Le destin «commun» de l'Europe et des pays de la rive Sud Sans le Sud et l'Est de la Méditerranée, l'Europe ne sera plus à la table des décideurs de l'économie. Sans l'Europe, le Sud méditerranéen risque d'être le perdant de la mondialisation. C'est la teneur de l'appel des entrepreneurs aux dirigeants de l'UPM. Les entrepreneurs méditerranéens présents à Hammamet pour les deuxièmes entretiens de la Méditerranée organisés par l'Institut arabe des chefs d'entreprise (IACE) et l'IPEMED (Institut de prospective économique du monde méditerranéen) ont exprimé leur attachement au projet méditerranéen. Face aux doutes sur le projet de l'UPM, qui sont accentués avec le report du sommet de Barcelone, les dirigeants d'entreprises méditerranéennes ont lancé un appel aux chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union pour la Méditerranée, et ont estimé leur conviction que «l'analyse qui a été à l'origine du lancement de l'Union pour la Méditerranée, le 13 juillet 2008 à Paris, est de toute première actualité». Le thème récurrent au cours de ces travaux que l'Europe a besoin de constituer, avec le Sud et l'Est de la Méditerranée, un grand ensemble capable d'être présent dans les grands arbitrages économiques mondiaux, a été mis en exergue. Il est temps, indique la «Déclaration de Hammamet», que «l'Europe prenne l'exemple sur les grands ensembles régionaux qui se mettent en place en Amérique ou en Asie». La déclaration estime qu'il y va autant de l'intérêt de l'Europe que des pays du Sud et de l'Est de la Méditerranée. Dans les différents ateliers organisés au cours de ces entretiens, beaucoup ont mis en relief que dans les reconfigurations en cours de la donne économique mondiale, la vocation du projet euro-méditerranéen est de se constituer en pôle économique intégré face aux regroupements régionaux qui se mettent déjà en place en Asie et en Amérique. De nombreux intervenants européens ont estimé que l'Europe est en train de négocier un tournant qui, s'il est raté, lui enlèvera la possibilité d'être un pôle économique important. La crise de l'euro a du bon Le chef de l'Organisation patronale tunisienne (UTICA), Hédi Djilani, qui a dit sa conviction que le Maghreb se fera avec ou sans les politiques, a estimé que la crise de l'euro avait quelque chose de bon car elle servait de piqure de rappel aux réalités à l'Europe. L'appel des dirigeants d'entreprises méditerranéennes a été largement marqué par cette sorte de conviction que l'Europe et le Sud et l'Est de la Méditerranée trouveront un salut mutuel en s'engageant dans un projet d'intégration. «L'Europe seule serait condamnée au déclin démographique, économique et politique», souligne la déclaration en ajoutant que «dans le même temps, les pays des rives Sud et Est de la Méditerranée risquent d'être des laissés-pour-compte de la mondialisation». La conclusion coule de source aux yeux des entrepreneurs, qualifiés de «bâtisseurs» de l'Euromed par plusieurs intervenants : «Le destin de l'Europe et de ses voisins du Sud et de l'Est est commun». Ce destin commun suppose une «vision ambitieuse pour un avenir commun souhaité et assumé, une plus grande solidarité qui renforce la proximité et la complémentarité». L'appel souligne l'importance de la création d'institutions de régulation notamment une banque méditerranéenne du développement communes qui serait à la fois «un symbole fort de la volonté politique mais également un garant de bonne gouvernance au service du développement et des populations». L'appel considère que seul un «partage de la valeur ajoutée, maximisant la part de chacun, permettra à la région de se positionner solidairement en tant qu'acteur majeur dans la compétition internationale». Les entrepreneurs ont apporté leur soutien aux «7 projets» élaborés par l'Ipemed et ont invité les chefs d'Etat et de gouvernement de l'UPM d'en prendre connaissance et d'engager le plus tôt possible les moyens pour appliquer ces recommandations. Ces 7 projets portent, notamment, sur l'intégration de l'espace financier en Méditerranée, la sécurité alimentaire et le droit à l'alimentation, la création d'une «agence méditerranéenne de l'eau», une politique euro-méditerranéenne commune de l'énergie Les débats en ateliers ont été d'une grande richesse. Les obstacles politiques ont été évoqués de manière franche mais pour souligner qu'ils ne doivent pas être une raison de renoncer au projet euro-méditerranéen.