Lorsqu'un individu se met à se promener sur la voie publique, tout nu, une cigarette au bec et un journal à la main, c'est qu'il y a sans doute quelque chose qui ne marche pas rond chez lui. Lorsqu'il se met à vous toiser de haut parce que vous êtes vêtu, cela devient un problème. Lorsque, du fond de sa nudité, il se met à rire, tout persuadé, qu'il n'est pas dans le tort, c'est une chair de poule qui doit vous saisir car il y va de la vie en société. Souvenons-nous en, il y a à peine quelques temps, des individus dont le niveau d'instruction ne dépassait pas l'analphabétisme s'étaient mis à promulguer de fetwa à l'emporte pièce. Dans la rue, dans le souk, lors de rencontres plus étranges les unes que les autres, il pleuvait des fetwa. Qui n'a pas de barbe n'est pas un bon musulman, qui n'a pas de kamis non plus, celui dont la femme travaille n'ira pas au paradis, celui qui a des filles qui sortent est un mécréant, la prière de celui qui ne se brosse pas les dents avec le fameux bâton de misc est amoindrie, celui qui, lors de la prière, ne marche pas sur les pieds de son voisin de ligne, est l'ami du diable...les gens étaient convaincus en leur fort intérieur de ce qu'ils disaient. Sans formation aucune et sans le moindre repère religieux, ils ne pouvaient pas ne pas avaler les discours de ceux qui, pour des raisons qu'il appartient à l'histoire de dévoiler un jour, ne prononçaient pas un mot sans enfoncer notre société dans l'abîme. « Dieu a dit »... ainsi entamaient-ils leurs discours, même pour soutenir l'insoutenable. J'ai eu à rapporter dans ces mêmes colonnes, l'histoire de ce jeune receveur de bus qui, du bas de ses vingt ans, s'évertuait à inventer des hadiths et des versets pour me convaincre que la science ne peut pas prédire la visibilité de la lune. Il n'est point nécessaire de se demander quelles seront les conséquences de tels comportements sur la société. Il suffit d'ôter un instant les lunettes de la lâcheté pour se rendre compte que nous avons atteint le fond. Pire, l'honnêteté impose de crier fort que, malheureusement, la situation ne peut pratiquement plus être redressée. Parce que nous nous sommes tus devant le discours des faux religieux, notre islamité en pâtit et elle en pâtira longtemps encore. Qu'on le veuille ou pas, les séquelles sont à venir ! Le patriotisme, une affaire de ventre et de rots ? Il en est de même pour les autres aspects de notre quotidien. Certains s'accordent le droit d'être plus algériens que d'autres. Du bas de leur inculture, ils développent les discours les plus nauséabonds. Accrochés à une histoire qu'ils ont eux même dépouillée de son véritable sens, ils ne se rendent même pas compte qu'ils sont incapables de discuter avenir. Collés à des lieux communs que les meilleurs commerciaux au monde auraient de la peine à vendre encore, ils ne s'aperçoivent même pas qu'ils ont cessé de développer toute forme d'intelligence autre que celle qui consiste à arnaquer, à tromper, à tricher... Le patriotisme ? C'est leur tasse de thé favorite. Au petit déjeuner, autour d'un méchoui entre amis, ils déballent du patriotisme en accusant le reste du monde de ne pas l'être. Au déjeuner, devant un autre méchoui avec les clients, ils exhibent leur attachement au pays en égratignant, au passage, tous les autres qu'ils n'omettent jamais de qualifier des pires noms. Au diner, encore devant un méchoui, c'est encore l'amour de la patrie qu'ils débitent par torrents avant de roter et de s'endormir. Aux autres repas, parce qu'ils mangent à toutes heures et à tous les râteliers, ils fredonnent un air de patriotisme, le leur bien rondelet et bien plein, accusant tous les autres ou presque d'être des harkis ! Ecorchée, l'algérianité l'est sans doute par ceux qui, pour être honnête, ne peuvent faire la différence entre le coeur et le ventre. La brebis n'a pas parlé et la statistique ne tire pas son origine du Coran Que ce comportement envahisse l'école voilà qui marque, en caractères plus