Une des insuffisances constatées est particulièrement montrée du doigt en raison du danger omniprésent qu'elle représente. Il s'agit de l'impressionnant carrefour du centre-ville, situé au lieudit Cosider, où convergent quatre grandes artères pourvues, chacune, de deux voies. Un carrefour situé en plein cœur de cette localité futuriste, par ailleurs bien structurée, pourvue de larges avenues et cernée de superbes tours d'habitation, d'élégants immeubles et de sièges d'organismes étatiques et privés. Un carrefour dépourvu de rond-point, au centre duquel il est facile de se représenter une immense circonférence d'une centaine de mètres de diamètre et dont la traversée, aussi bien par les véhicules automobiles que par les piétons, relève souvent du parcours du combattant. Khelifa Sedrati, un père de famille installé à Ali-Mendjeli depuis 7 ans, assure qu'il lui arrive de patienter «jusqu'à 10 minutes» pour oser mettre un pied sur ce carrefour et passer de l'autre côté du boulevard. Aucune signalisation horizontale, hormis un plaque de «stop» que personne ne respecte, pas le moindre ralentisseur et, surtout, aucun passage protégé pour les piétons, singularisent cet impressionnant carrefour que les automobilistes traversent le plus souvent en trombe. Carrefour stratégique, «cauchemar continu» Pour Mme Farida S., fonctionnaire des impôts à Aïn Smara, à une poignée de kilomètres de la nouvelle ville, la nécessité de construire un rond-point s'impose pour faciliter la circulation à ce niveau de la ville, à défaut de feux tricolores, car soutient-elle, cette intersection est un «cauchemar continu». «Je suis au supplice plusieurs fois par jour, chaque fois que c'est l'heure pour l'un de mes 4 enfants d'aller à l'école ou d'en rentrer», se plaint encore la dame dont l'angoisse est d'autant plus vive que les accidents, du petit tamponnage à la collision spectaculaire, sont légion en ces lieux. Il ne se passe pas un jour en effet sans qu'un long crissement de pneus, malheureusement souvent suivi par le choc des tôles, ne précipite tous les riverains à leurs balcons. Placé sur le tracé de plusieurs cités urbaines, le carrefour central de la nouvelle ville est un passage obligé pour tous les véhicules se rendant à Aïn Smara, ainsi que pour les milliers de personnes qui empruntent le transport public pour aller travailler chaque matin à Constantine ou dans l'un des quartiers périphériques de Ali-Mendjeli, qui abrite une bonne douzaine de sièges d'administrations ou d'entreprises, ou plus simplement pour les nombreux quidams obligés de traverser le carrefour pour rejoindre leurs domiciles dans différentes cités d'habitation. Mme Soumeya B., informaticienne à la direction de l'AADL, à quelques mètres en contrebas de ce carrefour, estime que «se déplacer à la nouvelle ville n'est pas chose aisée», surtout pour les nombreux enfants qui risquent de payer de leur vie le simple fait de faire des emplettes. Morte pour un sachet de lait ! Elle explique que le manque de commerces aux abords des cités nouvellement construites et habitées depuis peu, fait que les mères de famille chargent leur progéniture d'aller chercher telle ou telle denrée nécessaire de l'autre côté du carrefour. «La fille de mon voisin de palier est morte pour un sachet de lait!», résume-t-elle, soudain tétanisée. Sur cet axe de l'avenue de l'ALN, les multiples accidents dont passants, commerçants et chauffeurs taxi sont régulièrement témoins, sont «aussi fréquents qu'ahurissants», s'indigne un jeune homme de 35 ans, Mourad Kaddouri, gérant d'une pizzeria. «A chaque coup de frein sec, on craint le pire», dira-t-il affirmant que malgré ces 5 années de présence dans ce lieu, il n'arrive toujours pas à s'habituer aux crissements des roues sur la chaussée, lui qui a été le témoin, de par l'emplacement de son commerce, à une vingtaine d'accidents au moins. Abdelmadjid Lazreg, chauffeur de taxi, se demande, lui, si l'on peut imaginer qu'une ville abritant 3 lycées, 8 CEM et 13 groupes scolaires, en plus des autres écoles en construction, puisse souffrir d'une telle «indigence» en matière de signalisation routière. Pas le moindre panneau pour gérer le flux de véhicules qui convergent incessamment vers cette ville en chantier, dit-il, notamment les poids lourds qui transportent les agrégats des carrières de Ain Smara, les véhicules de transport en commun dont les arrêts longent le boulevard principal et qui obligent les gens à de véritables slaloms pour traverser. Les sœurs Khadija et Ghania Nasrallah, accompagnées de leur amie Nadjoua, toutes trois collégiennes, se rappellent encore leurs voisins, les jumeaux Hassène et Hussein, dont la moto a été violemment fauchée par un semi-remorque descendant à contresens l'avenue de l'ALN, immense artère centrale s'il en est. Depuis ce jour, jure la benjamine du trio, «nous traversons la main dans la main en priant le ciel d'être épargnées, ce qui ne nous a pas empêchées d'échapper plusieurs fois à des fous du volant». Contacté à ce propos, le chef de la daïra d'El Khroub, dont relève administrativement la nouvelle ville, fait savoir qu'une «enveloppe conséquente» a été mise en place pour la réalisation d'une signalisation routière. Mais il se trouve que l'inscription de cette opération salvatrice en est au stade des propositions par la commission de wilaya en charge des programmes d'aménagement urbain. En attendant, Khadija, Ghania, Nadjoua, Mourad et tous les autres ne peuvent que prendre leur mal en patience et continuer de jouer à «cache-cache» avec de nombreux chauffards dont le civisme n'est assurément pas le point fort et vient s'ajouter à une foule d'autres négligences. Et dire que l'on parle avec insistance ces jours-ci de respect du code de la route, le nouveau, et, plus précisément, de l'une de ses dispositions pertinentes qui prévoit de... verbaliser aussi les piétons lorsqu'ils sont jugés en infraction.