En 1946, le nombre de colons français en Indochine ne dépassait par les 32 000. En 1954, en Algérie, sur près de 9 millions d'habitants, plus de un million étaient des colons d'origine européenne. Sur le plan démographique, en 1954, la population algérienne (musulmane) ne dépassait pas les huit millions d'habitants, tandis que la population du Vietnam était de 32 millions d'habitants. Par ailleurs et sur le plan géographique, il suffisait de 24 heures pour qu'un navire chargé de soldats et de matériels militaires envoyés en renfort arrive à Alger en provenance de Marseille. Le même navire devait faire un mois pour arriver à Saigon. Enfin, le Vietnam partage une longue frontière avec la Chine. Chose qui lui a permis de bénéficier d'une aide importante en armes et en munitions tout au long de la guerre. Ce qui n'était pas le cas pour l'Armée de libération nationale en Algérie. A partir d'Alger, la IVe République française tombe Tirant les leçons de leur débâcle en Indochine les généraux français vont construire à partir de 1957 les lignes Challes et Morrice pour rendre difficile l'acheminement des armes et des munitions à partir de la Tunisie et du Maroc. Ces deux lignes électrifiées renforcées, où pas moins de onze millions de mines ont été posées, isolera les maquis de l'intérieur des bases de l'Aln à l'extérieure à partir de 1958. Le 13 mai 1958, soit presque quatre ans après le déclenchement de la Révolution, les ultras de l'Algérie française, avec le soutien des généraux Salan, Jouhaud et l'amiral Auboyneau, feront tomber la quatrième République à partir d'Alger. Depuis le 1er novembre 1954 le puissant lobby colonial d'Alger dicte sa politique à Paris. Les inconditionnels de l'Algérie française sont convaincus que le gouvernement ne fait pas le nécessaire pour mater la rébellion et les katibas de l'Armée de libération nationale. Pour Paris, la Guerre en Algérie commence à coûter très cher aux finances publiques. Les gigantesques moyens militaires, en hommes et en matériels, aspire chaque jour deux milliards de francs de l'époque du Trésor français. Annuellement, pas moins de sept cent milliards de Francs sont mobilisés pour financer la guerre. Le putsch de 1958 va ramener de Gaule au pouvoir. Et ce dernier va mener une guerre totale et impitoyable pour vaincre l'ALN et son organisation politico-administrative. De février 1959 à avril 1961 De Gaule lance le plan Challe. Pas moins de 300 hélicoptères ont été utilisés Pas moins de 450 000 soldats français sont engagés dans des opérations militaires d'envergures qui vont de l'Ouest vers l'Est du pays. Tous les moyens militaires, terrestres, aériens et maritimes, sont mobilisés. Dans ces opérations pas moins de 300 hélicoptères ont été utilisés. C'est la première fois qu'un tel nombre d'hélicoptères est utilisé dans un conflit militaire moderne. Ce gigantesque dispositif est soutenu par les structures chargées du renseignement. Plus de 200 centres de tortures, portant le nom de Dispositif opérationnel de protection (DOP) vont faire subir des atrocités physiques à des dizaines de milliers d'Algériens au nom de la collecte de l'information. Nombreux seront ceux qui vont mourir sous la torture et seront portés disparus. Un tiers de la population, soit entre 2,5 et 3 millions d'Algériens seront arrachés à leurs terres et parqués dans des camps de fortunes. Dans ''Chemins de mémoire'', édité par le ministère français des Armées le bilan du macabre plan Challe se solda par la mort de 33 800 moudjaheds et 14 100 autres faits prisonniers. Les pertes françaises lors de ces opérations avaient dépassé les 10 000 soldats. Là aussi et à titre de comparaison, les pertes de l'Armée française suite aux opérations du plan Challe ont été cinq fois supérieures aux pertes subies par la France lors de la célèbre bataille de Dien Bien Phu, au Vietnam, qui étaient de 2 392 morts. Malgré les moyens militaires colossaux qui ont été engagés, la revue des armées françaises reconnaissait que pas moins de 22 000 moudjahed dans les maquis ont échappés à ce rouleau compresseur. Les actions de l'ALN vont reprendre de plus belle en 1961. Cette année- là, les archives de la société EGA (Electricité