Face aux bouleversements mondiaux, l'accélération des réformes économiques conciliant efficacité économique et cohésion sociale et la démocratisation du Maghreb et une coopération, et non une aide, plus intense pour une plus grande moralisation de la gestion de la cité, qualifiée de bonne gouvernance, sont les pistes à explorer pour éviter ce dualisme Nord-Sud préjudiciable à l'avenir de l'humanité. La symbiose des apports de l'Orient et de l'Occident, le dialogue des cultures et la tolérance sont sources d'enrichissement mutuel. Il est dangereux tant pour les USA que pour l'Europe de s'enfermer dans un ghetto qui enfanterait inéluctablement la violence. Les derniers évènements devraient encore mieux nous faire réfléchir afin d'éviter cette confrontation des religions car autant l'islam, le christianisme ou le judaïsme ont contribué fortement à l'épanouissement des civilisations, à cette tolérance en condamnant toute forme d'extrémisme. La mondialisation est un bienfait pour l'humanité à condition d'intégrer les rapports sociaux et de ne pas la circonscrire uniquement aux rapports marchands en synchronisant la sphère réelle et la sphère monétaire, la dynamique économique et la dynamique sociale. Au moment de la consolidation des grands ensembles, enjeux de la mondialisation, je suis persuadé du nécessaire rapprochement entre l'ensemble des pays du Maghreb d'une intensification de la coopération avec les USA à la mesure du poids de l'histoire qui nous relie, le Maghreb pouvant être une région pivot et un sous-segment de la dynamisation de Afrique, enjeu du XXIe siècle. Or, quelle est la situation des économies maghrébines ? Le Maghreb a un poids économique insignifiant au sein du commerce mondial et même les échanges intramaghrébins sont dérisoires, à savoir moins de 3% de leurs échanges globaux. Or l'Europe du Sud (Italie, France, Grèce et Espagne) totalise environ 170 millions d'habitants. L'Algérie, le Maroc et la Tunisie totalisent 94 millions d'habitants, soit un total de 264 millions d'âmes. Si l'on inclut les riverains méditerranéens, dont la Syrie, le Liban, Israël, l'Egypte, Malte, la Turquie, l'Albanie, la Libye et l'ex-Yougoslavie, dont la stabilité conditionne le développement de l'ensemble des Balkans, nous aurons une population en 2010 qui dépassera les 500 millions. Cette région est frappée actuellement par une récession économique avec un écart croissant, les pays de l'UMA ayant un revenu PNB par tête qui représente moins de 15% de ceux de la CEE. Cette récession s'explique par différents facteurs dont le manque d'homogénéisation économique pour des raisons essentiellement politiques qui fait fuir les capitaux vers d'autres cieux plus propices à un moment où la concentration des échanges est dans le Nord, la Chine accaparant plus de 50% pour la zone Sud. Mais la raison essentielle est le retard pris dans les réformes micro-économiques et institutionnelles bien que certains pays du Maghreb aient réussi la stabilisation du cadre macro-économique. Mais les entreprises publiques sont fortement dominantes au Maghreb, imbriquées dans le système administratif lieu de relation de clientèles avec des intensités différentes selon le modèle de développement choisi étant plus importantes en Algérie et en Lybie. Leur gestion est défectueuse, croulant sous le poids des dettes, et sont à l'origine de l'essentiel du déficit budgétaire et du niveau élevé de la dette publique. Quant à certaines entreprises privées, elles ne sont pas autonomes mais trouvent leur prospérité ou leur déclin dans la part des avantages financiers, fiscaux, leurs parts de marché auprès des entreprises publiques et des administrations. Cette organisation spécifique où l'autonomisation de la décision économique est faible engendre peu d'innovation et d'esprit d'entreprise. Aussi, certaines entreprises publiques ou privées sous-traitantes vivant du transfert de la rente exercent des pressions pour accroître le protectionnisme néfaste à terme et sont peu enclines à la concurrence internationale. Mais au niveau du Maghreb, il faut reconnaître que, depuis quelque temps, avec la formation plus élevée et l'ouverture sur l'extérieur, nous assistons à la naissance de nouvelles entreprises mues par de véritables entreprenants. Pourtant, les multitudes pressions administratives, combinées avec l'absence de motivation, ne leur permettent pas parfois la créativité et l'imagination. Cette situation explique l'extension de la sphère marchande ou industrielle informelle et que, du point de vue des relations maghrébines, au lieu que l'intégration soit dominée par des économies contractuelles ou organisées, nous assistons à une dynamique informelle caractérisée par une identité culturelle qui permet à des milliers de maghrébins surtout aux frontières de contourner la myopie des bureaucraties nationales. La raison essentielle trouve un fondement socio-historique qui rend d'actualité les analyses ibn-khaldouniennes avec le poids du politique dans les sociétés maghrébines accentué par des structures familiales et des tribales qui se consolident en période de récession économique. Il s'agira impérativement d'intégrer cette sphère dominante au niveau du Maghreb par la délivrance des titres de propriété devenant citoyenne, car acquise aux réformes pouvant constituer une force sociale dynamisante. Dès lors s'impose la nécessité d'une véritable révolution culturelle pour inculquer l'esprit d'entreprise et libérer l'ensemble des énergies créatrices. La coordination des politiques commerciales, fiscales, douanières et des banques centrales est un objectif vital et il serait souhaitable la mise sur place d'une banque centrale maghrébine qui serait un maillon du système européen des banques centrales afin de favoriser la création de la zone de libre-échange Europe-Maghreb et accélérer la convertibilité intégrale des monnaies, ce qui dynamiserait les échanges. Cette action aura comme support une institution financière méditerranéenne à l'instar de la banque européenne pour la reconstruction et le développement actuellement orientée vers les pays de l'Est. (A suivre)