gras encore, la décadence d'une institution qui n'était pourtant point destinée à pareille situation. Il est difficile de dire toute la peine que l'on ressent en regardant s'écrouler l'école algérienne. Quiconque ose soutenir le contraire ne peut que tricher, mentir. Nous avons tous des enfants qui nous racontent ce qui se passe et ce que certains ont le culot de leur raconter, comme cet enseignant qui n'a pas hésité à dire récemment à des bambins, à peine sachant réfléchir à propos d'une adition de deux chiffres, que quelque part une brebis a parlé. « Et elle a dit quoi ? » se demandent encore les pauvres enfants dont le cerveau n'ose même pas émettre l'hypothèse que de tels enseignants ne font en fait que divaguer car incapables d'enseigner ! Non ce ne sont pas tous les enseignants, Dieu merci, qui penchent pour de telles mystifications et de tels délires, mais s'entendre dire en 2010 qu'un enseignant affirme qu'une brebis parle, c'est à se demander ce que font de tels énergumènes dans notre école et si cela vaut le coup d'envoyer nos gosses à cette école ! L'université n'est pas mieux lotie ! On y parle de statistiques islamiques lorsqu'on veut, d'économie islamique lorsqu'on le désire et, tant qu'on y est, pourquoi pas de stratégie islamique, de management islamique, de marketing islamique, de recherche opérationnelle islamique, de mathématiques islamiques...? L'économie islamique, c'est un débat que nous encourageons et auquel nous appelons sans réserve, mais entendons-nous bien, il s'agit de l'économie islamique ni plus ni moins...il ne s'agit pas de fabulations de ceux qui, à peine arrivant à reconnaître la prière de l'Asr de celle du Maghrib, foncent dans le non-sens, au nom d'une religion à laquelle, disons-le ainsi, ils ont causé beaucoup de torts. Il ne s'agit pas, non plus, de ces bêtises devant lesquelles on ne peut que regretter d'être enseignant aujourd'hui ! La statistique n'est pas islamique. Du moins elle ne tire pas son origine du Coran comme le prétendent certains faux enseignants en disant se référer à la Sourate de « Meriem ». Oui, dans cette sourate, le terme « Ahsahoum » réfère sans doute à « Ihsa' » qui veut dire « compte », mais les fondateurs de la statistique ne connaissaient pas le Coran lorsqu'ils entamèrent la statistique ; ensuite « el Ihsa' » est une traduction de « statistiques », ce n'est pas l'appellation d'origine de cette discipline qu'il faut plus que des fabulations pour l'enseigner. Prétendre que l'enseignement des probabilités n'est pas licite à cause du fait qu'on y parle de dés et de hasard, c'est vraiment le bouquet. Bernoulli et ses disciples doivent bien se retourner dans leur tombe ! L'économie islamique ne peut pas être enseignée par ceux qui ne comprennent pas l'économie, car ce serait un non-sens ! Elle ne peut pas, non plus, être enseignée par ceux qui ne connaissent pas l'Islam, ce serait là aussi un non sent. Or, certains de ceux qui l'enseignent aujourd'hui, semblent ne connaître ni l'économie ni l'islam. Ce n'est donc pas étonnant que, puisant dans la presse jaune, ils osent soutenir que l'économie islamique freine les besoins ? Savent-ils au moins ce qu'ils débitent ? Savent-ils au moins ce que cela a comme portée que de tenir de tels propos ? Au plus bas mot, cela voudrait dire que, d'après ces enseignants là, l'économie islamique serait contre la dynamique de production, qu'elle serait contre l'expansion des entreprises, qu'elle serait contre le développement des entreprises et des économies... cela voudrait dire aussi que l'économie islamique, selon leur perception déformée des choses, serait contre le travail, contre l'effort, contre l'épanouissement, contre le bien être ...bref, contre l'économie. Pas moins ! Des fetwa qui n'ont rien d'islamique, un patriotisme qui fait ventre, Des brebis qui parlent, une économie qui nie l'économie_ mais où vont-ils chercher pareilles fadaises ? et dire qu'ils se promènent sur la voie publique, et rient des autres.