Intérêt accru pour l'action participative    Le ministère de la Culture et des Arts remporte le prix du «Meilleur pavillon»    Affluence notable des visiteurs au Salon international de l'agriculture et de la production végétale    L'Algérie décroche la part du lion des contrats signés    La communauté internationale appelée à freiner l'escalade irresponsable de l'entité sioniste    Le Parlement européen demande la reconnaissance de l'Etat de Palestine    Manifestation de masse pour la Palestine au Mexique menée par un artiste de renommée mondiale    Cameroun : Les supporters des Indomptables inquiets pour la qualification au Mondial    L'international Salah Assad à «Compétition» : «Ne pas céder à la pression, optimiser la concentration sur l'objectif final»    Lancement de la formation du 3e groupe pour l'obtention de la licence CAF    La direction des transports invite les transporteurs à se conformer à la réglementation    Plus de 1.000 bouteilles de spiritueux saisies    Le ministre de l'Education nationale en visite de travail et d'inspection    Batna accueille la 5e édition    Appel à renforcer les réseaux de distribution du livre africain    La syndicratie toujours en embuscade pour torpiller la lutte ouvrière    Constantine: le Centre de télé-conduite des réseaux de distribution d'électricité, un levier stratégique pour améliorer la qualité de service    Tenue à Alger de la session ordinaire du comité central du PT    Forum mondial des jeunes parlementaires: l'APN souligne à Lima l'engagement de l'Algérie à renforcer la participation de la femme à la vie politique    APN: une délégation du groupe d'amitié parlementaire Algérie-Biélorussie examine avec ses homologues les moyens de renforcer la coopération bilatérale    L'agression sioniste contre le Qatar pourrait ouvrir "un chapitre dangereux" dans la région    ONPO: mise en garde contre des pages électroniques diffusant de fausses informations et offrant des services fictifs    CSJ: lancement à Alger des activités du camp de jeunes destiné aux personnes aux besoins spécifiques    Les Parlements arabe et africain condamnent l'agression sioniste contre le Qatar    Al-Aqsa: près de 40 mille Palestiniens accomplissent la prière du vendredi malgré les restrictions sionistes    Création du Fonds de financement des start-up: une initiative qui consolide le leadership de l'Algérie sur le continent    Clôture à Alger des travaux de l'atelier de formation international en coopération avec le Fonds pour le patrimoine mondial africain    L'artiste plasticien Farid Izemmour expose à Alger "Traces et Dialogues : chronologie"    Batna: les ruines de la prison pour femmes de Tifelfel rappellent les atrocités du colonialisme français    Ligue 1 Mobilis: MB Rouissat ramène un précieux point de Mostaganem    Une délégation chinoise en visite dans plusieurs services de la Protection civile à Alger    Ouverture lundi de la session parlementaire ordinaire 2025-2026    Les campagnes de désinformation ne freineront pas la volonté de l'Algérie de protéger sa jeunesse    Hamlaoui préside une rencontre interactive à Aïn Defla    Un tournoi vendredi en mémoire d'Abderrahmane Mehdaoui au stade Chahid "Mouloud Zerrouki'' des Eucalyptus    Gymnastique : l'Algérienne Nemour engagée dans trois grandes compétitions en cette fin d'année    Programme TV - match du mercredi 29 août 2025    Programme du mercredi 27 août 2025    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Une autre v?rit
Reporter de guerre
Publié dans La Nouvelle République le 25 - 01 - 2009

Raconter des histoires, rencontrer des gens, rapporter une vision des événements, découvrir de nouvelles cultures, aimer son prochain, être curieux : autant d'éléments indispensables pour devenir un bon reporter de guerre. Depuis Albert Londres, pionnier du genre, qui estimait que le rôle du journaliste grand reporter «n'est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort», mais «de porter la plume dans la plaie», le métier a évolué au fil des siècles, au détriment, parfois, d'un traitement complet des conflits.
