Le Ramadhan est marqué cette année par une hausse concomitante du mercure et de la mercuriale. Ployant déjà sous le double poids de la canicule et du jeûne, les ménagères se voient porter l'estocade sur le seuil du marché couvert. Tels des banderilles, les prix en folie viennent se planter sur les bourses saignées à blanc. Les fruits et les légumes affichent pour la circonstance une quasi-parité complice. L'indispensable bouquet de coriandre entrant dans la préparation de la fameuse h'rira est vendu à 40 dinars. Quant à la viande et au poisson, ils sont hors de portée des revenus moyens. Le commerce de la zalabia et son pendant, les bananes sucrées, fonctionne timidement, probablement à cause du prix onéreux de l'huile de table, ajouté aux charges. Les rues adjacentes d'El-Blass sont devenues piétonnières. Des barrières y ont été installées pour permettre une fluidité de la circulation des chalands. Chose qui arrange beaucoup plus les affaires des marchands informels qui y trouvent leur compte. Les lieux sont infestés de mendiants. On risque d'être la proie d'un pickpocket, promiscuité oblige, quand on n'est pas importuné par ces quémandeurs d'obole. Un boulanger averti est allé jusqu'à afficher devant son magasin : «Attention aux pickpockets». La place voisine d'El-Medress est littéralement investie par les vendeurs de pain de maison (zra', metlou', khobz eddar). Une véritable bourse de la miche. Et pour cause : se révélant un créneau porteur, chômage aidant (les jeunes ont remplacé les vieux devant les étals), ce métier a connu ces dernières années un boom commercial, rivalisant même avec les boulangeries classiques du coin. Une fois le f'tour terminé, la ville vit au rythme des tarawih, des jeux de société et des navettes du téléphérique. Outre le tapis de secours, certains fidèles sont munis de bouteilles d'eau fraîche, voire de mini-glacière portable. Comme quoi le culte (piété) n'exclut pas le petit confort. En ces soirées chaudes, la plupart des mosquées offrent deux «compartiments» : la salle de prière climatisée et le patio (ou la terrasse) à la belle étoile. Les cafés de l'esplanade du Mechouar sont archicombles. Les inconditionnels des dominos, du rami ou de la belote s'y donnent rendez-vous. Certains joueurs réserveraient leur table en prenant à tour de rôle le f'tour sur place. D'autres préfèrent s'installer à titre «privé» dans la rue avec leur mobilier de plage «recyclé» à la lumière des belvédères. A Bab El-Djiad, les papilles gustatives des passants sont flattées par les grillades. Même décor nocturne du côté de Kiffane, où le boulevard principal est «planté» de barbecues. Les crémeries du boulevard des 24 Mètres de Sidi Chaker sont envahies par une clientèle assoiffée de rafraîchissements. A quelques encablures, la terrasse panorama du café de l'émigré sis à Boudghène ne désemplit pas. L'Aquacenter de Douidi est également sollicité, sevrage du jour oblige. Une animation toute conviviale est constatée au niveau du Grand Bassin et du parc de loisirs de Lalla Setti, où certains prennent leur... s'hour (à l'instar de ceux qui le font les autres jours en ces lieux pour le couscous du vendredi). A ce propos, on n'arrive pas à comprendre pourquoi la Maison de la culture n'a pas programmé ses soirées ramadanesques en plein air au théâtre de verdure de Sahridj M'bedda, alors que «ses» semaines culturelles y sont toujours organisées. Les spectacles de la MCT n'attirent qu'un public clairsemé composé surtout de la « galerie» (familiale ou amicale) des associations musicales. Par ailleurs, l'APC aurait dû «rééditer» dans ce cadre son festival «Les nuits andalouses de Tlemcen» qu'elle a annulé suite au décès de la mère du président de la République, d'autant que les conditions y sont propices (veillées du ramadhan, saison estivale et vacances scolaires). En matière d'animation, le complexe Les Zianides semble se complaire dans la morosité, puisque rien n'est prévu à l'affiche, alors que l'hôtel Agadir compte organiser dans sa kheïma une soirée musicale qui sera animée par Tarab El-Acil. C'est la diète aussi du côté du cercle culturel de la station de radio locale. Signalons dans ce contexte que le taux de fréquentation du téléférique a baissé de 50% en ce début de Ramadhan, selon le DG de l'ETUT, M. Abdelkader Moussati, qui nous indiquera qu'avant plus de 7.500 usagers étaient traités par jour. Cette «désaffection» relative est-elle due à la fatigue générée par les tarawih ou bien motivée par la «grille» spécial Ramadhan (de la télévision) qui empêcherait les familles de sortir ?