Serait-ce une lapalissade de dire aujourd'hui qu'il y a quelque part une incontestable relation de cause à effet entre la crise économique mondiale multidimensionnelle et une certaine criminalité financière évidente, latente, parfois même patente, telle la scandaleuse «affaire Bernard Madoff» aux Etats-Unis qui ne serait que l'emblématique partie émergée d'un incommensurable iceberg macro-financier. Cette partie immergée n'aurait-elle révélé finalement qu'un infime contingent des arcanes underground d'où ont surgi subitement des faillites bancaires en série qui ont surpris et inquiété le monde ? Surtout le monde capitaliste. Le coeur de celui-ci prenait subitement feu. Les gouvernements occidentaux surpris et affolés devant l'ampleur des dégâts, volent au secours du système, armés de leurs lances de pompier pour éteindre un brasier menaçant de s'étendre à d'autres secteurs économiques vitaux. Le système capitalisme touché au coeur vacillait, chancelait, menaçant d'entrainer dans sa chute toute l'économie mondiale. En effet, il serait actuellement par terre, sans les béquilles que les gouvernements des pays concernés, se sont empressés de lui mettre en catastrophe sous les aisselles. Néanmoins, il a encore des difficultés à se remettre sur ses jambes et l'état pathologique grave dans lequel il se trouve ne présage pas d'une convalescence à court terme. Autrement dit, il n'est pas certain qu'il recouvrera de si tôt son équilibre et encore moins sa vigueur d'antan, malgré les secours qu'OBAMA et ses pairs, lui administrent avec la dernière des synergies, à coup de centaines de milliards de dollars et d'euros, puisées sans état d'âme, dans la finance publique de leurs pays respectifs. Il est clair que les mesures d'urgence ayant permis de colmater les brèches ne sont pas suffisantes. D'aucuns sont allés jusqu'à dire que le capitalisme aurait besoin d'une grande guerre pour se remettre (cf. «le capitalisme en crise a besoin d'un conflit majeur» de Jean Loup IZAMBERT (journaliste indépendant et écrivain. Géostratégie.com) En tout état de cause, le capitalisme est bien malade, les soins palliatifs n'y feront rien sans un examen sérieux et approfondi des causes du mal. Le système financier mondial doit être repensé de fond en comble pour être assis sur de nouvelles bases plus saines. Tout le monde est d'accord pour dire que le système hérité de BRETTON WOODS est devenu obsolète, voire un simple outil de manipulation aux mains des puissances de l'heure. En effet, l'enjeu est immense : il s'agit de ne plus se trouver dans une situation de mise en péril de l'économie mondiale. Pour cela il est beaucoup attendu du prochain sommet du G20 de Pittsburgh (Pennsylvanie). Celui-ci nous dira si les puissants de ce monde ont vraiment envie de réformer en profondeur le système en question ou non. Assurément, depuis la levée «du rideau de fer» et que « l'ennemi» d'hier se soit rendu à son rival triomphant, lui offrant sur un coussin de velours «les clés de la Maison de l'Est», le néolibéralisme s'est senti pousser de nouvelles ailes. Sa victoire totale lui à donné «la grosse tête» qu'il ne croyait posséder que virtuellement ou en rêve. Il n'y a plus désormais qu'une seule idéologie dominant le monde : la sienne. Pourtant, vingt ans après, cette idéologie débridée a montré ses limites et ses dangers. Poussée par un désir d'hégémonie absolue, elle a fait basculer le monde dans un malaise sans limites : les «néocons» plus que jamais impériaux, sont partis en croisade dans le sens propre (idéologie évangéliste des Bush et consort) et au figuré (alibi de la lutte contre le terrorisme) d'où : guerres en Irak et en Afghanistan, soutien inconditionnel à un Etat agressif, raciste et colonisateur, intervention en Somalie, etc. et enfin, une crise financière qui est à l'origine d'une quasi-récession économique planétaire. Sur le plan de l'idéologie libérale pure, force est de constater que les dogmes mythiques