Ils sont probablement des dizaines de joueurs qui n'ont pas eu droit à une renommée pourtant largement méritée. Cette rubrique, si appréciée d'après les multiples échos parvenus, leur rendra justice au fil du temps. Benzaoui Abdelkader figure dans cette catégorie. Certes, il n'a pas eu la réputation d'un Gnaoui, Baghdad ou Draoua, mais son parcours n'en est pas moins remarquable. D'ailleurs, il a été le précieux et brillant coéquipier du trio cité ci-dessus, auquel on ajoutera ses autres partenaires à l'USMO, Osmane, Bencherab, Kassen, Mokhtari, Serradj, Tekkouk, Nemiche, Boudjellal, Berkani, Bacha, Daho, Benchaâ et bien d'autres avec qui il fut sacré champion d'Oranie en 1941. A 31 ans, il raccroche ses souliers pour se consacrer à son travail et à sa famille. Il faut dire que n'intègre pas l'USMO de cette époque n'importe qui. Il y a que Benzaoui Abdelkader possédait déjà une carte de visite des plus respectable. Qu'on en juge: à l'âge de 16 ans, seulement, il fait son apparition du GC Mascara, où il se distingue aux côtés de feu Meflah Aoued dont le stade porte le nom aujourd'hui. Deux années plus tard, à 18 ans seulement, il se rend à Tlemcen pour s'inscrire à la fameuse medersa. Durant trois saisons, il fait partie de l'USFAT et, suprême honneur, en devient le capitaine en dépit du fait que nombre de ses coéquipiers tels Sari Bey, Chaouch, Benhadji, Serradj, Diaz, Martinez et Poveda étaient plus âgés que lui. Diplômes en poche, il rentre à Mascara et, constatant l'inactivité du Ghali, signe à l'AGSM où il retrouve son ancien coéquipier Meflah Aoued, ainsi que les titulaires de cette décennie, à savoir Hachelef, Kirri, Nekkam, Robergeot, Vincent, Vitalis, Antoine et Gluais. Il y restera sept saisons avec, comme point d'orgue, de nombreuses capes en sélection d'Oranie entre 1933 et 1940. En 1935, il aura une remarquable distinction en équipe des «AS» d'Oranie, qui avait la particularité de faire appel aux meilleurs joueurs à chaque poste. Muté en 1938 à Oran dans le cadre de son travail au Crédit Lyonnais, il ne pouvait opter que pour l'USMO où il jouera trois saisons aux côtés de la fameuse phalange des Baghdad, Mokhtari, Osmane, Berkani, Gnaoui, Tekkouk, Fouatih, Nemiche, Daho, Serradj, Benarba, Boudjellal, Karsenty, Benabou et Siki. Ce fut l'une de ses meilleures périodes, avec un titre à la clé en 1941 et ce, en dépit de la très forte concurrence des SCBA, CDJ, FCO, GCO, AS Marine Oran, CALO, MARSA, ISCM, PGS et JSSE. Sélectionné Oranien pour le tournoi des ligues nord-africaines, il sera aligné comme inter alors que son poste habituel est arrière droit. C'est dire que ses qualités techniques étaient reconnues et appréciées. Evoluer aux côtés des grandes vedettes de l'époque tels Chibani, Bacoco, Sparza, Berreguer, Barbier et Mestre est une preuve irréfutable du talent de Benzaoui qui, sagement, tirera sa révérence pour se consacrer à sa carrière au sein de l'administration où, là encore, il se distinguera, terminant comme secrétaire général de la daïra d'Oran. Ce qui ressort de ce bilan, c'est que Benzaoui Abdelkader, tout en étant indiscutable dans tous les clubs où il a évolué et savourant sa passion, n'a jamais perdu de vue son avenir professionnel, sachant que le football n'a jamais nourri ses adeptes à cette époque, comme en font foi de nombreux douloureux cas d'anciens champions tombés dans l'oubli, et ayant fini leur vie dans le dénuement. Cela s'appelle de la lucidité. Et Benzaoui Abdelkader n'en manquait pas... Pionnier Après avoir aidé le club de l'AS Zemmoura, Benzaoui rentre à Oran. Sa passion pour le football le poussera à intégrer la LOFA où il participera efficacement à la reprise du football à l'Ouest. Sa connaissance et son esprit d'analyse lui permettent d'occuper aux côtés des Baghdad, Draoua, Gnaoui, Echeikh Ouaddah, le poste de sélectionneur. On se souvient que l'Ouest possédait de sacrées équipes avec les Krimo, Sikki, Beddiar, Ould El Bey, Freha, Nourredine, Safa, Kerroum, Amara, Zidane, Bouhizeb, Bendida, Embarek, Dala, Pons et Ouanès. A cette époque, il y avait de fortes personnalités à la LOFA. On citera certains membres du Bureau tels Abdellilah Miloud, Benamar Miloud, Benbassal, Ouhibi, Bensaâda, Bettadj, Hadef Kouider et Benzaoui, alors que Marcel Bir occupait un poste technique. Parallèlement Benzaoui était président du COSC (Comité organisation des sports corporatifs) et ceci outre son poste de président de l'équipe de la wilaya d'Oran où les Kechra, Embarek, Naïr Kaddour, Tassa, Ouadi et Dehim ont évolué, avec de notoires succès à la clé. En 1965, il est sollicité pour prendre la succession de Hadj Hacène au RCO où il innove avec des conceptions nouvelles qui donneront un certain caractère au club de Haï Badr. Il y restera deux saisons seulement en raison de ses lourdes charges à la wilaya et à la daïra d'Oran. En 1975, il siégera de nouveau à la LOFA à titre de vice-président. On relèvera encore qu'il a participé à plusieurs débats ayant débouché sur la réforme. Avant celle de 1976-1977, il y a eu la première tentative pilotée par Firoud et auquel Benzaoui a apporté sa contribution. Ses contemporains attestent qu'il avait une mission futuriste du sport en général et du football en particulier. Dialogue Le Maroc, qui faisait partie des ligues nord-africaines, a toujours possédé de redoutables équipes. Aussi, la sélection d'Oranie s'est déplacée en 1938 à Casablanca avec beaucoup de pessimisme en raison de la dure adversité. En effet, en face il y avait une authentique «dream-team» avec Larbi Ben Barek dans ses rangs. Que faire contre un tel rival ? C'est le dialogue authentique entre le Saïdéen Bacoco et Benzaoui. - Aujourd'hui, on va perdre par 6 à 0, dira Benzaoui à son coéquipier. Or, c'est l'Oranie qui ouvrira la marque. - Ce sera 6-1 répliquera Bacoco - L'Oranie ajoutera un second but. - Finalement, ce sera 6-2, s'exclamera Benzaoui. - Après le troisième but, l'espoir revient dans le camp oranien. - Peut-être qu'on va gagner, s'exclame Bacoco. - En fait, la mi-temps sera sifflée sur le score de 4 à 1 alors que la partie s'est terminée en faveur de l'Oranie par le score incroyable de 6 à 2. Benbarek a certes brillé, mais l'esprit de corps et la détermination des Oraniens avait prévalu. Ce sera l'un des moments forts de la carrière de Benzaoui, Bacoco et leurs valeureux coéquipiers.