La crise mondiale actuelle engendrera de nouvelles mutations économiques, monétaires et énergétiques entre 2015 et 2020 qui auront un impact sur l'économie algérienne, crise systémique qui sera d'une longue durée du fait des impacts mondiaux (interdépendance des économies) et, selon l'avis unanime des observateurs internationaux, jusqu'en 2013/2014 si les thérapeutiques appliquées s'avèrent efficaces, ce qui n'est pas évident car les fondamentaux de la crise sont toujours là, à savoir la dominance de la sphère financière sur la sphère réelle et les distorsions entre l'envolée des profits spéculatifs et la baisse du salaire réel comme en témoigne le taux de chômage élevé aux Etats-Unis et en Europe. Or, comme en 1986, courant 2008/2009, différents responsables politiques déclareront à la télévision officielle que la crise ne touche pas l'Algérie du fait de la non-connection avec le système financier mondial, comme s'il fallait s'en féliciter, de la non-convertibilité du dinar et de l'importance des réserves de changes. Ce que l'on oublie, c'est la baisse des cours des hydrocarbures, qui représente plus de 98 % des recettes en devises, le prix de cession du gaz représentant un tiers des recettes de l'Algérie, connaît une chute d'environ 40 % depuis une année (4/5 dollars le MBTU), avec l'entrée du gaz non conventionnel surtout aux Etats-Unis, posant la problématique de la rentabilité des deux nouveaux GNL (Arzew et Skikda), premier importateur les années passées, pouvant devenir exportateur net à l'horizon 2020, la bulle gazière risquant d'aller au-delà de 2014/2015 et surtout l'urgence d'une gestion active de nos réserves de changes, en majorité à l'extérieur au moment où le taux d'escompte des principales banques centrales occidentales et asiatiques tend vers zéro, donc un rendement faible, voire négatif pondéré par le taux d'inflation (plus de 80 % selon les propos du ministre des Finances algérien à l'APN) et à l'épuisement des ressources pétrolières et gazières dans moins de 30 années, un jeune de 5 ans aujourd'hui aura 35 ans et la situation serait comparable à celle de certains pays les plus pauvres d'Afrique si l'Algérie entre 2010 et 2020 n'aura pas préparé l'après h-pétrole. 5) Pour une plus grande visibilité et une gouvernance renouvelée Le constat à travers ce cheminement historique est que, durant cette période de transition difficile d'une économie étatisée à une économie de marché concurrentielle et l'Etat de droit, les réformes sont timidement entamées malgré des discours apparemment libéraux et moralisateurs que contredisent journellement les pratiques sociales. Les banques, lieu de distribution de la rente, continuent de fonctionner comme des guichets administratifs et, du fait des enjeux, les réformes souvent différées s'attaquent plus aux aspects techniques qu'organisationnels, alors qu'elles sont le moteur des réformes, la privatisation et le partenariat comme moyens d'investissement et de valeur ajoutée piétinent faute de cohérence et de transparence ; la facture alimentaire continue d'augmenter malgré le fameux programme agricole (PNDA) dont il conviendra de faire le bilan du fait de plusieurs de milliards de dollars de dépenses, la bureaucratie et la corruption continuent de sévir. Comme conséquence, résultat de la pratique de plusieurs décennies et non seulement de la période actuelle, nous assistons à des tensions à travers toutes les wilayas contre la hogra, la corruption, le mal-vivre d'une jeunesse, ce qui traduit l'impasse du système économique à générer une croissance hors hydrocarbures, seule condition d'atténuation des tensions sociales pour faire face à ce malaise social. Ne pouvant séparer la micro de la macro-gouvernance renvoyant à l'urgence et à la cohérence dans la politique socioéconomique évitant l'instabilité juridique, la question centrale qui se pose et qui devrait interpeller les plus hautes autorités algériennes est : pourquoi avec une dépense publique sans précédent depuis l'indépendance politique, les résultats sont si mitigés ? D'où l'urgence d'une quantification précise des capacités d'absorption de ces dépenses car tout divorce entre les objectifs et les moyens nationaux limités, dont la solution de facilité est le recours forcément comme entre 2004 et 2009 aux entreprises étrangères avec des réalisations clés en main limitant forcément l'accumulation du savoir-faire technologique et organisationnel interne sans compter les réévaluations permanentes ? Doit-on continuer dans cette trajectoire où les dépenses ne sont pas propositionnelles aux impacts avec ce paradoxe où le PIB moyen en 2007/2009 est presque égal aux réserves de change dues à des facteurs exogènes alors qu'il aurait dû être supérieur de 10 % comparé à des pays pour des dépenses montrant une allocation non optimale des ressources financières et donc un gaspillage dont la corruption est la face visible. Sans de nouveaux mécanismes de régulation et de mécanismes transparents de contrôle ne risque-t-on pas de doubler avec cette injection monétaire la corruption facteur de démobilisation ? D'une manière générale, la dépense publique a ses propres limites comme le montre la crise mondiale récente, et le problème fondamental stratégique qui se pose à l'Algérie réside en l'urgence d'une bonne gouvernance renouvelé, de l'épanouissement de l'entreprise concurrentielle nationale ou internationale et de son fondement, la valorisation du savoir, richesse bien plus importante que toutes les ressources d'hydrocarbures, comme le montre la réussite des pays émergents, et non l'unique dépense monétaire d'autant plus que les infrastructures ne sont qu'un moyen limité d'un développement durable. Aussi, l'objectif stratégique posant la question de la sécurité nationale est le passage d'une économie rentière à une économie productive en incluant les services qui, en ce XXIe siècle, ont un caractère de plus en plus marchand afin de construire une société basée sur plus de justice sociale, plus de libertés, une participation plus active de la femme à la gestion de la cité, un Etat de droit et la démocratie tenant compte tant de notre anthropologie culturelle que des nouvelles mutations mondiales. D'où l'importance, à mes yeux, de l'intégration maghrébine au sein de l'espace euro-méditerranéen, tout en n'oubliant pas le continent Afrique, en tenant compte du nouveau défi écologique et des énergies alternatives, en ce monde impitoyable où toute nation qui n'avance pas recule. Ce d'autant plus que le principal défi du XXIe siècle pour l'Algérie sera la maîtrise du temps. Cela signifie surtout que le pouvoir bienfaisant comme contrat politique implicite par les tenants du socialisme de la mamelle afin de légitimer l'échange d'une partie de la rente contre la soumission politique et qui efface tout esprit de citoyenneté active, ce pouvoir doit céder la place à un pouvoir juste, justicier et de justice conciliant efficacité économique et cohésion sociale. (Suite et fin)