demande nationale uniforme, ne peuvent plus fonctionner selon cet entendement, car les Algériens se sont habitués à la diversité des offres sur un marché concurrentiel ouvert sur l'international. D'où l'impératif pour ces entités d'intégrer des stratégies de développement qui prennent en compte la réalité du marché et la diversité et les exigences des consommateurs comme une donne incontournable qui les prépare à évoluer, non plus dans un marché de monopole, mais dans un marché où elles n'auraient de place que parce qu'elles arrivent à répondre à des normes qui trouvent un répondant positif en termes de demande. Il est vrai que rien n'empêche de recommencer, car les échecs répétés de ces entités sont autant d'expériences qui nourrissent les éléments d'une stratégie de redéploiement industriel susceptible de porter enfin ses fruits, mais encore une fois, les mêmes causes produisant toujours les mêmes effets, le recommencement mérite que l'on fasse des renoncements, car la structuration économique ne doit pas subir les pesanteurs des considérations sociales, si l'on veut que l'expérience entrepreneuriale débouche sur un succès qui permet, en définitive, de servir les finalités sociales.