La chute de la monnaie unique européenne par rapport au dollar est-elle de nature à affecter l'économie marocaine, dont le dirham, la monnaie locale, est fortement ancré à l'euro ? Eléments de réponses. La parité euro/dollar était jeudi dernier de 1,20, toujours dans les niveaux les plus bas depuis quatre ans. En près d'un semestre, soit depuis décembre 2009, la monnaie unique européenne a perdu près de 20% de sa valeur par rapport au dollar. Les échanges extérieurs du Maroc sont réalisés principalement avec l'Europe, notamment la France et l'Espagne. En 2009, les importations du Maroc à partir de l'Hexagone ont représenté 15,7% du total des importations, tandis que la part des exportations vers ce pays était de 24,5%. Les recettes MRE (marocains résidents à l'étranger) en provenance de la France se sont élevées à 21,45 milliards de DH, soit 42,7% du total des recettes MRE, et les investissements français ont représenté 28,7 % de l'ensemble des investissements directs étrangers (IDE). L'Espagne, en deuxième position dans le commerce extérieur du Maroc, a absorbé 21,2% des exportations totales du pays et fourni 12,1% des importations marocaines. Selon la Banque centrale du Maroc, un euro s'échangeait au mois d'avril 2010 contre 11,18 dirhams, au lieu de un euro contre 11,30 dirhams en janvier 2010, soit une appréciation de la monnaie nationale de 1,06%. Mais, en glissement annuel, la Banque centrale indique que le dirham s'est déprécié de 0,29% par rapport à l'euro, de 2,73% par rapport à la livre sterling et de 4,08% par rapport au yen japonais. Faible ancrage sur le dollar Mais, avec le billet vert, les données sont différentes, puisque le dirham n'est pas ancré au dollar. Le rebond du dollar par rapport à l'euro a ainsi affecté le dirham, qui s'est déprécié de près de 6 % entre fin décembre 2009 et fin avril 2010, selon la Banque centrale du Maroc. Si c'est une bonne nouvelle pour les exportations, elle est mauvaise pour les importations. Le Maroc, importateur net de produits pétroliers, sera ainsi pénalisé par la hausse de la facture pétrolière, plus en valeur qu'en volume. Elle a atteint les 2,1 milliards de dirhams, en hausse de 51%, d'autant que les prix du brut sont fixés en dollars. En outre, la dette, libellée en dollars, va également s'apprécier légèrement, mais cette appréciation est compensée par le gain tout aussi léger, réalisé sur la dette libellée en euros. «Dans la mesure où la structure de la dette en devises reflète grosso modo la composition du panier de référence du dirham, nous ne nous faisons pas de souci sur les effets des fluctuations monétaires. Il y a un équilibre qui s'opère», selon un économiste de la place. Actuellement, la dette extérieure publique, celle du Trésor et celle garantie par l'Etat (entreprises publiques, collectivités locales), est composée à 72,7% en euros, 8,6% en dollars, 6,2% en yens japonais et 12,5% en autres monnaies. La dette extérieure du Trésor, elle, est à 76,7% en euros, 10% en dollars, 3,3% en yens et 9,5% en autres monnaies. Et, si, pour l'heure, les grands équilibres semblent ne pas être affectés, des experts estiment que la tendance pourrait être inversée et constituer une menace pour le commerce du Maroc si le dollar continue son ascension.