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Maddof, le financier juif qui a berné les siens
Il attend aujourd'hui la décision du juge sur son éventuelle incarcération
Publié dans La Tribune le 13 - 01 - 2009

Mondain, jovial, Bernard Madoff, «Bernie», parvenait à capter la confiance de ses futurs clients. Figure emblématique de la communauté juive new-yorkaise, le «génial» financier de 70 ans était très présent dans les activités caritatives et culturelles destinées à renflouer les caisses de la mère patrie. L'entité sioniste enregistre aujourd'hui plus de 600 millions de dollars de pertes. Parmi les victimes du scandale financier figurent des associations, des universités et des compagnies d'assurances.
Le courtier au cœur du scandale était une légende de Wall Street. Une si belle incarnation du rêve américain. Ce maître nageur de Long Island a créé son fonds d'investissement à l'âge de 22 ans, avec seulement 5 000 dollars mis de côté grâce à de petits boulots. Réputé intuitif, ultra rapide, mais surtout très «éthique», il avait fini par s'imposer dans le monde de la finance. Gagnant la confiance de tout le monde et escaladant à une vitesse vertigineuse les échelons du monde des affaires, «Bernie» réussit même à devenir président du Nasdaq, la si prestigieuse Bourse des valeurs technologiques, de 1990 à 1991. Figure emblématique de la communauté juive new-yorkaise, le «génial» financier était un modèle à suivre pour les «siens».
Un réseau édifié sur la consanguinité et la «tzedakah»
En hébreu, la «tzedakah» désigne la charité. Un mot qui a une signification de plus : faire ce qui est juste. En voulant alimenter les comptes d'une myriade d'associations éducatives et caritatives en Israël, des milliers de donateurs juifs américains ont été pris
dans la toile de M. Maddof. Subventionnées par de généreux donateurs américains, ces associations israélites ont subi des pertes de plusieurs centaines de millions de dollars qui vont lourdement grever leur budget dans les prochains mois. Madoff a vraisemblablement exploité ses relations dans le monde de la philanthropie juive pour recruter de nouveaux clients. Une philanthropie qui profite, vraisemblablement, à l'entité sioniste. Au total, les estimations des experts situent entre 600 millions et 1 milliard de dollars l'impact en Israël. Les dégâts réels pourraient être bien supérieurs. L'addition est particulièrement salée pour Hadassah, une puissante association féminine américaine des femmes sionistes qui gère deux importants hôpitaux à El Qods occupée. Ladite association a dévoilé une ardoise de 90 millions de dollars investis avec Bernard Madoff. L'organisation n'hésite pas à soutenir que «cette fraude sans précédent exigera de nous de faire des ajustements nécessaires», avant de souligner que «l'escroquerie n'a en rien affecté notre engagement vis-à-vis de notre mission sioniste fondamentale. Ce sont en effet des périodes turbulentes, mais les principaux piliers de Hadassah restent aussi forts que jamais». Cette association n'est qu'un nom parmi une longue liste d'organisations juives de premier plan et d'investisseurs spéculateurs ayant perdu des sommes substantielles à cause de Madoff. On trouve, par ailleurs, dans cette liste la fondation d'Elie Wiesel, une organisation caritative de Steven Spielberg, le magnat de l'immobilier Mort Zuckerman et la prestigieuse université juive de New York Yeshiva.
Parmi les autres institutions frappées figure le Technion, l'équivalent israélien de polytechnique, qui a essuyé des pertes de plus de
8 millions de dollars. Plus graves sont les pertes des fonds d'investissement détenus par l'American Technion Society, l'association de soutien audit institut, qui étaient contrôlés par Bernard Madoff. Leurs pertes s'élèvent à 72 millions de dollars. Cette association a fourni, depuis plus de soixante ans, un peu plus de 1,3 milliard de dollars au Technion. Quelque 70 autres institutions, universités et collèges, qui recevaient des dons gérés eux aussi en partie par l'ancien patron du Nasdaq, devraient être touchés dans les prochains mois.