du «laisser faire» et du «laisser aller» ou du «laisser passer» chers aux physiocrates, ancêtres de «l'économie moderne» ont encore une fois prouvé leurs limites. On peut dire autant du concept de «la main invisible» régulatrice du marché, théorisée par Adam Smith (Richesse des Nations) et conceptualisée par les économistes néoclassiques. Ce «laisser-fairisme» actuel a été stigmatisé pertinemment par l'économiste Maurice ALLAIS (polytechnicien et prix Nobel d'économie) dans cette phrase : «Comment la nouvelle doctrine du libre-échangisme mondialiste a-t-elle pu s'imposer alors qu'en réalité elle n'a entraîné que désordres et misères dans le monde entier ? Il y a sans doute à cela trois raisons essentielles : un enseignement erroné dans toutes les universités du monde, une funeste confusion entre libéralisme et laisser-fairisme, la domination des multinationales américaines.». C'est comme si le néolibéralisme lançait un défi au monde : «je fais ce que je veux de l'économie et des finances mondiales mais si jamais je tombe vous avez intérêt à ne pas me laisser choir parce que je vous entrainerais dans ma chute». Il a failli choir en effet et les gouvernements occidentaux se sont précipités pour le soutenir. Il s'est rendu en quelque sorte indispensable. Pour combien de temps ? Mais en fait, les tenants de cette idéologie ne tombent jamais eux-mêmes personnellement, ce sont les systèmes «à gagner des sous» qu'ils ont édifiés, échafaudés, qui peuvent tomber. Quand à eux, au moment fatal, ils se trouvent déjà dans une situation sécurisée quasi absolue. Ils ont engrangé des fortunes colossales qu'ils protègent de différentes manières en investissements divers ou mises en sécurité dans les paradis fiscaux. Dès lors, ils peuvent eux-mêmes, leurs progénitures et leurs descendants sur plusieurs générations, mener une vie dorée, de farniente, dans laquelle le travail quel qu'il soit serait banni. Seulement, leur problème est qu'ils ne veulent pas se départir de leur puissance et conserver leur hégémonie sur le monde, éternellement. Le G20 qui se réunira les 24 et 25 du mois courant à Pittsburgh (USA), s'était promis en avril dernier à Londres de s'attaquer à la réforme du FMI et de la banque mondiale, à la régulation et à la supervision du secteur bancaire. Il ambitionne aussi d'introduire un peu de morale au sein des affaires ; autrement dire, de faire revenir les patrons d'entreprises, les banquiers et autres traders, à de meilleurs sentiments, à des sentiments plus humains. Il veut notamment qu'ils réduisent leurs salaires et leurs bonus à des proportions «raisonnables» (par exemple aligner leurs revenus sur ceux de leurs actionnaires) et qu'ils ne «planquent» plus leurs fortunes et les sièges de leurs entreprises dans des paradis fiscaux (la liste des pays considérés comme des «paradis fiscaux» a été minutieusement dressée). Tout ceci enfin de pouvoir leur soustraire quelques miettes sous forme d'impôts sur leurs incommensurables butins. Mais, probablement, ses gros propriétaires de banques et d'industries ne sont pas prêts à laisser s'entrouvrir le «lourd rocher» qui enferme jalousement leur «caverne d'Ali Baba». Le «sésame» (mot de passe) donnant accès à leurs fabuleux trésors demeurera éternellement le leur : la transparence n'a jamais été la vertu cardinale des grosses fortunes, voire des fortunes tout court. Et ce n'est pas demain la veille ! Par ailleurs, nous savons en effet, que des banques et certaines entreprises qui ont été sauvées in extrémis d'une faillite certaine par l'apport de fonds publics, grâce à une prompte intervention de leurs Etats, ont continué aussitôt et sans état d'âme, à servir à leurs dirigeants des bonus ahurissants ! Voilà donc des gens qui ont ruiné leurs entreprises et qui, au lieu d'être sanctionnés, sont plutôt récompensés ! Cependant, cet interventionnisme étatique tant critiqué s'est imposé de lui-même, par la force des choses. Les dirigeants des