Dans un pays où 85 % des échanges commerciaux s'effectuent par la route, l'impact risque de se faire sentir rapidement. Onze tunnels devaient être percés sur deux fois trois voies et 390 ouvrages d'art réalisés, dont 25 viaducs, pour joindre les frontières tunisienne, à l'est, et marocaine, à l'ouest, et réaliser l'autoroute transmaghrébine. Deux groupements chinois et japonais ont remporté le marché de l'autoroute est-ouest algérienne, le plus grand chantier de l'histoire du pays sur 1.216 km de bitumes. Le groupement CITIC-CRCC chinois avait des contrats de 5,2 milliards de dollars signés au printemps 2006 pour la réalisation des tronçons ouest (399 km) et centre (169 km). Mais il a été exigé par la suite une rallonge de 650 millions de dollars. Le groupement chinois a, en effet, proposé en mars 2007 une autre solution pour la chaussée que celle prévue dans le cahier des charges. Il s'agit du bitume modifié, largement utilisé dans les pays développés. Alors que, selon certains experts, dans les cas les plus limites «le recours à l'enrobé à module élevé provoque 10 à 15 % de coûts supplémentaires». Ainsi, le coût de réalisation de cet important projet autoroutier est estimé officiellement à plus de 11 milliards de dollars sans les annexes, établi suite à une analyse technique et financière réalisée par un bureau d'études canadien qui accompagne l'ANA, ayant été approuvé par la commission nationale des marchés publics. Sur les 827 milliards de dinars attribués au projet, 376 milliards sont destinés au lot Est, 192 milliards au lot Centre et 259 milliards au lot Ouest. Le coût du kilomètre provisoire à la fin de 2009 serait ainsi estimé à 9,95 millions d'euros (environ 955,2 millions de dinars) le kilomètre, sous réserve que n'existent pas d'autres réévaluations. Car, selon certains experts, l'autoroute est-ouest devrait coûter entre 13,5 et 15 milliards de dollars avec toutes les annexes contre une prévision initiale d'environ 7 milliards. Qu'en sera-t-il du nouveau programme alloué de l'ordre de 3.100 milliards de dinars (41 milliards de dollars) au titre du plan sectoriel quinquennal 2010-2014 devant distinguer la part devises et la part dinars ? En effet, à ce montant, il faudra ajouter les équipements annexes dont le programme d'équipement n'a reçu son budget qu'en 2010, et ce suite à de nombreux observateurs, en sus des automobilistes qui s'étonnaient de voir un tel mégaprojet livré parcimonieusement et, de surcroît, dépourvu d'équipements annexes comme les aires de repos, les stations-service et les stations de péage. «Ce programme est inscrit dans le cadre du programme quinquennal 2010-2014. Le programme d'équipement, en cours d'exécution, consiste en la réalisation de 42 stations-service, 76 aires de repos (motels, aires de stationnement, aires de jeux…), 57 gares de péage, 70 échangeurs, 22 postes de garde de la gendarmerie et autant de points de garde de la Protection civile. Dans un premier temps, un programme d'urgence confié à Naftal vise la réalisation de 14 stations-service sur les tronçons de l'autoroute livrés à la circulation. Une bonne partie, soit 70% des équipements, serait réceptionnée avant la fin de 2010. Il convient, pour se faire une idée des surcoûts, de donner quelques ratios internationaux. Sans compter qu'une route s'entretient, quelle sera le coût du péage sachant que, selon les responsables du ministère des Travaux publics, il sera pris en compte, dans le calcul du prix du péage, la qualité du service, les investissements consentis, le pouvoir d'achat des citoyens et le trajet moyen de circulation et qu'environ 80% du péage seront assumés par les poids lourds, il est intéressant de livrer quelques comparaisons internationales. Encore que, pour des comparaisons fiables, il faut éviter des comparaisons hasardeuses. En Algérie, tous les facteurs sont favorables. La main d'oeuvre est au moins dix fois moins chère qu'en Europe, il n'y a relativement presque pas d'intempéries, les matériaux utilisés en grande quantité, les agrégats (tuf, sable et graviers) ne coûtent pratiquement que leurs frais d'extraction et le concassage, le carburant est 5 à 7 fois moins cher, les loyers, l'électricité et le gaz aussi, les occupations temporaires de terrains qui coûtent des fortunes en Europe ne sont même pas payantes en Algérie lorsqu'ils relèvent du domaine public. Mais il y a des problèmes administratifs de procédures et autres (expropriations, démolitions, etc.) qui vont entraîner des retards. A titre d'exemple, le rapport officiel de la documentation française pour 2006 sur une route à deux voies donne une moyenne de 5,4 millions d'euros au kilomètre hors taxes, soit 540 millions de dinars au cours officiel actuel (1 euro égal environ 100 dinars). Cela n'étant qu'une moyenne car, en affinant, on constate, selon les régions, une moyenne fluctuant entre 3,6 et 6 millions d'euros hors taxes dans un environnement non contraint et une moyenne fluctuant entre 4,9 et 7,6 dans un environnement contraignants. Pour l'Europe, il existe, selon une intéressante étude de la direction des routes danoises réalisée en 2006, d'importantes disparités en moyenne générale, contraints et non contraints. D'une manière générale, nous n'avons pas une uniformisation, selon cette étude fouillée. Ainsi, en Espagne, au Portugal, au Danemark et en Suède, le coût du kilomètre est de 2, voire 3 millions d'euros, en France et en Allemagne, il se situe dans une fourchette intermédiaire, à savoir 4 à 6 millions d'euros. Autres exemples, le projet de la route Koudougou-Dédougou longue de 130 km (construction et bitumage) a été estimé à 32 milliards de francs CFA (arrimage du franc CFA à l'euro depuis le 1er janvier 1999, 1 euro = 655,957 FCFA) et l'autoroute Marrakech-Agadir, qui traverse le Haut Atlas du nord au sud et dont la construction a été concédée à 2,7 millions de dollars par kilomètre. Pourquoi donc le coût de l'autoroute est-ouest dépasserait-il 9 millions d'euros, donc plus de 10 millions de dollars le kilomètre ? Le problème est posé et cela concerne tous les projets sectoriels. (A suivre)