Un vrai traumatisme pour les sionistes
Plusieurs des investisseurs escroqués par le gestionnaire financier de Wall Street, Bernard Madoff, sont, comme lui, juifs. Pour bon nombre d'entre eux, la contribution aux causes juives est un élément crucial de leur culture. L'effet de leurs pertes sur le monde philanthropique juif est vu comme rien moins que catastrophique. La plupart des associations venant en aide aux plus défavorisés se préparaient, avant même l'arrestation de Bernard Madoff, à réduire leurs activités à la suite d'une chute des contributions en provenance de la communauté juive américaine touchée par la crise financière. Ces restrictions sont d'autant plus cruellement ressenties qu'Israël se situe parmi les pays où les disparités sociales sont très larges. Selon un récent rapport des assurances sociales, un million et demi d'Israéliens sur 7 millions vivent sous le seuil de pauvreté. «Le secteur associatif et caritatif permettait jusqu'à présent de venir en aide aux exclus et de réduire les tensions sociales», souligne le ministère des Finances de l'entité sioniste. «C'est le plus grand scandale dans l'histoire philanthropique tel que n'importe qui peut se le rappeler», a déclaré Gary Tobin, un des principaux experts en philanthropie juive. «Nous ne savons pas encore son ampleur. Il y a des fondations qui ont perdu des capitaux importants, des donateurs qui ont perdu leur capacité de donner et des organismes dont les investissements ont tout bonnement disparu.» Et les sionistes ne sont pas au bout de leur peine si l'on croit leurs multiples déclarations. «Ajoutez à cela les retombées
psychologiques, et elles sont simplement dévastatrices», a déclaré Tobin, président de The Institute for Jewish and Community Research (l'Institut pour la recherche et la communauté juive). L'onde de choc a traversé la communauté philanthropique depuis que les nouvelles ont révélé que le très apprécié et respecté Madoff, auparavant président du marché boursier du Nasdaq, était au centre d'une escroquerie portant sur 50 milliards de dollars au détriment d'investisseurs.
La liste des noms des organismes et des individus ayant été touchés s'allonge de jour en jour. De la fondation du cinéaste Steven Spielberg au magnat et propriétaire du quotidien New York Daily News, Mortimer Zuckerman, en passant par l'associé de Dreamworks Spielberg, Jeffrey Katzenberg, ou encore la fondation du prix Nobel Elie Wiesel, au fil du jour, les victimes de Bernie découvrent l'étendue de la supercherie. Beaucoup ne savent même pas encore s'ils sont touchés par le scandale. D'innombrables fondations familiales à travers la Côte Est, éléments vitaux de tant de causes juives, ont été dévastées. Parmi elles, la fondation de la famille Shapiro à Boston, a dit avoir perdu 145 millions de dollars. «Je ne pense pas que nous connaîtrons la portée de tout ceci avant un an», a dit Mark Charendoff, le président du réseau juif de donateurs, une organisation écran pour des fondations familiales. «Il y a des gens qui se sont réveillés et ont dit, je remercie Dieu, que je n'étais pas impliqué», a noté Charendoff. «Et alors ils découvrent que, d'une façon ou d'une autre, ils l'étaient à travers des fonds secondaires.».
«La communauté juive sera différente quand tout ceci sera passé»
La perte pour la philanthropie juive dans son ensemble est surtout morale : être trahie par un des siens. «Je considère que c'est, si l'on peut dire, une évaluation conservatrice», a dit Jonathan Sarna de l'université de Brandeis, une des principales autorités de l'histoire juive américaine. «Elle est catastrophique. Il n'y a aucun autre mot. La communauté juive sera alors différente quand tout ceci sera passé.» Pour toutes ses implications, le scandale a orienté les projecteurs sur un club de Palm Beach en Floride. Madoff était un membre du très exclusif Club national de Palm Beach, et il y a recruté beaucoup d'investisseurs. Un des éléments intéressants au sujet de ce club est que ses membres doivent non seulement avoir de l'argent mais faire aussi des donations annuelles importantes, peut-être même des centaines de milliers de dollars. «Il y a réellement une telle condition», a reconnu à l'Associated Press (AP) un des membres, sous couvert de l'anonymat, ayant essuyé d'énormes pertes avec Madoff.
