Lupa : Pourquoi la Commission n'a-t-elle pas osé franchement sanctionner la France sur la question de la discrimination des Roms ? Après les propos de Viviane Reding, commissaire européenne à la justice, cela paraissait logique. Philippe Ricard : Il est vrai que les décisions annoncées aujourd'hui tranchent avec le discours de Mme Reding il y a quinze jours. La Commission n'a pas lancé de procédure d'infraction pour application discriminatoire des règles européennes, contrairement à ce qu'avait pu dire initialement Mme Reding. Elle a en revanche décidé de lancer une procédure d'infraction pour non-transposition des garanties procédurales prévues en cas d'expulsion de ressortissants européens. Entre-temps, la circulaire du 5 août ciblant 'en priorité les Roms, qui avait excédé Mme Reding, a été annulée, remplacée par une circulaire davantage compatible avec le droit européen. Les services de M. Barroso ont donc considéré que la base juridique pour poursuivre la France sur le volet discrimination n'était pas assez forte. Ils vont quand même envoyer un courrier aux Français pour demander de nouvelles clarifications sur l'impact réel, sur le terrain, des différentes circulaires adoptées par le gouvernement français cet été. Il y a sans doute aussi, au-delà de l'analyse juridique, un élément politique important : Nicolas Sarkozy avait clairement indiqué à José Manuel Barroso, président de la Commission, qu'il considérait la démarche de Mme Reding comme inacceptable, et la Commission était soucieuse de calmer le jeu. Guest : Selon vous, ce qui s'est passé doit-il se lire comme la preuve de l'importance de la France au sein de l'UE, ou plutôt comme la faiblesse des institutions politiques européennes qui ne sont pas capables de sanctionner ?