Cet hommage à la hauteur de l'homme a drainé une foule impressionnante. En effet, des familles entières se sont déplacées pour s'enivrer en l'espace d'une soirée du répertoire de Abdelkrim Dali. Le coup d'envoi de la soirée a été donné par la formation "El kortobia", dirigée par cheikh Boukli. En outre, les chanteurs Toufik Benghabrit et Taleb Bendiab Abdelhamid, se sont surpassés durant cette soirée en interprétant avec brio quelques extraits du riche répertoire hérité de feu Abdelkrim Dali. Il est à noter que cette halte commémorative a permis à une fourchette d'historiens, de musiciens et de chanteurs interprètes de participer à une table ronde dont le thème principal était axé sur la vie et l'oeuvre du maître incontesté de la chanson hawzi. Abdelkrim Dali est né à Tlemcen dans une famille de mélomanes dont le père était un "halwadji" à la swiqa. Ses prédispositions pour la musique apparaissent assez tôt. C'est d'ailleurs, cheikh Omar Bakhchi qui s'intéressa à lui et lui apprit les bases de la musique andalouse. Dés l'âge de 14 ans, il jouait du Tar et chantait, en soliste, les Istikhbars dans les fêtes et les mariages. Son goût pour la musique s'est développé en se frottant à certains grands maîtres tels que : Abdessalam Bensari, frère de cheikh Larbi, le cheikh Bendali Yahia, cheikh Boudalfa, Mustapha Brixi et le maître El Yaho Bensaïd (Ibého). Il apprit, en outre, à jouer à la mandoline, au violon et au ney . Il s'est intégra l'orchestre le plus renommé de l'époque, en l'occurrence, celui du cheikh Larbi Ben Sari où il interprétait les chansons d'Oum Kaltoum et d'Abdelwahab popularisées par les films. Abdelkrim Dali en ira ainsi jusqu'à ce que le fils du cheikh Larbi, Redouane, le remplace auprès de son père. C'est lors d'une tournée, Mahieddine découvrira ce jeune chanteur dont la voix faisait merveille dans l'orchestre de la grande chanteuse cheikhs Tetma, et qu'il intégrera à la partie concert de sa tournée. Dés lors, il sera connu des mélomanes des autres grandes villes d'Algérie, participant à toutes les fêtes qu'animera Tetma. En 1930 i1 enregistre un istikhbar Moual avec Nari Haîchat Tentfa et un autre Iraq, avec Kif Amali Ouhilti. Puis en 1938, aux côtés de cheikha Tetma qu'il accompagnait au violon et au luth, il enregistra une vingtaine de disques chez Algeriaphone, lesquels font l'objet de deux albums présentés par le Club du Disque Arabe. En 1950, il enregistra ElKawi, Amersouli, El Hadjam etNergheb EI Mouid. Ces différentes séries d'enregistrements firent de lui une des plus grandes personnalités du genre hawzi et classique sur tout le territoire algérien. En 1938, Mahieddine l'engage pour une grande tournée à travers l'Algérie, suivie d'une deuxième tournée en France à la veille de la guerre de 39. Dès la création, en 1940, de Radio Alger, Boudali Safir, alors directeur artistique de la station, le fit venir de Tlemcen pour participer aux concerts de musique andalouse que donnait cet orchestre. En 1952, Abdelkrim Dali s'intégra définitivement à cet orchestre comme joueur de luth, et s'installa avec toute sa famille a Alger. A l'orée de l'indépendance, il se lança dans la composition de chants patriotiques et religieux. En outre, il participa à toutes les semaines culturelles en Europe ou dans le monde arabe pour représenter l'école tlemcénienne de musique arabe. En 1965, on lui attribua une chaire au Conservatoire d'Alger. En 1971, Abdelkrim Dali est engagé par l'institut national de musique en qualité de conseiller pour la musique andalouse. Abdelkrim Dali enregistra toutes les Noubas suivant la tradition de Tlemcen. Pendant ses dernières années, il participera aussi à tous les festivals de musique andalouse en Algérie ou dans d'autres capitales du monde arabe; ce sera sa consolation car il n'avait pu participer au Congrès de la musique arabe tenu au Caire en 1932 où El Hadj Larbi Bensari avait préféré faire participer son fils Redouane, ce qui avait provoqué leur rupture. Durant ces mêmes années il créera une chorale à la radio diffusion algérienne avec laquelle il enregistrera toutes les parties chorales de la musique andalouse. Ses innombrables activités ne l'ont pas empêché d'enseigner la musique à ses propres enfants qui venaient renforcer les orchestres qu'il constituait à l'occasion des galas ou mariages qu'il animait. Deux ans avant sa mort, il a fait le pèlerinage à La Mecque et à son retour il a composé un grand poème symphonique sur des modes andalous, intitulé Rihla hidjazia. Cette dernière couronnera sa longue carrière artistique. La radiodiffusion algérienne a enregistré ce long poème où l'on retrouve toute la science, la finesse et la foi profonde de cet artiste accompli. Il décédera 21 février 1978 à Alger suite à une crise cardiaque et fut enterré au cimetière de Sidi Yahia.