Pour Sarna, le professeur de Brandeis, cette règle en dit long sur l'importance de la charité dans les cercles juifs. «C'est une preuve que vous êtes un membre responsable de la communauté juive. Tzedakah (faire ce qui est juste), c'est infiniment dans ce système de valeurs», a dit Sarna. Etre trahi par un des leurs dans l'acte même de donner a été le plus dévastateur pour ces investisseurs, a noté Sarna. «Ce qu'ils faisaient était intrinsèquement bon, et ils voient toute cette bonté récompensée par de la méchanceté.» Les experts estiment qu'environ 5% de tout l'argent donné par les juifs américains et 20% de ce qui est donné en particulier aux causes juives vont en Israël, où les hôpitaux, les universités, les synagogues et d'autres organisations à but non lucratif sont fortement dépendants de la philanthropie américaine. Au moment où ces établissements avaient déjà souffert du ralentissement de l'activité économique, avant que le scandale de Madoff n'éclate, l'arrestation de celui-ci et l'effondrement de sa société de placement en valeurs mobilières ont accéléré la fin pour certains. Parmi ces fondations, qui contribuent à beaucoup de causes en Israël, la fondation Chais qui a déposé son bilan en raison de ses pertes avec Madoff. Dans le secteur privé, on commence aussi à faire ses comptes. Plusieurs compagnies d'assurances ont connu des déboires dans des fonds gérés par Bernard Madoff. «Les statistiques exactes ne sont pas connues pour des raisons d'image de marque, car il est embarrassant pour des institutions financières de reconnaître avoir été grugées pendant des années sans avoir exercé le moindre contrôle sérieux sur la gestion des fonds confiés à Madoff», affirme-t-on. Pour la Leumi, le deuxième établissement israélien, le dommage est plus évident : le fonds d'investissement américain Gabriel, ébranlé par l'affaire Madoff, a l'intention de vendre 5% du capital de la Banque israélienne pour couvrir une partie de ses pertes. Le traumatisme est tel que les autorités mettent la dernière main à un système de contrôle dont l'objectif déclaré est d'empêcher un Madoff israélien de sévir. Les craintes portent sur les quelque 10 milliards de dollars engrangés par les fonds de capital-risque qui financent les entreprises dans le secteur clé de la haute technologie. Jusqu'à présent, l'entité sioniste avait suivi le modèle américain. Désormais, c'est la législation britannique de supervision, considérée comme beaucoup plus contraignante, qui sert de référence.
De «Jacob le menteur» à Bernie le «baratineur»
«Génie» de la finance et jovial partenaire de golf de célébrités de la jet-set mondiale, il avait conquis au fil des années la confiance des plus riches investisseurs : des particuliers fortunés, des fonds d'investissement et de grandes institutions financières internationales. Considéré comme l'un des gourous de Wall Street, ce courtier américain à l'allure bienveillante était avant tout une légende aux Etats-Unis. Sa montée fulgurante n'a soulevé aucun doute sur la nature de ses affaires. Bien au contraire. Sa présidence du Nasdaq, après en avoir révolutionné le fonctionnement, était l'illustration de son doigté.
