Le rôle du président de la République dans la fédération des efforts de lutte contre le terrorisme en Afrique hautement salué    M. Belmehdi préside l'ouverture de la 20e édition du Concours international du Prix d'Alger de récitation et de psalmodie du Saint Coran    L'Agence internationale de l'énergie (AIE) s'attend à des marchés tendus cette année    Le dialogue au lieu de la confrontation    Le Général d'Armée Saïd Chanegriha reçoit le chef des Forces de défense populaire ougandaises    L'entité sioniste a perdu la guerre    L'ADN de la classe politique ukrainienne (Partie III)    Emergence d'une forte avance chinoise dans ses capacités de guerre aérienne    Saâdaoui met en place la Commission nationale d'évaluation du niveau scolaire    Réhabilitation et mise en valeur des espaces verts    81 foyers raccordés au gaz naturel à Brabria    Alliance Algérie-Europe pour l'hydrogène vert    Générale de la pièce «Ech'Chabih»    Renforcement des mécanismes de financement, amélioration du cadre réglementaire et formation parmi les recommandations phares    Lancement de travaux d'aménagement de monuments historiques et de cimetières de chouhada    Tennis : Installation d'une commission d'homologation des infrastructures    Conseil de la nation : le groupe de travail chargé de l'examen des avant-projets de loi relatifs aux partis politiques et aux associations achève ses travaux    Muay thaï : L'Algérien Anane défie l'Ecossais Carrillo le 24 janvier    Du foot aux couleurs africaines    Incendie dans une station de ski à Bolu: le président de la République présente ses condoléances à son homologue turc    Le texte de loi relatif à la protection des personnes à besoins spécifiques renforce les mécanismes de prise en charge de cette catégorie    Ramadhan 2025: une abondance de produits agricoles grâce à une planification proactive    Le président de la République reçoit les membres du Bureau du Conseil supérieur de la jeunesse    Renouvellement des fédérations 2025-2028: des femmes à la tête de cinq instances sportives    ONU: Attaf rencontre à New York nombre de ses homologues de pays frères et amis    Poste et Télécommunications: lancement d'un concours pour le recrutement de 476 employés    Une délégation parlementaire inspecte des sites touristiques et archéologiques à Timimoun    CAN 2025: le tirage au sort le 27 janvier    Cyclisme/Tour de Mauritanie 2025 : la sélection algérienne à pied d'œuvre à Nouakchott    Mansouri préside à Johannesburg les travaux de la 9e réunion du Comité des points focaux du MAEP    Formation professionnelle: plus de 4.000 nouveaux postes pédagogiques offerts pour la session de février 2025 à Tébessa    Mostaganem: des programmes de développement au profit des communes de la daïra de Sidi Lakhdar pour plus de 1,3 milliard DA    Clôture des travaux du colloque national sur la sécurité de la mémoire nationale    Ramadhan: une rencontre sur l'organisation de la filière avicole et l'approvisionnement du marché    Journée nationale de la Commune    Caravane de formation sur les opportunités d'investissement et d'entrepreneuriat au profit des jeunes        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«Kacid fi Tadheloul» de Tahar Ouattar Se mettre ou se démettre
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 13 - 11 - 2010

Tahar Ouattar est mort en ce vendredi, jour du Ramadhan. Il est parti, emporté par cette maladie longtemps soignée mais qui devait avoir raison de lui.
Seulement, bien avant de nous quitter à jamais - il se savait qu'il était grièvement malade-, l'auteur de «l'As» a préféré tirer un dernier coup de baroud, un baroud d'honneur pensait-il probablement, avant de tirer sa révérence. Et quel coup, celui-là… !? En visant bien dans le mille, il ne pouvait cibler mieux que cette administration algérienne, cheville ouvrière de l'Etat républicain mais surtout source de tous les dépassements et misères des gens. Le titre de son dernier-né s'intitule: «Kacid Fi Tadhaloul» (le fonctionnaire humilié, en quelque sorte) couronne ce parcours élogieux comme ce palmarès culturel déjà très riche et des plus étoffés.