Etats concernés étaient au pied du mur : c'était cela où la ruine, autrement dits, des centaines de milliers de gens sans emploi et la paralysie de toute activité économique. Là aussi, tout le monde aurait noté qu'un tel interventionnisme jugé paradoxal est donc contraire à l'idéologie libérale et à plus forte raison à celle néolibérale. Il s'agit donc d'une antinomie doctrinale flagrante ; une preuve de plus, si besoin est, du sophisme qui entache de telles idéologies, puisque, force est de constater que c'est cet interventionnisme-là qui, aujourd'hui, les sauve d'un naufrage avéré (à leur corps défendant ?). Cette «main invisible» qui est sensée réguler le marché, ne se transforme-t-elle pas aujourd'hui, plutôt, en une main criminelle, guidée par la plus rapace des cupidités prédatrices ? Sinon comment expliquer que des dirigeants de banques spéculent à outrance sur des actifs fictifs (cas des subprimes) et ce, dans le but essentiel d'augmenter leurs revenus (bonus) ?! En effet, «titriser» des «actifs toxiques» en grande quantité pour les «noyer dans le marché du crédit» n'est-ce pas en soit une opération malhonnête ? Très schématiquement, la titrisation est la transformation de certains actifs (créances notamment...) en titres négociables sur le marché des valeurs. Technique financière très sophistiquée, la titrisation est née au Etats-Unis dans les années soixante et elle ne s'est répandue en Europe qu'au début des années 2000. Les risques liés à cette pratique sont de plusieurs ordres et la crise des subprimes a révélé les graves dérives des re-titrisations successives (en cascade) à outrance des créances immobilières aux Etats-Unis, lesquelles créances (sous formes de titres) sont passées dans les marchés mondiaux de capitaux pour finir en «bulle immobilière» dont l'éclatement est à l'origine de la crise que l'on sait. A côté de cela, les dégâts provoqués par l'affaire MADOFF, quoiqu'énormes, paraissent une goûte d'eau dans l'océan. En effet, Bernard Madoff, ce septuagénaire aux cheveux grisonnants, à la notoriété sans faille, aux allures de vénérable vieillard à qui on aurait «donné le bon dieu sans confession», s'est révélé aux yeux du monde entier, un incommensurable escroc. Il a roulé son monde dans la farine pendant toute sa longue carrière de financier véreux. Fraudeur «de génie», il avait monté ce qu'on appelle une «chaine de Ponzi», c'est-à-dire une escroquerie qui correspond schématiquement à une mise en place d'un système d'investissement consistant à recueillir auprès d'investisseurs confiants, des dépôts de fonds à des intérêts alléchants (jusqu'à 17 %), ce qui n'est pas loin de nous rappeler une affaire proche de nous, «KHALIFA» pour ne pas la nommer. L'affaire MADOFF pourrait avoir porté sur pas moins de 65 milliards de dollars ce qui correspond en volume, à un peu plus du tiers des réserves de changes d'un pays pétrolier comme l'Algérie, au moment où ce pays a atteint son embellie financière la meilleure, voire la plus belle de son existence. C'est aussi, pour avoir une autre proportion, les 2/3 du budget général de l'Algérie pour 2009 (80 milliards de dollars). La «chaine de Ponzi», a été utilisée en 1920 par son inventeur, Charles Ponzi dont elle porte le nom, un américain de Boston, qui, par ce système avait arnaqué environ 40 000 personnes. Ce qui lui a permis d'engranger quelques 15 millions de dollars. Ce qui n'était pas rien pour l'époque. Le système est appelé également «vente pyramidale» et aussi «cavalerie». Il fonctionne comme une boule de neige qui grossit sans cesse pour finir en avalanche. En effet, les promesses de profits séduisants, attirent de plus en plus de capitaux, les derniers arrivés servant à remboursé les premiers venus, et ce, seulement dans un premier temps, ce qui permet d'assurer la mise en confiance des investisseurs. Ainsi «la bulle spéculative» continuera de gonfler tant et si bien qu'elle finira par exploser. Ceci pour le