Celui-ci s'en est ouvertement plaint au président du parti de son premier secrétaire, Karim Tabbou, qu'il accuse de «n'avoir pris aucune initiative sur le terrain». Selon lui, Tabbou s'est contenté «d'insulter tout le monde» sur les chaînes satellitaires lors de l'élection présidentielle de l'année dernière. En effet, l'inamovible lieutenant d'Aït-Ahmed s'était distingué au cours de ses derniers mois par ses passages récurrents sur certaines chaînes de télévision marocaines, où il s'évertue à dénigrer «le régime algérien», tout en encensant le régime marocain et en chantant ses «vertus démocratiques». S'agissant du fonctionnement du parti, Kamel Eddine Fekhar évoque «une grande catastrophe». Selon lui, depuis sa nomination à la tête du parti, Karim Tabbou «n'a eu qu'un seul souci : asseoir sa domination sur tout le monde et toute chose au sein du FFS, avec tous les moyens y compris policiers et staliniens». Et c'est pour toutes ces raisons qu'il demande à Hocine Aït Ahmed de rentrer en Algérie «dans les meilleurs délais pour reprendre en main les rênes du parti». La riposte, immédiate et incisive, de Karim Tabbou n'a fait que raviver l'esprit d'invective, comme pendant les multiples mouvements de fronde qu'avait connus le parti. Dans ses récentes déclarations, le premier secrétaire, reconduit par le président après sa première démission en 2009, se saisit de l'occasion pour prôner un discours contre «l'utilisation de la violence en politique» et recentrer ainsi le débat interne sur ce thème si cher au vieux parti de l'opposition. A l'origine de cette nouvelle crise, le maintien de Karim Tabbou comme premier secrétaire suite à la débâcle du parti aux dernières élections communales de novembre 2007, où le FFS avait pour la première fois cédé devant son rival, le RCD. D'aucuns ne s'expliquent pas cette «confiance» que lui renouvelait le chef du parti, en dépit des résultats jugés catastrophiques. En 2008, un groupe de militants de ce parti, en disgrâce, avaient déjà exigé la venue de Hocine Aït Ahmed aux fins de mettre de l'ordre dans le parti. Cette démarche était une suite logique d'un mouvement de fronde au sein du parti, initié par d'anciens membres influents du parti, lesquels, une soixantaine de membres du conseil national, en plus d'anciens ténors, comme l'ex-premier secrétaire Saïd Khelil, avaient exigé le départ de l'actuel premier secrétaire Karim Tabbou. Ils réclamaient, avant tout, le retour d'Aït Ahmed, seule autorité encore respectée et capable de remettre de l'ordre dans la maison FFS, en proie à une pagaille sans précédant, avec une lutte intestine qui a fini par désespérer les militants les plus fidèles, et qui, dans les régions, achève de paralyser l'action des structures locales, elles-mêmes divisées. Ce n'est pas la première fois que le dirigisme qui caractérise le fonctionnement du FFS se voit contesté, directement ou indirectement, par des membres de la direction – toute la vie du parti ayant été rythmée par des ruptures difficiles, de Hachemi Naït Djoudi à Abdesselam Ali Rachedi en passant par le groupe de Saïd Khellil. Dans le milieu des «anciens», l'opinion partagée est que Hocine Aït-Ahmed doit savoir que la conjoncture politique actuelle en Algérie ne lui permet plus de sacrifier des hommes ayant une telle expérience – à l'image de Kamel Eddine Fekhar – et de dicter ses choix de la manière dont il avait l'habitude de gérer le parti depuis son exil suisse. Tandis que la situation exige plutôt du vieux parti de ressouder les rangs, comme le revendique toujours le groupe des dissidents, et d'imaginer une issue à la grave impasse dans laquelle il se retrouve depuis au moins six ans, avec notamment les multiples déboires qu'a connus le parti en Kabylie, son fief traditionnel, suite aux événements du printemps 2001.