«L'enquête est terminée et les conclusions doivent être portées à la connaissance du gouvernement», a affirmé le ministre délégué à propos des événements qui ont secoué Berriane, dans la vallée du M'zab. Dahou Ould Kablia rappelle à ce sujet que «cette situation n'est pas nouvelle, elle n'est pas venue à partir de rien». Entre Arabes et Mozabites, il évoque une coexistence depuis des décennies. Une coexistence, dit-il, «plus ou moins fragile parce que les mentalités sont différentes. Le Mozabite est formé selon un moule défini. Il fonctionne dedans tandis que le malékite, c'est un peu à l'image des habitants de l'Algérie, la liberté d'aller et de venir, il n'est pas tenu par un formatage. Avec tout ça, il y a un problème de chômage, de logement...». A ceux qui se demandent pourquoi ces événements à Berriane, le ministre délégué répond «parce que sur les 7 villes de la vallée du M'zab, c'est la seule où il y a une population moitié moitié, 20.000 malékites, 20.000 Mozabites. Les autres villes sont entièrement pilotées par les Mozabites». Il estime que s'il a pu jouer un rôle de médiateur entre les deux communautés, c'est parce que «j'ai des amis dans les deux camps et j'ai vu que j'ai la confiance des deux, ce qui m'a permis de parrainer la réconciliation entre eux». La situation est telle aujourd'hui que, affirme-t-il, «il y a toujours le problème de la ghettoïsation, parce que les uns ou les autres ont quitté leurs maisons, qu'ils ne peuvent pas aller dans leurs mosquées respectives, ils y vont timidement». Ceci étant, il rassure : «On a réglé plus ou moins le problème de la scolarisation, les élèves passent le bac. On a aussi renforcé la sécurité, bien que ça dérange les ibadites qui estiment que la présence des policiers, ça touche un peu à leur intimité». Ould Kablia continue de raconter Berriane. «Nous leur avons dit : Alors faites la sécurité vous-mêmes. En tout cas, on n'a pas vu d'incidents depuis la signature de la feuille de route. Les gens savent que la situation ne doit pas perdurer». Il fait savoir qu'à côté, «il y a un plan spécial pour Berriane qui consiste en la construction de logements, d'équipements sportifs pour une enveloppe financière de 1,9 milliard dinars pour la seule année 2009». Un montant qui va être budgétisé dans la loi de finances complémentaire. A une question sur la crise identitaire à Ghardaïa, il dira qu'«elle est artificielle. C'est un problème socio-psychologique. Parce que la religion est la même mais pratiquée d'une manière différente». Pour lui, «le problème identitaire a été accentué depuis quelques années parce qu'il y a des interférences », qu'il refusera d'identifier. Mais il expliquera que si interférences politiques il y a, «c'est parce que la politique est l'aboutissement des problèmes économiques et sociaux. Quand les gens auront du travail et un logement, ils ne feront pas de politique. Le jeune fait de la politique en brûlant un pneu». Il souligne : «Nous tenons à ce que cela cesse, il y a l'unité de la nation qui est en jeu et beaucoup d'autres choses en jeu». Y a-t-il eu manipulation ? «Oui, il y en a eu,» répond-il. Ceci étant dit, «c'est très difficile de situer les responsabilités parce que vous ne pensez pas que ceux qui l'ont fait prendront un micro pour le dire !». Pour lui, «la sécurité est une prérogative de l'Etat ». Mais au début, «l'un de nos objectifs, dit-il, c'était de faire en sorte d'accorder un maximum de soutien et de crédibilité aux comités locaux. Aujourd'hui, il y a bien moins d'incidents. N'oubliez pas que pendant une période, c'était l'affaire irlandaise». Il estime qu'«il y a un système de représentativité qui est ancestral. Ce serait une erreur de faire disparaître les notables, même s'il y a un divorce entre les générations. Ce n'est pas parce qu'on veut substituer cette autorité locale à celle de l'Etat, mais il s'agit d'asseoir cette forme de hiérarchie». Et selon lui, «les élus ont joué un rôle d'apaisement complet. Ils se sont impliqués à fond. (...). En apparence, ils marchent». Pour ce qui est des services de sécurité, il dira : «Ils n'ont pas laissé les choses pourrir. Ils étaient cantonnés à l'extérieur parce que les villes du M'zab ne sont pas ouvertes. Mais maintenant qu'ils y pénètrent un peu plus, les choses vont mieux. Ça ne plaît pas à tout le monde». Il affirme que «les services de sécurité ont été les plus grands perdants dans cette affaire. Ils ont eu le plus grand nombre de blessés. Les policiers ont été ramenés de tous les coins du pays. Ils ont été plus de 2.000 pendant plus d'une année à raison de 9 URS (unités républicaines de sécurité) et 10 escadrons de gendarmerie. Ça fait 20 compagnies. Il y a des relèves qui se font ». Diviser Berriane en deux, malékites et Mozabites, c'est pour le ministre délégué «exclu, et ce n'est pas à envisager. Ils ont dit que nous voulons des lycées pour chaque communauté, on a accepté mais demain pour l'université, on fait quoi ?». Il rappelle aussi que «les Mozabites reprochent aux autorités de ne leur avoir donné aucun poste de responsabilité. A l'ENA, il n'y a pas eu plus de 4 élèves, ils n'y vont pas parce que dès le BEM, ils décrochent pour faire le commerce. Et quand ils font des études supérieures, ils choisissent des professions libérales». A Ghardaïa, il existe, selon lui, quatre rites sunnites, trois chiites et un ibadite «reconnu par le corpus islamique ». Mais il affirme que «l'Etat n'a pas à prendre de position sur ce rite, ils l'enseignent tous seuls, ils tiennent à leurs écoles privées qui sont d'ailleurs subventionnées par l'Etat». Si pour lui, «l'officialisation de ce rite n'a pas été demandée par les Mozabites qui ont démenti par voie de communiqué, il n'est par contre. Pas question de faire partir le P/APC, l'APC ne sera pas dissoute et le chef de daïra ne sera pas renvoyé dans l'immédiat». Même si, dit-il, «ils en font une fixation». Et, fait-il savoir, «le commissaire muté, on l'a ramené.» Ould Kablia avoue qu'il n'aime pas trop parler de Berriane, «parce que plus on en parle, plus on allume la braise».