principe. Mais dans l'affaire MADOFF, la «bulle spéculative» n'a pas explosé du fait de son existence intrinsèque, c'est-à-dire de sa nature même, comme dans le cas des subprimes pour les banques, mais bien à cause d'un fait du hasard à savoir : la crise financière actuelle. En effet, s'il n'y avait pas eu de crise en octobre 2008, - ce qui apparait sans conteste un imprédictible événement qui n'entrait pas dans les calculs de MADOFF -, celui-ci serait encore à l'heure actuelle entrain de vaquer paisiblement à ses occupations affairistes, boursières et délictueuses, au lieu d'être «à l'ombre» pour 150 ans de réclusion criminelle. Mais l'adage ne dit-il pas que «bien mal acquis ne profite jamais» ? L'homme, un autodidacte issue d'une famille juive newyorkaise, avait commencé sa vie comme maître nageur sur les plages de Long Island. En 1960, il avait 22 ans lorsqu'il créera sa propre entreprise d'investissement. Trader, autrement dit : «opérateur de marché», il réussit à se faire un nom dans la profession, puis une notoriété et une réputation solides sur la place de Wall Street. Il fut même président du NASDAQ entre 1990 et 1993. Le NASDAQ est le deuxième plus grand marché d'actions des Etats-Unis et le premier marché électronique d'actions du monde. En 2008, il était à la tête d'une grande fortune. Donc, pendant 48 ans il berna son monde avec une façade de respectabilité sans faille. C'est seulement après l'effondrement des marchés financiers fin 2008 que certains de ses clients ont demandé à retirer leur argent. A la suite de quoi la bulle explosa. Sinon il n'aurait pas été inquiété. Dès lors, la supercherie est dévoilée au grand jour. Elle apparait dans toute sa scandaleuse imposture. Pourtant, il faut croire que l'homme avait de solides appuis et d'efficaces protections pour ne pas être inquiété pendant si longtemps et même après plusieurs plaintes introduites auprès de la SEC (Securities And Exchange Commission) le gendarme de la Bourse américaine et ce, depuis le début des années 1990. Une autre affaire, peu banale non plus quant au volume de l'argent perdu frauduleusement, (soit 5 milliards d'euros), a aussi défrayé la chronique et fait couler beaucoup d'encre et dont les écheveaux à ce jour, n'ont pas été complètement démêlés. C'est l'affaire de la Société Générale en France. En effet, un trader, Jérôme KERVIEL est devenu une célébrité mondiale en 24 heures en faisant perdre à la banque en question la somme colossale susvisée. En janvier 2008 le PDG de cette banque annonce que l'établissement financier venait de perdre 7,1 milliards d'euros, y compris les pertes mettant en cause J. KERVIEL le trader. A cette même date, il s'agit de la plus grande perte jamais enregistrée dans l'histoire bancaire. Mais la Société Générale, troisième banque de France, sera sauvée par l'intervention du gouvernement français «par patriotisme» dit-on (La banque pouvait être achetée par des étrangers si OPA il y avait eu). Mais ce qui est très étonnant dans cette ténébreuse affaire est que le PDG de cette même banque aurait réalisé une plus-value de 1,3 millions d'euros en revendant les actions au titre de son propre stock-options, et ce en plein crise ! Cela a encore fait beaucoup de vagues évidemment. Moralité : il y a des individus qui profitent habilement des faiblesses juridiques des lois et règlements permissifs et lacunaires du système tout en restant sous leur protection et d'autres, sans scrupules, qui transgressent les dits lois et règlements quand bien mêmes ceux-ci soient permissifs et/ou lacunaires et ce, jusqu'à ce qu'ils soient dévoilés et dénoncés. Aussi, peut-on se demander combien il y a de KERVIEL, de MADOFF ou de KHALIFA encore tapis dans l'ombre des gratte-ciels, des immeubles de luxe, dans des bureaux feutrés où il fait bon vivre, à New York, ailleurs et chez nous, dans ce monde compacte et mystérieux (dans cette jungle touffue est-on tenté de dire) de la finance et du bizness.