La célébration de l'événement historique que sont les grandioses manifestations populaires pour l'indépendance, qui ont culminé le 11 décembre 1960 à Alger, intervient, cette année, dans un contexte où les plans de reconquête coloniale des puissances occidentales se révèlent chaque jour plus nettement.Des observateurs ne manquent pas d'insister sur la perception du 11 décembre 1960, non pas comme une simple date à commémorer, mais comme une leçon historique majeure – que doivent assimiler les jeunes générations – témoignant du rôle décisif du peuple algérien dans la lutte pour l'indépendance. Les manifestations qui ont commencé le 9 décembre 1960 à Aïn Témouchent, ont fait avorter les buts de la visite du général De Gaule dans cette ville. Dans une enquête sur les manifestations populaires du 11 décembre 1960, réalisé en 7 ans, aboutissant à un livre, un site (unseulheroslepeuple.org) et un film, tous ayant pour titre : «Un seul héros le peuple», le sociologue français, Mathieu Rigouste, a montré comment «le soulèvement général des classes populaires algériennes en décembre 1960, pendant près de trois semaines à travers toutes les villes du pays, a forcé le général De Gaulle et l'Etat français à abandonner le projet néocolonial de ''troisième voie'' nommé ''Algérie algérienne''». Il relève qu'après la «bataille d'Alger» en 1957, la France «prétendait avoir anéanti toute opposition en Algérie. Mais, trois ans après, «de gigantesques manifestations du peuple algérien ont débordé la répression militaire française et changé le cours de la révolution algérienne». Mathieu Rigouste a souligné que les manifestations populaires du 11 décembre 1960, qui ont éclaté dans plusieurs villes d'Algérie, ont contraint la France coloniale et les Nations unies à reconnaître le droit à l'autodétermination du peuple algérien, lui permettant ainsi d'arracher l'indépendance en 1962. Les échos parvenus à l'ONU où se tenait une session avaient permis aux délégués algériens et aux pays amis soutenant la cause algérienne d'imposer l'examen du «dossier» algérien et l'adoption, une semaine après, soit le 19 décembre 1960, d'une résolution exhortant la puissance coloniale à s'asseoir autour de la table des négociations pour le recouvrement par le peuple algérien de sa dignité et de sa souveraineté nationale. Le contraste est évident entre les manifestations du 11 décembre 1960 et la mascarade qui les avait précédées, le 13 mai 1958, quand les activistes» Pieds noirs de «l'Algérie française» ont occupé, à Alger, le bâtiment qui abritait le Gouvernement général (le GG, appelé ministère de l'Algérie, pouvoir exécutif de l'administration coloniale) avec l'aide des parachutistes et des généraux de l'armée française qui leur étaient favorables. L'agitation des extrémistes Pieds-noirs, entraînant la masse de leur communauté, a duré plusieurs semaines, sur fond d'actions militaires de l'Armée de libération nationale (ALN) et sur fond, également, de procès des combattants de l'ALN et du FLN qui se succédaient chaque jour au tribunal militaire des Forces armées françaises. Mais, les journaux colonialistes édités à Alger (Journal d'Alger, Dépêche Quotidienne d'Algérie et Echo d'Alger) avaient mis le paquet sur la désinformation, en gonflant artificiellement la participation des «Musulmans» au rassemblement des ultras de l'Algérie française, et en présentant une image grossie d'une prétendue «fraternisation». C'était le début d'une grande manœuvre visant à semer l'illusion qu'il y aurait une alternative au recouvrement de la souveraineté nationale par les Algériens, rendu inéluctable et imminent par la lutte armée pour l'indépendance lancée le 1er novembre 1954. Les manifestations du 11 décembre 1960 ont ouvert les yeux à tous sur la réalité de l'engagement du peuple algérien contre le colonialisme français, ne laissant aucun doute sur son choix pour l'indépendance.