Les plus riches juifs américains, de vieilles familles de Long Islan et de Floride, étaient souvent démarchés par un «makher» (un terme yiddish pour désigner un homme important) qui leur vantait les mérites du fonds Madoff et expliquait qu'il leur servirait
d'intermédiaire auprès de l'influent M. Madoff. Pour vendre ses prestations et son fabuleux rendement garanti jusqu'à 11% par an,
M. Madoff mettait en avant ses valeurs d'équité et de haute éthique. Cependant, sa mystérieuse méthode d'investissement et le personnage lui-même étaient à l'origine de nombreuses rumeurs. Comment de tels rendements étaient-ils possibles ? Où allait l'argent ? M. Madoff, à qui l'on connaissait plusieurs propriétés immobilières et un yacht aux Bahamas, mais dont la fortune restait discrète, était-il si «éthique» ? La US Securities and Exchange Commission (SEC), gendarme de la Bourse, avait enquêté à plusieurs reprises sur les étonnants rendements de l'homme d'affaires, sans jamais rien mettre au jour. Pourtant, Harry Markopolos, un concurrent de Bernard Madoff Investment Securities (BMIS), avait donné l'alerte dès 1999, en avisant lui-même la SEC. Car, même en période de recul boursier, le fonds Madoff affichait des résultats exceptionnels. De 1996 à 2008, il n'a officiellement connu que cinq mois négatifs. Non seulement les intérêts offerts par BMIS étaient très avantageux, mais ses commissions, calculées non pas sur les montants gérés mais sur les transactions effectuées, étaient très en dessous de celles pratiquées ailleurs. Il semble que le mariage de la nièce de Madoff avec un ancien fonctionnaire de la SEC pourrait avoir un lien sur le comportement des autorités. Cela n'a inquiété personne. En tout cas pas la SEC. Sinon comment expliquer que, malgré trois enquêtes en huit ans, malgré le fait que BMIS avait cessé d'être enregistré auprès d'elle depuis septembre 2006, elle n'a jamais rien vu ? Mieux, elle avait nommé M. Madoff membre
de son comité sur la structure des marchés…
Sur la chaîne de télévision américaine CNBC, les commentateurs se déchaînaient. Seule la «relation consanguine» entre Bernie Madoff, ex-patron du Nasdaq, la Bourse des valeurs technologiques, et les dirigeants de la SEC explique leur exceptionnelle bienveillance, affirme-t-on.
Comment a-t-il escroqué ses clients ?
M. Madoff recevait par le biais de son fonds (BMIS) des capitaux à gérer qu'il investissait dans des hedge funds (fonds d'investissement à risque), dont la performance était réputée supérieure à la moyenne. Lorsque la performance n'était pas au rendez-vous, au lieu de diminuer le rendement distribué aux investisseurs, il prenait tout simplement l'argent des nouveaux investisseurs et l'utilisait pour payer les anciens. De ce fait, il donnait l'impression d'une performance exceptionnelle, sur la base de laquelle il attirait de plus en plus d'investisseurs, mais, année après année, il dilapidait le capital que ceux-ci lui avaient confié. Pour ses clients les plus fortunés, «Bernie» avait créé une «liste A», génératrice de rapports encore plus élevés, mais pour laquelle la mise était plus conséquente. Pour les appâter, ses courtiers «ratissaient» les country clubs et les golfs les plus huppés. Là, ils expliquaient que seule
leur relation personnelle avec M. Madoff pouvait leur en ouvrir l'accès. Ensuite, ce dernier avait sa manière d'instiller la confiance.
Au départ, a expliqué l'analyste financier Richard Spring, de Boca Raton en Floride, qui lui servait de propagandiste, M. Madoff insistait pour que ses nouveaux clients ne lui confient que des sommes modestes. Bernie voulait gagner petit à petit leur confiance. Au Wall Street Journal, il confie que tout analyste qu'il est, M. Spring s'y est lui-même laissé prendre. Il a confié à BMIS 11 millions de dollars, soit 95% de sa fortune. Quand la crise boursière éclate, nombre d'investisseurs veulent récupérer leur mise. Trop en même temps. M. Madoff ne peut pas rendre l'argent. Il fait part de la situation à son fils qui prévient les autorités. Le 11 décembre, Bernard Madoff est arrêté par le FBI. C'est à ce moment-là que l'on a découvert le pot aux roses. De riches particuliers, de grandes institutions financières, notamment américaines, japonaises, suisses, espagnoles, françaises, britanniques, et des fondations figurent parmi les victimes. Certains de ces investisseurs ont directement confié leurs fonds à la société de M. Madoff. D'autres ont confié des sommes d'argent à des fonds d'investissement qui les ont placés chez M. Madoff.