Conçu tel un bébé sur un lit d'hôpital, celui parisien où se soignait notre écrivain, le dernier-né de la riche collection de notre défunt auteur s'attaque de front à notre administration. Plutôt à ces comportements très négatifs des gens qui y officient, dans toute leur arrogance, leur impunité et leurs soumissions aux nombreux dépassements de leurs supérieurs hiérarchiques. Tahar Ouattar, l'auteur, le journaliste et le militant, par le maquis et par l'expression écrite, s'est alors définitivement départi et dessaisi de ses deux armes : celle de poing et d'appoint, celle de droit et de loi, de foi et bon aloi, celle de défense et de l'offense. Avant même que l'encre ne sèche ou ne vienne à lui manquer, sa plume s'est arrêtée brusquement en lui livrant un dernier titre, son dernier-né, accouché dans la douleur de la maladie qui le rongeait déjà.
Ecrit en deux temps, c'est à Paris qu'il devait être finalisé après avoir été pour un moment largement entamé en Algérie. Le titre parle de lui-même. Il s'adresse aux tout premiers responsables de notre administration avant même de le faire pour le reste de ses administrés. Il parle crûment et très franchement de ce fonctionnaire humilié. De cet esprit malveillant qui ronge l'appareil de l'Etat, lequel malheureusement définit dans une large mesure nos relations avec l'autre et avec les institutions de la république.
L'ouvrage en question, dans sa version originale, est écrit en langue arabe et est édité au tout début de l'année 2010 aux éditions «Espaces libres» que dirige Madame Zineb Laaouedj. De format moyen, Il contient 146 pages. Sa rédaction, terminée le 03 octobre 2009, marque également la fin d'un palmarès élogieux d'un écrivain arrivé au bout du rouleau, disposé à partir en retraite, et tout décidé à tenir le monde de la littérature comme seul témoin sur ses nombreuses œuvres, sur son parcours presque sans faute et sur sa course effrénée et titanesque. Il se compose de deux grandes parties ayant pour sous-titres : «l'hypothétique» et «la soumission» que ponctue vers la fin une mini-conclusion, faite probablement de manière très précipitée ou à la hâte. Marquant à jamais la vie d'un auteur à bout de souffle physiquement puisque luttant depuis un bon moment contre sa maladie, léguant à l'histoire de la littérature algérienne, seule héritière, son très riche et varié patrimoine. Dans cet ouvrage, le dernier-né d'une lignée de vrais produits du terroir chantant tantôt la gloire du pays, tantôt la bravoure de ses martyrs, l'auteur du «le palais et le pécheur», son chef-d'œuvre incontestable, fait parfois ces haltes obligatoires en lorgnant vers cette jeunesse en proie au désespoir et toute décidée à se jeter à la mer pour fuir une administration synonyme de son vrai calvaire. En feuilletant ce titre, le lecteur avisé, au fait des nombreuses œuvres de l'écrivain en question, a comme l'impression que l'auteur attitré fait ses adieux à une administration fortement instrumentalisée et corrompue ainsi qu'à une vie professionnelle en phase d'extinction avec la venue au monde de son dernier-né, celui d'une génération de vrais thrillers traduits déjà dans plusieurs langues et de nombreux pays. La conclusion que l'auteur tire des manœuvres sournoises de notre administration ne lui procure –pouvons-nous deviner- plus ce goût de revenir à la vie. Il a préféré partir. La tète haute et l'honneur sauf. Après nous avoir tout dit, tout décrit jusqu'à son dernier souffle. Jusqu'à ce qu'il n'ait plus de mots à nous souffler. A nous communiquer !
Le titre en question est dédié par le défunt auteur au grand et prestigieux romancier Ibrahim El Kouni. L'expression précise et concise servant, pour l'occasion, de dédicace résume à elle seule le contenu de l'ouvrage. Il y est dit notamment : «votre ami, pour avoir donné comme garantie ou arrhes sa chamelle n'a cessé depuis de regretter son geste, et pourtant mes amis à moi sont tout fiers de se faire hypothéquer tout leur avenir !».
Avec ce message, l'écrivain a certainement voulu faire cet effet d'annonce pour mettre au parfum le lecteur. Le héros du roman Maatar Hamdane, fils de Sadek et de Maatar Sakina, est à l'origine «un poète de cour», promu pour la circonstance dans les fonctions de directeur de la culture d'une wilaya de l'intérieur du pays. Son passé de militant dans l'ex-parti unique, son penchant vers et envers le régime socialiste d'alors le situe dans cette Algérie des années soixante-dix du siècle dernier. C'est d'ailleurs dans ce climat du socialisme socialisant qu'il connût sa femme Fedjria. Leur union donne naissance à une fille unique, symbole de leur amour éternel et produit de leur vie commune, sujette à ces perpétuels mouvements, d'action et de réaction, qu'implique le nouveau poste de responsabilité qu'occupe le chef de famille. L'auteur décrit également son environnement immédiat formé de sa secrétaire, Bahraouia, danseuse d'occasion et son subordonné, Zinou-Net, un homme à tout faire et… tout défaire, tout juste pour plaire à ses supérieurs mais aussi pour s'imposer comme élément incontournable du nouveau puzzle de notre administration où en parallèle du service rendu aux administrés se trame le vrai filon de cette corruption souterraine ; rendant possible même l'impossible et slalomant entre interdit et non-dit pour assouvir aux désirs insatiables des uns, souvent de gros bonnets, et propulsant le reste de ces scribouillards en de vrais barrons de nos institutions publiques.
