L'Alzheimer, invalidante pour les malades et très perturbante pour l'entourage, n'est diagnostiquée chez les sujets atteints qu'à un stade avancé. Au moment du diagnostic, estiment des médecins spécialistes, les sujets présentent déjà des signes de démence sévères pour une maladie qui, généralement, met cinq ans à s'installer. Pour d'autres spécialistes, des neurologues et des psychiatres, les cas d'Alzheimer sont de plus en plus fréquents dans les consultations par rapport au passé. Une situation due à une prise de conscience de la maladie ou à sa médiatisation ces dernières années ? Difficile pour ces spécialistes d'être fixés sur ce point. Ce qu'ils confirment, par contre, est l'arrivée du malade chez le médecin après une prise de conscience de son entourage sur un état devenu gênant. L'Algérie compte actuellement 100.000 cas d'Alzheimer pour 35 millions d'habitants. Un taux qui n'est pas très inquiétant pour le moment, selon le professeur Arezki Mohamed, président de la Société algérienne de neurologie et neurophysiologie de la clinique SANNC, contacté. Mais il incite à réfléchir à une meilleure prise en charge des malades à l'avenir et à la création de centres d'accueil du jour pour un diagnostic précoce de la maladie. A l'apparition des premiers signes de l'Alzheimer et notamment les trous de mémoire, les proches incombent souvent ces symptômes au vieillissement de la personne et ne ressentent pas l'utilité d'aller consulter un médecin. Ces dysfonctionnements de la mémoire, toujours en première ligne, sont généralement banalisés par le patient, sa famille et le médecin. Mais avec le temps, la maladie progresse d'un état modéré à un état sévère. A ce stade irréversible, explique un psychiatre exerçant à Oran, le traitement est inefficace. L'âge moyen du déclenchement de l'Alzheimer varie entre 60 et 65 ans. Cependant, précise ce psychiatre, «nous avons détecté la maladie chez des cas exceptionnels et dont les sujets sont âgés de 50 ans». Pour le professeur Arezki, «un diagnostic précoce de la maladie serait efficace dans la mesure où elle peut être stabilisée par le traitement. Un malade dans un état avancé peut mettre sa vie en danger, à l'exemple d'une personne atteinte d'Alzheimer qui sort vers 3 h du matin de chez elle pour aller marcher sur l'autoroute». Les traitements disponibles en Algérie contre l'Alzheimer, s'ils sont démarrés assez tôt, peuvent parfois faire reculer le passage à la perte d'autonomie, jusqu'à la mort naturelle. Pourquoi créer des centres d'accueil du jour ? Le président de la SANNC explique qu'en raison du vieillissement de la population et de l'accroissement de la durée de vie des populations, le nombre de personnes touchées par la maladie d'Alzheimer va considérablement augmenter dans les années à venir. Ces centres d'accueil, dont un seulement existe actuellement au niveau de la wilaya de Blida, représentent une structure de soins pour les malades. Quant aux médecins, M. Arezki insiste sur la formation de ces praticiens pour mieux diagnostiquer la maladie et orienter les sujets présentant des symptômes d'Alzheimer vers les consultations de mémoire. Les consultations de mémoire existent au niveau des centres hospitaliers de Bab El-Oued, Aït Idir, Mustapha Bacha et Ben Aknoun pour Alger, Frantz Fanon à Blida, Nedir Mohamed à Tizi-Ouzou, Errazi pour Annaba et Constantine, ainsi qu'au niveau des cabinets privés des psychiatres et des neurologues. Au niveau d'Oran, il n'existe pas encore un service spécialisé pour ce genre de consultation au niveau des établissements hospitaliers publics. Les malades sont orientés vers le privé ou vers le service psychiatrique. Au niveau mondial, 104 ans après sa découverte par un médecin allemand dont elle porte le nom, la maladie d'Alzheimer touche aujourd'hui quelque 25 millions de personnes.