Là n'est pas la moindre des énigmes de ce qui pourrait constituer la plus grande escroquerie de l'histoire de la finance. Habituellement, les victimes qui se laissent prendre à la fraude dite «pyramidale» (celle où les investisseurs d'hier sont rémunérés avec les dépôts de leurs successeurs et non avec les produits de leurs placements) sont de petits porteurs aveuglés par leur ignorance. Cette fois, les premiers floués émargent au gratin de la finance. Non seulement de riches particuliers, mais aussi de prestigieuses institutions financières se sont laissé prendre.
Des énigmes, les enquêteurs du FBI (Bureau fédéral d'investigations) devront en déchiffrer d'autres. Depuis quand durait la fraude ? Dix ? Vingt ans ? Plus ?
M. Madoff assure avoir agi seul, mais qui peut y croire ? Comment expliquer que le commissariat aux comptes de BMIS ait été un minuscule cabinet de l'Etat de New York ? Comment ce simple fait n'a-t-il pas suscité d'interrogations ? D'autant que les résultats du fonds Madoff sont apparus encore plus étonnants au cours de la période récente.
Plus les marchés boursiers s'effondraient plus sa rentabilité fictive faisait figure d'exception. Comme si le principe le plus basique du boursicoteur fonctionnait malgré la crise : plus on gagne, moins on est tenté de s'interroger sur le pourquoi et le comment
du gain.
L'énigme maîtresse
Il reste aujourd'hui l'énigme maîtresse. Où sont les 50 milliards de dollars ? Combien en reste-t-il dans les caisses ? Combien se sont évaporés ? Et comment ? Quand Bernard Madoff a été démasqué, il a affirmé aux enquêteurs que son fonds a perdu 50 milliards de dollars. Cet argent a été utilisé pour payer aux clients du fonds, pendant des années, le rendement promis. Avec la crise financière, la valeur des actifs détenus par M. Madoff pour le compte de ses clients a baissé dans des proportions gigantesques, donnant le coup de grâce à ce système frauduleux. Bernard Madoff a gagné de l'argent grâce aux commissions perçues pour gérer les actifs de ses clients. Mais il n'a, apparemment, pas détourné de sommes supplémentaires, selon les premiers éléments de l'enquête, et n'aurait pas de magot caché. Il est aujourd'hui ruiné. M. Madoff a été assigné à domicile depuis sa mise en cause, alors que le président de la Commission des opérations en Bourse des États-Unis doit répondre du fait que cette fraude ait pu continuer pendant une décennie. Le procureur qui a reporté vendredi sa décision à aujourd'hui avait expliqué la semaine dernière que Bernard Madoff et son épouse ont envoyé des bijoux précieux et des montres de marque à leurs proches le 24 décembre, violant l'interdiction qui leur était faite de se départir de leurs objets de valeur. Cela prouverait que le financier chercherait à protéger ses actifs et à mettre à l'abri l'argent escroqué. L'audience, qui décidera de son placement ou non en détention, a commencé lundi dernier à New York. L'un des colis de Noël contenait des montres et des bijoux estimés à plus d'un million de dollars. Dans deux autres paquets se trouvaient d'autres parures et des montres de luxe. Les enquêteurs avaient également trouvé dans les bureaux de Bernard Madoff 100 chèques signés, d'une valeur totale de 173 millions de dollars, qu'il s'apprêtait à envoyer à des proches, au moment de son arrestation le 11 décembre, avait déclaré jeudi le parquet de New York. Arrêté le 11 décembre pour escroquerie, l'ancien patron du Nasdaq a alors payé une caution de 10 millions de dollars pour rester en liberté. Il vit actuellement assigné à résidence dans son loft de Manhattan, sous la surveillance d'un bracelet électronique.
G. H.


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