et gaz d'Alger) avaient recensé 1351 actes de sabotages de pylônes et supports de distribution et 25 postes de transformation endommagés à travers le territoire algérien. Cinq agents de l'Ega trouveront la mort suite à ces opérations. La même situation prévalait dans les chemins de fer. Pas moins de cinq actes de sabotages sont recensés quotidiennement par les chemins de fer algériens, société qui gère le réseau, de 1954 à 1961. Pas moins de 48 soldats français chargés de la sécurité des trains périront. Les actes de sabotages et les attentats en 1961 sont revenus au même niveau que ceux de l'année 1956, soit à l'apogée de la puissance du Fln/Aln. Durant le plan Challe (1959-1961) le nombre de harkis sera multiplié par trois. Il passera de 70 000 début 1959 à 210 000 début 1961. De ce total, 3.000 perdirent la vie en opérations contre leurs frères « moudjahids ». Après les accords d'Evian, De Gaulle va abandonner la majorité des harkis et leurs familles à la colère des Algériens qui ont subis leurs sévices. Selon les chiffres avancés par plusieurs sources françaises, on parle de la mort de 25 000 à 75 000 harkis après leur abandon par le gouvernement français. L'écart est un peu grand pour avoir un chiffre proche de la réalité concernant les harkis massacrés après le 19 mars 1962. Entre juin et septembre 1962, l'Armée française arrive tout de même à rapatrier 66 000 harkis et leurs familles. Ils seront parqués dans des camps d'internement en France dans des conditions déplorables. Utilisant la misère de la majorité des Algériens vivant dans le monde rural, qui s'est aggravée en raison de la Guerre déclenchée le 1er novembre 1954, De Gaulle va proposer 750 francs anciens par jour à tous ceux qui s'allient à l'Armée française pour combattre les militants et les combattants du FLN/ALN. L'analyse des faits historiques nous renseignent sur le plan de De Gaule qui visait un double objectif ; Mettre le Fln sous pression pour qu'il dépose les armes dans le cadre de « la paix des braves » et créer une troisième force en s'appuyant sur les harkis pour aboutir à un désengagement de la France tout en préservant les biens et les privilèges du million de colons et maintenir la future Algérie indépendante sous influence politique et économique française. Des centaines de milliers d'Algériens manifestent à Alger et dans les autres villes du pays pour demander l'indépendance Malgré cette mobilisation militaire impressionnante les combattants de l'ALN n'ont pas déposés les armes et la Révolution algérienne n'était pas seulement dans les maquis. Le 11 décembre 1960, des centaines de milliers d'Algériens manifestent à Alger et dans les autres villes du pays pour demander l'indépendance. Ces manifestations viennent démentir la propagande menée par les officiers français du renseignement et de la guerre psychologique qui assurait que le FLN et l'ALN ont été vaincues. Quatre mois après les manifestations du 11 décembre, soit en avril 1961, De Gaule met un terme à l'opération Challe qui avait duré un peu plus de deux ans. L'Armée française est épuisée. Malgré les résultats obtenus contre les maquis du FLN, cette armée devait maintenir le quadrillage permanent de 7 500 points sensibles à travers l'Algérie pour limiter une forte reprise de la guérilla dans les zones rurales et en milieu urbain. Le coût de la guerre a atteint des niveaux insupportables pour l'économie française. Déjà et dès 1957, le Franc a été dévalué de 20%, 500 milliards de francs supplémentaires ont été mis en circulation et 400 milliards de nouveaux impôts ont été imposés aux Français de métropole. Selon la revue ''Chemin de mémoire'' la Guerre d'Algérie a coûté l'équivalent de 75 milliards d'euros, valeur de 2022. Soit une moyenne annuelle de 10 milliards d'euros. Avant fin 1960, la Guerre d'Algérie et la pression qu'elle a exercée sur le plan international, va entraîner l'effondrement de l'Empire colonial français. Quatorze pays de l'Afrique française subsaharienne vont accéder à l'indépendance Janvier 1961, De Gaule décide de sortir du bourbier algérien. Il organise un référendum pour l'autodétermination. Que ce soit en France ou en Algérie, la majorité des