Le théâtre régional de Béjaïa est un édifice constamment en mouvement, il change souvent de main et les directions lui succèdent mais sa nature, son talent lui sont éternellement acquis. De Bouguermouh qui l'a mis dans la tour de lancement, jusqu'à Djamel Abdelli qui arrive en 90 à Fetmouche son actuel directeur, la production s'est démultipliée et la qualité également. Seul point noir, ces éternels travaux entrepris qui tardent à être finalisés sont certes handicapants, mais ne semblent pas les gêner outremesure. Depuis leur lancemen pour une rénovation entière (coulisses, scène, salle…) les comédiens y travaillent n'importe où et d'arrache-pied pour montrer de nouveaux spectacles. Ettaqrir (le rapport), Uzzi n'tayri (les gênets de l'amour), enfin Akin y labhar (de l'autre côté de la mer) les toutes récentes productions notamment les deux dernières réalisées en collaboration avec un espace qui lui est voisin, mais sollicité pour la première fois : le conservatoire de Béjaïa et les amis (Ahbab), cheikh Sadek El-Bejaoui. Si ces toutes dernières productions appellent au concours du conservatoire connu pour y être un espace de chant c'est justement pour leur côté comédie musicale. Grâce à l'apport de deux hommes, Bazou et Abdelli, le TRB est en train d'effectuer une mue, et d'utiliser ses potentialités à bon escient. Si Uzu n'tayri est une véritable légende qui revisite l'amour, le chagrin, l'espoir et la douleur brillamment interprété, le tout dernier spectacle Akin Ilbahir est un hymne à l'éternel exil et à la fuite du pays… à tout prix. Un spectacle qui est une œuvre collective dans sa mise en scène avec la touche de Bouaziz dans la scénographie. Interprété par Kaouane, Kaci, Djouhra, Mounia, Souhila, des artistes doués de grands talents aux voix ténors et mélodieuses, le thème de l'exil n'est que le prétexte apparent car le spectre de la pièce n'est autre que ce phénomène nouveau de «Harraga» qui ressurgit. Nombreux grands chanteurs ont été revisités et leurs textes repris, Slimane Azem, Dahmane El-Harrachi, Lilli Boniche, Yahyathène, El Hasnaoui. Une trentaine de chansons réadaptées aux accords nouveaux ont accompagné ce spectacle époustoufflant, où les lumières de Bouzera ont fait le reste d'une soirée hors du temps. Une soirée animée en marge de la semaine culturelle de la wilaya de Relizane, à la Maison de la culture face à un public venu en grand nombre pour aller et revenir d'une rive à l'autre de la Méditerranée. Des musiciens installés en bas de la scène ont accompagné les interprètes sur scène, une interprétation juste, sans faute animée par Kati, Zidane sous la direction de l'éternel jeune Bazou. Le spectacle est également attendu pour la mi-novembre à la Maison de la Culture de Béjaïa autant qu'Uzzu.