Le comité de sauvegarde du Parc national d'El Kala (PNEK) maintient sa mobilisation contre le passage d'un tronçon de 17,5 km de l'autoroute Est-Ouest à l'intérieur de ce sanctuaire de la nature, théoriquement protégé par la loi algérienne. La pétition lancée par le comité a été signée par quelque 20 000 personnes. Elle appelle les autorités à choisir, pour ce tronçon, un tracé respectueux de l'environnement et en conformité avec les textes juridiques qui régissent le PNEK. On sait que, malgré cette protestation, les écologistes ont eu la désagréable surprise d'apprendre, au début de cette année, que les premiers bulldozers étaient entrés dans le PNEK et avaient commencé à remuer la terre, en violation du statut officiel de ce territoire qui en fait une aire protégée. Il s'agissait de travaux de défrichement et de terrassement de l'assiette. Les défenseurs du PNEK ne se sont pas découragés pour autant, «le défrichement du tronçon est terminé mais tout reste possible tant que les constructions n'ont pas été entamées et….achevées», peut-on lire dans leur appel diffusé au printemps dernier. En riposte à la protestation des écologistes, au lieu de contourner le PNEK, en changeant carrément le tracé de cette portion, les responsables de l'autoroute Est-Ouest ont cherché plutôt à contourner le problème, en créant – «pour rattraper les dégâts» - un observatoire dont le fondement légal est inconnu. Les incertitudes sur la volonté des autorités tunisiennes de prolonger l'autoroute par la partie sur leur territoire et les informations selon lesquelles ces mêmes autorités n'ont pas, dans tous les cas, l'intention de porter atteinte à leurs aires protégées, en y faisant passer l'autoroute, devraient inciter les responsables algériens à revoir le tracé qui passe par le PNEK. Les animateurs du comité de sauvegarde du PNEK ne manquent pas de souligner, à chaque occasion, que plus personne dans le monde ne fait passer une autoroute par une aire protégée. Pour rappel, le PNEK, sur la côte est-algérienne, est un territoire classé de près 80 000 hectares (800 km2), renfermant plusieurs écosystèmes originaux, «un réservoir de la biodiversité de la région méditerranéenne elle-même considérée comme un cas à part à la surface de la planète pour être de faible étendue mais à l'origine des principales espèces cultivées aujourd'hui pour l'alimentation et la santé de l'humanité», selon un de ses anciens directeurs. La liste des espèces que le PNEK abrite est impressionnante : 850 espèces végétales, le tiers de la flore d'Afrique du Nord, 37 espèces de mammifères dont 2 chiroptères et l'hypothétique phoque moine, 21 rapaces nicheurs dont l'aigle pêcheur et le faucon d'Eléonore, 70 espèces oiseaux d'eau dont le fuligule nyroca ou l'érismature à tête blanche, 9 oiseaux marins, une centaine de passereaux, des centaines de fleurs, d'orchidées, le nénuphar blanc, etc. Avec ses nombreuses zones humides (lacs, étangs, marécages, sols détrempés, aulnaies…), le PNEK qui offre des sites d'hivernage mais aussi de nidification aux oiseaux migrateurs, est, souligne son ancien directeur, «une étape vitale dans la grande voie de migration ente l'Europe occidentale et l'Afrique» C'est un tel joyau que les bulldozers agressent pour étaler le bitume et ouvrir le passage aux camions de marchandises roulant au diesel et polluant l'atmosphère.