électeurs va voter pour l'autodétermination. Encore une fois, les généraux de l'Armée française vont soutenir les inconditionnels de l'Algérie française en menant un putsch le 22 avril 1961. En dehors des parachutistes et de la légion étrangère, presque la totalité d'un demi-million de soldats français stationnés en Algérie ne rejoindra pas les putschistes. Des accords qui mettront fin à 132 ans de colonisation Les soldats veulent rentrer chez eux, en France. Le putsch est un échec. Les généraux Salan, Jouhaud et les colonels Argoud, Godard, Gardes et le capitaine Sergent rejoignent l'OAS. Ces généraux, qui, quelques mois auparavant déclaraient, à qui veut les croire, que leur combat vise à détruire les «terroristes» du FLN, deviendront les chefs d'une terrible organisation terroriste, l'OAS, qui va perpétrer les pires crimes contre les civils en Algérie de mars à juillet 1962. Une fois les putschistes neutralisés, De Gaulle accepte de négocier avec les représentants du Gouvernement provisoire de la révolution algérienne (GPRA) au mois de mai 1961. Des négociations qui aboutiront à un accord de cessez-le-feu le 19 mars 1962. Des accords qui mettront fin à 132 ans de colonisation et à sept ans et sept mois de guerre, en Algérie. Au mois de juillet 1962 et dans un chaos indescriptibles des centaines de milliers d'Européens, de harkis et de soldats français vont quitter l'Algérie par voies maritime et aérienne. Après 132 ans du débarquement à Sidi Fredj et la prise d'Alger, l'Armée française sort vaincue et déshonorée d'Algérie. En pratiquant massivement la torture et les exécutions sommaires pendant la Guerre d'Algérie l'Armée française a délibérément violé les Conventions de Genève qui instaurent des règles d'humanité qui ont pour but le respect de l'être humain et de sa dignité en temps de conflits. Pour éviter des poursuites judiciaires contre les militaires auteurs de crimes de guerre, deux Décrets et cinq ordonnances seront promulgués par le gouvernement français dès avril 1962. Au mois de décembre 1964, De Gaulle promulgue une loi d'amnésie pénale. Des lois qui vont empêcher l'aboutissement de la plainte déposée par la famille de Maurice Audin, un militant de la cause algérienne, arrêté, puis torturé par les parachutistes de Bigeard avant de le faire disparaître. Aucune poursuite contre les auteurs des crimes de guerre commis en Algérie par des militaires français ne pouvait aboutir. Malgré l'indépendance et le départ des Européens, les activistes de l'OAS et les partisans de l'Algérie française vont poursuivre «leur guerre» contre les Algériens en France. A la fin des années soixante et début des années soixante dix, une vague d'attentats racistes va viser les émigrés algériens installés en France. La majorité de ces émigrés ont été ramenés en Hexagone par l'Empire coloniale français pour participer à la première et à la Seconde guerre mondiale et pour travailler dans les mines, les usines et les chantiers qui manquaient cruellement de main d'œuvre tout au long du début du 20e siècle. Cette vague raciste atteindra son paroxysme le 14 décembre 1974. Ce jour-là, un attentat à la bombe vise le consulat d'Algérie à Marseille faisant 4 morts et 12 blesses. L'attentat sera revendiqué par d'anciens membres de l'OAS et des nostalgiques de l'Algérie française. Certains n'hésitent pas à pointer du doigt la responsabilité du Front National, un parti crée par Jean-Marie Le Pen, un ancien officier de l'Armée française ayant participé à la Guerre d'Indochine et d'Algérie dans cet attentat terroriste. C'est en 1972, que Jean-Marie Le Pen, Roger Holeindre, membre de l'OAS et plusieurs autres sympathisants néonazis et nostalgiques de l'Algérie française vont créer le Front National. 62 ans après l'indépendance, l'extrême droite française, dont font partie le Rassemblement National héritier du Front National et le parti Reconquête d'Eric Zemmour, poursuive leur guerre visant à déstabiliser l'Algérie. Un pays devenu un élément clé du programme politique des partis de l'extrême droite française. Sans aucun doute, une partie de la classe politique française n'a pas encore digéré la défaite de la France coloniale en Algérie.