Chadli Bendjedid : ancien président de la République (1979-1992) « Je ne peux pas trancher sur cette question. Est-il mort de façon naturelle ou bien a-t-il été empoisonné ? Cependant, j'ai le sentiment que sa mort ressemble à la mort de Yasser Arafat. Durant les dernières années de sa vie, il me rendait visite à Oran, au siège de la deuxième région militaire, et je remarquais des marques d'épuisement sur son visage, il ressentait certaines douleurs mais il ne s'en plaignait pas. A son retour de Damas, après la réunion du Front de résistance et de défi, Boumediene n'apparaissait plus en public. Ensuite il a été transféré à Moscou pour y être soigné, mais sa maladie s'est aggravée, et après son retour, il est mort le 27 décembre 1978. » Naïf Hawatma : secrétaire général du Front démocratique de libération de la Palestine (FDLP) "Le président Houari Boumediene est mort empoisonné. Le poison était à très long effet et ne pouvait être détecté qu'au stade final. Les autorités soviétiques ont informé un membre du Conseil de la révolution de ce fait. Son cas est similaire à celui du président palestinien Yasser Arafat. L'empoisonnement a été arrangé par les services de renseignement israéliens sous l'égide de Sharon. Arafat consommait des aliments et des médicaments contaminés pendant une longue période". Ahmed Benchérif : ancien commandant en chef de la Gendarmerie Nationale « J'ai été le seul à avoir pris connaissance de son ordonnance qui dit qu'il est atteint dans l'appareil urinaire ; il urinait du sang. Personnellement, j'estime que les médecins russes n'étaient pas d'un bon niveau. Si on l'avait transféré dans un pays européen, on aurait diagnostiqué sa maladie de manière précise. On aurait pu le soigner et lui sauver la vie. La mort de Boumediene est identique à la mort de Yasser Arafat. J'ai offert au Président deux chiens de race danoise, ils sont morts empoisonnés. Mais ce qui est étonnant, c'est que les médecins russes ont trouvé chez les deux chiens les mêmes symptômes que chez le défunt Boumediene. » Ahmed Taleb Ibrahimi : dans “Mémoires d'un Algérien-La passion de bâtir” « Vingt neuf ans nous séparent de ce triste événement. Durant toute cette période, de nombreux compatriotes n'ont cessé de me poser cette question lancinante : est-il mort de maladie, comme on le prétend, ou bien n'a-t-il pas été plutôt victime d'un empoisonnement lent, œuvre des services secrets étrangers, notamment américains et israéliens ? Dans l'état actuel de mes connaissances, il est difficile de confirmer telle ou telle hypothèse, surtout que dans les pays du Tiers-monde, on a tendance à refuser que certains leaders charismatiques soient des hommes comme les autres, exposés aux mêmes vicissitudes de la vie tels que la maladie, les accidents. Par ailleurs, d'autres morts de leaders restent mystérieuses. Ainsi, de sérieux soupçons pèsent sur les services secrets israéliens qui seraient certainement responsables de l'empoisonnement de Yasser Arafat, après avoir vainement tenté, quelques années plus tôt, une opération similaire à Amman contre le chef du mouvement palestinien Hamas, Khaled Machaal. Autres exemples : le Roi Fayçal a été assassiné au moment où il défendait la thèse de l'embargo pétrolier à destination des pays occidentaux qui soutiennent Israël, et les Présidents Nasser et Assad aux positions anti-impérialistes et anti-sionistes notoires ont été terrassés par des crises cardiaques…Toujours est-il que j'ai quitté à Moscou le 17 octobre un Boumediene en forme et avec un moral de fer alors que 28 jours après, je l'ai retrouvé à Alger fort diminué. Espérons que d'autres témoignages pourront un jour éclairer l'Histoire dans un sens ou dans un autre. » Belaïd Abdeslam : dans “Le hasard et l'histoire” « Pour la maladie, je n'ai pas grand-chose à dire. Ça a été une surprise. J'étais, je crois, le dernier ministre qu'il a reçu en audience. Je ne rentre pas dans les détails de cette discussion. Je l'avais vu le 10 ou le 12 septembre. Il était fatigué. Mais il avait l'habitude d'être toujours malade, en cette période de l'année. En été, il était souvent grippé. Je pensais que c'était une grippe, un peu plus prolongée. Mais je ne soupçonnais pas autre chose. Ce jour-là, j'avais demandé à le voir parce que je devais partir en mission en Allemagne. Il était malade. Le lendemain même de ma demande d'audience, il m'a appelé. Je suis allé dans son bureau. Je ne devais pas rester longtemps avec lui. Mais il m'a retenu assez longuement comme toujours. On a discuté un peu de ma prochaine mission. Surtout - et c'était la première fois que je l'apprenais-, il m'a parlé des contacts qu'il avait avec le roi Hassan II et de la rencontre qu'ils allaient avoir à Bruxelles. Il m'avait demandé mon avis. Je lui ai suggéré de la reporter… Le rendez-vous était fixé pour le 20 septembre. Mais il m'avait parlé d'une chose qui m'avait frappé, et dont je n'avais pas saisi la portée sur le coup. Il m'avait dit : "Le roi m'a dit que si on ne se voit pas cette fois-ci, on risque de ne se voir jamais ! Pourquoi le roi m'a-t-il dit cela ?"(...) De quel indice ou de quelle information disposait, alors, Hassan II que, passé le mois de septembre 1978, il n'avait plus de chance de rencontrer Boumediene ? C'est l'une des énigmes qui, pour moi, entourent les circonstances de la disparition de ce dernier. (..) Il est mort des complications d'une maladie qu'on présente comme très rare, et d'une forme encore plus rare de cette maladie. En fait, tout semble indiquer que le diagnostic du mal qui a emporté Boumediene n'a pas été établi clairement. La cause de sa mort demeure encore un mystère, sauf, peut-être, pour ceux qui l'auraient préméditée et perpétrée. » Anissa Boumediène : au quotidien El Khabar « Personne ne sait si Boumediene est mort empoissonné ou non, y compris Chadli, mais je peux dire aujourd'hui que lui-même et d'autres responsables ont décidé de débrancher les appareils de réanimation lorsque Boumediene était dans le coma, et ils ont décidé de sa mort. » Hamed El Djabouri : Ex-ministre des affaires présidentielles et étrangères irakiennes à la Chaîne Al-Djazira, dans l'émission Chahed El Aasr (témoin du siècle) « Le président Houari Boumédiene est mort empoisonné suite à sa visite dans la capitale syrienne Damas ou il a assisté à son dernier sommet arabe. Boumediene a commencé à maigrir jusqu'à ressembler à un fantôme. Je savais de quoi souffrait Boumediene, il a été empoisonné avec un type de poison ravageur : le lithium, et j'ai eu à voir un cas similaire ici en Irak et l'issue est la mort certaine pour quiconque qui en consommerait". Je me tenais constamment au courant de l'état du défunt président, étant donné la place de l'Algérie dans le cœur des Irakiens. Le docteur Ahmed Taleb El Ibrahimi me renseignait sur l'évolution de la santé du président Boumediene -dieu ait son âme- et il m' a confié, lors des derniers jours du président, que le "siège" s'est durci en ce qui concerne les visites quotidiennes de sorte qu'il était le seul à le voir ainsi que quelques personnes très proches car Boumediene avait réellement l'air d'un spectre ».