Nostalgiquement vôtre…
Ils s'appelaient Albert Londres, Joseph Kessel ou encore Lucien Bodard. Héros d'un genre journalistique en perdition, ils maniaient la plume d'après leur regard aiguisé, leurs rencontres insolites, leurs voyages au long cours. Mi-baroudeur, mi-aristocrate, la figure du grand reporter, jouant sa vie pour l'information, est devenue mythique. «Dans l'imaginaire du métier, le reportage avait quelque chose d'exotique et de tragique, d'héroïque et de lyrique» (1), précisent Philippe Cohen et Elisabeth Lévy. Clope au bec, flasque d'alcool en poche, peau tannée, ils ne ressemblaient pas aux journalistes à gilets pare-balles envoyés, aujourd'hui, dans les zones sécurisées pour traiter les conflits. Il y a encore quelques années, marcher dans leurs traces était un honneur. «On pouvait avoir la chance de fréquenter les hôtels (…) où ils avaient trouvé l'inspiration, pris des cuites et couru les filles, comme l'Oloffson de Port-au-Prince immortalisé par Graham Greene (…).» (2) Pour définir son métier, Albert Londres disait : «Un vrai reporter doit savoir d'abord écouter et regarder. Celui qui sait seulement écrire ne sera jamais qu'un littérateur.» (3). A l'époque, la frontière entre réalité et fiction est mince. Comme l'écrivait Elle-Joseph Bois, sa rédactrice en chef, Albert Londres avait «moins le souci de l'exactitude que celui de la vérité» (4). Une manière de transmettre, partagée par ses contemporains, derniers chefs de file d'un mouvement journalistique en berne. Ainsi, Lucien Bodard expliquant que le métier de journaliste «consistait à voir et décrire ; à fabriquer des histoires» (5). Montrer ne leur suffisait pas, il fallait aussi que le lecteur ressente et vive les choses, en leur transmettant un message.
Le temps, c'est de l'argent
Malheureusement, si le mythe est resté, son modèle s'est enfui. Aujourd'hui, les reporters de guerre ne travaillent plus dans le même esprit. Ils n'en sont pas entièrement responsables : leurs rédactions ne débloquent plus les mêmes moyens. Partir en reportage, s'il n'y a pas d'actualité chaude, n'intéresse plus vraiment les rédacteurs en chef. «»La première question que l'on me pose quand je propose un sujet est : combien ça va coûter ?», se désole Slimane Zeghidour, grand reporter à TV5. Pire, on me demande parfois de présenter un devis.» (6) Mais le problème ne date pas d'hier. Déjà, en 1962, lors d'une interview télévisée, Joseph Kessel notait ce fait. Vingt-cinq ans plus tôt, pour son reportage sur les Traces des marchands d'esclaves, sa rédaction dépensait 1 million de francs pour une expédition de plus de 6 mois. «Il y avait dans la presse française des possibilités matérielles qui n'existent plus maintenant» (7), précise Joseph Kessel. Plusieurs mois sur le terrain, les reporters avaient le temps de s'immerger, d'observer, de prendre du recul. Albert Londres écrira à ce propos, dans une lettre adressée à ses parents : «Un correspondant de guerre n'est pas un pisseur de copies. (…) Notre rôle consiste à être là pour le grand jour. Ce grand jour se fait parfois attendre un mois.» (8). Age d'or du grand reportage, la première moitié du XXe siècle offrait du temps et de l'argent à ses «vagabonds internationaux», ses «flâneurs salariés» (9), maniant la plume et l'esprit critique.
Embarquement immédiat
Désormais, face aux risques encourus, aux éventuelles pressions du Quai d'Orsay pour ne pas couvrir certains conflits, jugés trop dangereux, les rédactions choisissent parfois la «paresse» : «envoyer le journaliste embarqué - «embeded» - ou ne pas l'envoyer» (10). Invité par l'armée, il reste avec elle, qui le loge, le nourrit et lui garantit sa sécurité.
Mais le journaliste doit rester là où se trouve sa protectrice, et ne peut s'éloigner du groupe. Libre à lui de réaliser des reportages sur l'armée, comme certains l'ont déjà fait. Sinon, il devra se contenter de récupérer les informations distribuées par cette dernière. En Irak, on parle de la «zone verte» pour signifier la zone protégée. Mais les enfants légitimes d'Albert Londres ne l'entendent pas de cette oreille : «Le journaliste embarqué doit garder les yeux ouverts. Il doit comprendre que c'est intéressant d'être embarqué, mais pas suffisant», explique Anne Nivat, journaliste indépendante.
