Le marché national des produits agricoles, avec des prix de produits de large consommation en hausse constante, devrait connaître une mini-révolution prochainement. Avec des prix qui préoccupent les consommateurs, avec des fourchettes allant jusqu'à 80 dinars ces derniers jours pour la tomate ou près de 160 DA/kg pour les petits pois, le secteur agricole n'est pas prêt pour répondre aux exigences d'un marché depuis longtemps déboussolé. Pour réorganiser la filière, particulièrement celle commerciale des produits agricoles, le ministère de l'Agriculture vient de mettre en place une nouvelle organisation. Autant pour la production que pour la commercialisation des fruits et légumes, ainsi que les viandes. Cette réorganisation va toucher des entreprises de deux sociétés de gestion des participations de l'Etat (SGP), la Société de gestion des participations des productions animales (SGP Proda) et la Société de développement agricole (SGP SGDA). Selon un responsable au ministère de l'Agriculture, «ce redéploiement devra permettre à ces deux SGP de répondre aux exigences du marché et d'exécuter avec le maximum d'efficience les missions qui leur sont confiées dans le cadre de la politique de régulation» du marché et des produits agricoles. L'annonce de cette réorganisation intervient au moment où de plus en plus de voix, tant au sein des entreprises publiques liées au secteur agricole qu'au niveau des structures de contrôle du commerce, pointent du doigt l'absence de mécanismes de régulation des prix, et l'anarchie qui règne au niveau de la fixation des prix des produits agricoles. Le consommateur est, en outre, pris en tenailles entre des producteurs qui accusent les mandataires, alors que ceux-ci pointent du doigt les producteurs et les propriétaires d'aires de stockage sous froid. Bref, la pagaille est telle dans la filière agricole que le ministère, accusé de passivité, veut secouer le cocotier. Ainsi, plusieurs entreprises (publiques) dépendant de ces deux SGP vont voir le jour. Leur mission : casser les prix des produits agricoles en intervenant directement dans l'une des filières les plus prisées par les professionnels : le stockage sous froid et l'entreposage. Plusieurs entreprises spécialisées respectivement dans l'entreposage frigorifique, l'abattage et le traitement des viandes rouges ainsi que dans le développement rural vont être créées, indique-t-on au ministère de l'Agriculture. En clair, c'est toute la filière, très rentable, du stockage et du conditionnement sous froid des produits agricoles, dont les viandes blanches et rouges, qui va être investie par le secteur public. En toile de fond de cette réorganisation, les pouvoirs publics, à travers les SGP, veulent lutter contre la spéculation touchant certains produits à des périodes précises, ainsi que pour casser les prix des produits susceptibles d'être l'objet de manœuvres spéculatives, comme les viandes et les primeurs. Pour autant, est-ce que ces futures entreprises publiques auront une efficacité à toute épreuve lorsque c'est tout le marché national des produits agricoles et dérivés qui a besoin d'être réorganisé. L'expérience des ex-offices agricoles est là pour montrer la limite d'un interventionnisme de l'Etat, toujours en aval des filières ciblées, mais jamais en amont. D'où les dérégulations permanentes du marché des produits agricoles, d'autant que le secteur compte des filières qui ne peuvent être gérées par des décisions administratives, mais par une autorégulation au jour le jour, dans des marchés de gros structurés. Ce qui n'existe pas encore chez nous. D'où cette interrogation de savoir quels seront, à moyen terme, les effets de la création de ces entreprises sur le porte-monnaie de la ménagère.