Tout en participant au sauvetage de la Grèce puis de l'Irlande, les autorités françaises ont, ainsi, dû s'employer à rassurer les investisseurs sur leur détermination à réduire les déficits et leur capacité à conserver à la France sa note «triple A», désormais considérée comme un trésor national. Sur le seul front de la croissance, 2010 restera comme une année de (relativement) bonnes surprises : alors que le gouvernement n'espérait il y a un an qu'une reprise très molle, avec une hausse du PIB limitée à 0,75 %, il a pu revoir ses ambitions à la hausse au fil des mois. La prévision officielle a été portée à 1,4 % en janvier, «au moins 1,5 %» en septembre et 1,6 % quelques semaines plus tard. Il y a quelques jours, la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, évoquait «un gros 1,6 %». Une remontée graduelle qui illustre la méthode adoptée cette année par Bercy : fixer des objectifs prudents... pour mieux les dépasser. Cette tâche risque d'être plus ardue en 2011, la conjoncture ayant déjà contraint l'exécutif à revoir ses ambitions à la baisse. Le budget de la France pour 2011 est bâti sur l'hypothèse d'une croissance de 2 %, contre 2,5% espéré début 2010. La plupart des économistes n'attendent au mieux que 1,6 %. La reprise de 2010 n'aura pas suffi, loin de là, à effacer les pertes des deux années précédentes. Ainsi, la production industrielle en France se situe encore 10 % en dessous de son niveau d'avant la crise. Les dépenses de relance auront, pourtant, été conséquentes: plus de 38 milliards d'euros au total depuis 2008, dépensés pour soutenir le crédit, renflouer les trésoreries d'entreprises, ou doper les ventes de voitures à travers la prime à la casse. «Rilance» Ce dispositif aura permis aux constructeurs automobiles d'enregistrer au moins 600 000 ventes supplémentaires cette année, un chiffre comparable à celui de 2009, pour un coût d'environ un milliard d'euros à la charge de l'Etat. Symbole du soutien public à la reprise, la prime à la casse ne survivra pas au réveillon du nouvel A n. Et si Christine Lagarde a pu oser en juillet le néologisme de «rilance», mélange inédit de rigueur et de relance, pour caractériser la politique économique française, la relance a bel et bien vécu. Reste la rigueur La réduction des déficits publics restera un enjeu clé en 2011, sans doute davantage encore qu'en 2010. En faisant chuter les recettes fiscales et en obligeant l'Etat à dépenser pour soutenir l'économie, la crise se soldera cette année par un déficit public record à environ 7,7 % du produit intérieur brut, dont l'essentiel correspond à un trou de 150 milliards d'euros pour le seul budget de l'Etat. Le gouvernement entend amorcer l'an prochain un mouvement de baisse durable du déficit pour atteindre 6 % fin 2011, 4,6 % fin 2012, 3 % fin 2013 et 2 % fin 2014. Au menu amer de 2011, le budget prévoit de conjuguer maîtrise stricte des dépenses, réduction des effectifs de la fonction publique et coup de rabot sur les niches fiscales, en attendant une remise à plat de la fiscalité du patrimoine au printemps. Mais pas de mesures douloureuses comme par exemple la hausse de la TVA qui attend les Grecs, les Britanniques et les Portugais, souligne le ministre du Budget, François Baroin, qui ne manque pas une occasion de fustiger la «dépendance à la dépense» de certains services de l'Etat. Un chiffre illustre l'urgence du dossier : au premier semestre, la dette publique française s'est alourdie de 102,5 milliards d'euros, soit l'équivalent de six mois de smic... par seconde ! «Digérerla crise» L'envolée des dettes publiques constitue, désormais, le principal sujet de préoccupation des marchés financiers, qui cherchent à identifier les prochaines éventuelles victimes de la crise de la dette. Après les plans d'aide à la Grèce en mai et à l'Irlande en décembre, le Portugal et l'Espagne sont jugés menacés. Et la France, malgré son statut de pivot de la zone euro, ne paraît plus totalement à l'abri.