Vive la liberté
Ces journalistes indépendants veulent apporter une autre version des faits. Ils couvrent les conflits qui les intéressent, restent sur place le temps qu'ils souhaitent, et privilégient le travail en solitaire. Ils ne veulent pas rester dans un hôtel à attendre des conférences : «le plus important, c'est le terrain», insiste Anne Nivat. Sa méthode de travail ? Devenir une autochtone, loger chez l'habitant, utiliser un réseau de contacts de confiance. Néanmoins, ces journalistes ne paient pas le reportage de leur poche. En général, ils partent avec une «commande» d'un journal, mais les débutants, parfois, n'en n'ont pas. Ils avancent alors les frais et se feront rembourser ensuite. Hormis pour les questions financières, ces journalistes ne dépendent pas des rédactions, ils ne sont pas obligés de rentrer à leur demande par exemple, et, par conséquent, n'ont pas de comptes à rendre.
Certaines signatures, affiliées à une rédaction, parviennent aussi, parfois, à s'éloigner des zones protégées. Patrice Claude, par exemple, journaliste au Monde, explique n'avoir jamais voulu résider dans la «zone verte» de Baghdad. «Je suis toujours descendu dans des hôtels de la ville, dite «zone rouge» par l'armée américaine» (11), explique-t-il. Pourquoi ? La réponse est immédiate et résume la pensée de ces quelques grands reporters actuels : «Ce ne sont pas les guerres proprement dites qui m'attirent, ce sont les sujets autour ou derrière qui m'intéressent.».
Prime de risque
Le danger, réalité d'un territoire en guerre, ne rebute pas ces journalistes. Anne Nivat s'énerve : «Il ne faut pas croire qu'il y a du danger partout, tout le temps, en permanence.» Pour Patrice Claude : «Les risques sont omniprésents, quand bien même la situation sécuritaire s'est beaucoup améliorée depuis l'été 2007. L'étranger, l'Occidental, est soumis aux risques auxquels sont soumis tous les Irakiens : voitures piégées, échanges de tirs, bombardements et «bavures» militaires…» Mais ce ne sont pas là les seuls dangers. Les enlèvements ont vu le jour au début des années 1980 lors de la guerre du Liban (12), juteuses manœuvres pour des gangs «politiques ou crapuleux» (11). Depuis ces dernières années, le nombre de décès de journalistes a réellement augmenté. «En Irak, 42 journalistes et travailleurs des médias (…) ont perdu la vie entre le 20 mars 2003 et le 7 mai 2004», chiffre Olivier Da Lage. Enfin, la nationalité, voire la religion des journalistes, peut également être un vecteur de risques. Le cas Daniel Pearl demeure un exemple flagrant. Face à ces menaces réelles, les chartes et autres résolutions tentent de sécuriser au maximum les reporters (13). La Fédération internationale des journalistes est, ainsi, à l'origine de la création, en novembre 2002, de l'Institut international de la sécurité de l'information (INSI). Mais ces prérogatives profitent davantage aux journalistes affiliés à une rédaction. Pour le freelance, tout est différent : sa liberté a un prix.
Ad Vitam…
Reste que les informations passent, les magazines se lisent et se jettent, les reportages télévisés se résument à une poignée de secondes, les émissions radiophoniques disparaissent dans le bruit alentour. Pour tenter de pérenniser leurs témoignages, certains journalistes écrivent des livres. A côté de leurs articles, ils couchent plus longuement leur quotidien dans les pays en guerre, pour laisser une trace. Parce que les livres restent. «C'est ce que je me disais en 2000.
Aujourd'hui, ils restent de moins en moins. (…) La durée d'un livre est de plus en plus courte», se désole Anne Nivat. L'existence physique de l'ouvrage résiste, cependant, même s'il ne trône plus en tête de gondole.
On retrouve alors la conscience du grand reporter d'antan, toujours à la frontière de l'écrivain et du journaliste. Albert Londres voulait être poète et laisse derrière lui de nombreux romans forts et engagés (Au bagne en 1924, Terre d'ébène en 1929, Pêcheurs de perles en 1931) ; Kessel, journaliste globe-trotter, s'est inscrit parmi les plus grands écrivains de sa génération… Plus que des reporters, ces hommes de la littérature et du journalisme sont tout simplement devenus des passeurs.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.