L'auteur donne également lecture de cette culture des années du socialisme où cette dernière voulait tout juste signifier «prêter main forte à la révolution socialiste» et que tout avis contraire, même simulé ou murmuré et ruminé en sourdine était sévèrement puni par une justice aux ordres au seul motif que son auteur était taxé de réactionnaire : donc «incontestablement contre la marche et la démarche de la révolution». Une déduction que seul Alexandre Soljenitsyne, le prix Nobel Russe des années soixante-dix, pouvait faire avec cette dextérité à vous conter le contenu de son titre primé, lequel l'a rendu complètement déprimé devant tant d'absurdités russes de l'époque.
A plusieurs reprises, feu Tahar Ouattar se reprend peut-être même se surprend- à décrire ces «années de braise» où le pouvoir était «un tout dans le tout» pour affirmer que le pouvoir ne vous confèrera jamais de responsabilité, c'est, dit-il, vous en tant que fonctionnaire de l'Etat qui êtes offert en pâture sur l'autel de cette même responsabilité. De quoi sacrifier l'homme au profit du groupe aux commandes du pays et tout autre paramètre au seul intérêt du mode de gouvernance et du système politique du pays.
La vulnérabilité de notre administration n'est elle aussi pas en reste. Il y est fait référence de manière burlesque et assez prononcée avec ces dépenses inconséquentes pour une wilaya steppique s'apprêtant à recevoir la visite du ministre des Pêches et Produits halieutiques où la mer au travers de son décor et sa couleur du bleu de l'espoir doivent également rendre visite à la ville et ses nombreuses contrées où ce haut responsable de l'Etat est hôte pour quelques heures seulement. Opération à laquelle sont localement prévus tout un programme et un grand budget où le secteur de la culture a cette lourde charge d'animer convenablement l'ambiance, voulue festive pour l'occasion, agrémentée de quelques poèmes du terroir et de fantaisie que le directeur local de la culture, en tant que poète de vocation, doit accompagner et bien animer.
Une pratique bien chère à ces Seigneurs autoproclamés à qui rien n'est interdit et au profit desquels l'administration doit se mettre carrément à genoux. Dans ce même ordre d'idées, ses commis n'ont qu'à se soumettre sinon se démettre. Voilà ce qui est clair et net pour se tenir au garde-à-vous et ne s'en tenir qu'à la lettre de ces gens lettrés qui se dérangent rarement à quitter leurs bureaux feutrés pour aller en visite de travail quémandée.
Entre chantage et soumission inconditionnelle, entre plaire au chef et faire convenablement son travail, entre moralité et finalité, entre les textes et la pratique des faits, entre utilité et subtilité dans le travail quotidiennement effectué par le monde de notre administration, il y a comme cette conscience à rétablir et ce sérieux à recouvrer pour l'ensemble de notre administration. La société dans sa mouvance en a été complètement affectée au point de simuler et carrément reproduire à un bas niveau ce qui se trame à longueur de temps au plus haut niveau de la hiérarchie du pouvoir. Notre administration est-elle vraiment malade de ses administrés ? Sinon pourquoi ne fait-elle tout le temps qu'à sa tète ? Est-ce pour tout juste nous paraître qu'elle est aux seules mains et ordres de ses gouvernants qui décident tous seuls de tout ? De la pluie et du beau temps pour un pays en net déphasage côté nature et surtout avec son temps ?
L'ouvrage de Tahar Ouattar répond en partie à ces nombreux questionnements. Sa lecture vous fixera certainement mieux sur la nature des problèmes soulevés dans ce voyage littéraire truffé et agrémenté de maximes, d'adages et de proverbes tirés du terroir, faisant revivre a posteriori le lecteur cette nostalgie du bon vieux temps, manifestée avec beaucoup de doigté et de succès par l'auteur tout au long du titre considéré.
(*) Universitaire et auteur.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.