Entre septembre 2009 et février 2010, le premier acteur mondial du secteur a fait revenir au garage près de neuf millions de voitures pour divers soucis techniques, notamment des pédales d'accélération pouvant rester bloquées en position enfoncée et des systèmes de freinage réagissant tardivement. «L'entreprise est plus faible aujourd'hui, la crise a atteint sa réputation et sa rentabilité», résume Tatsuya Mizuno, expert à Mizuno Credit Advisory. L'impact a été fort aux Etats-Unis, concernés par la majorité des rappels et où l'audition tendue, en février, du P-DG Akio Toyoda en commission parlementaire a marqué les esprits. Le groupe nippon a été condamné à une amende record de 16,4 millions de dollars US dans ce pays. Il fait aussi face à des plaintes en nom collectif dénonçant 89 décès liés aux défauts, bien que des erreurs de conduite soient à l'origine de certains accidents, selon des tests menés par les autorités. Les ventes de Toyota souffrent aux Etats-Unis et sa part de marché pourrait passer de 16,9 % en 2009 à 15,3 % en 2010, selon IHS Automotive, une société d'information du secteur. L'entreprise, qui a ravi la place de numéro un mondial à General Motors (GM) en 2008, a reconnu avoir grandi trop vite et son porte-parole, Masami Doi, admet «des erreurs, comme celle de relâcher notre attention portée sur le consommateur». Parmi les mesures destinées à rebâtir la confiance, Toyota a affecté un millier d'employés de plus aux contrôles qualité effectués avant la sortie des modèles. «La direction est désormais très prudente et n'hésite pas à lancer des rappels à grande échelle pour le moindre souci», même s'il n'engage pas la sécurité, remarque en outre M. Mizuno. Afin de déceler les défauts au plus tôt, Toyota a établi un nouvel organe de contrôle qualité en grande partie composé d'étrangers, qui travaille en lien direct avec les régions. Cette structure est inédite pour un constructeur souvent critiqué pour son tropisme nippon. Mais selon M. Mizuno, «l'entreprise reste très ‘'japonaise'', comme la plupart de ses dirigeants, et la prise de décision reste centralisée à Toyota City», le siège de l'entreprise (centre du Japon). L'adoption d'une organisation décentralisée où l'information circule rapidement constitue pourtant un important défi: les lourdeurs hiérarchiques sont accusées d'avoir ralenti la réaction en pleine tourmente. «Toyota est toujours en crise et le restera l'an prochain. C'est sur le long terme que nous pourrons évaluer ses efforts», juge Mamoru Kato, du centre de recherche Tokai Tokyo. L'entreprise avoue être sur la corde raide, d'autant qu'elle doit s'adapter à des marchés en pleine évolution, prévient Masatoshi Nishimoto, de IHS Automotive. «Aux Etats-Unis, GM est sorti de la faillite et Ford se reprend. Le coréen Hyundai et l'allemand Volkswagen sont là aussi. Toyota aura du mal à augmenter sa part de marché».