Le gouvernement espagnol va faire «une dernière tentative» pour que le sommet de l'Union pour la Méditerranée (UPM), prévu le 21 novembre à Barcelone, puisse effectivement se tenir. La déclaration faite vendredi par la ministre des Affaires étrangères espagnole, Trinidad Jimenez, est venu conforter le très grand pessimisme sur la possibilité de la tenue du sommet de l'UPM. Elle a constaté que «malheureusement, nous n'avons pas encore réussi à faire en sorte que les parties se mettent d'accord». L'annonce de cette «dernière tentative pour essayer de débloquer la situation» est intervenue à la suite de l'annonce, vendredi matin, par le journal espagnol ABC, que le gouvernement espagnol avait «définitivement» renoncé à organiser le sommet. «Pour le moment, la situation est compliquée. Il n'y a pas encore de décision, nous attendons encore de savoir ce qui va se décider finalement». Il va sans dire que les propos de la ministre espagnole n'incitent guère à l'optimisme. Tout indique que l'UPM risque de connaître un nouveau revers. L'envoyé spécial du gouvernement espagnol, l'ancien ministre des Affaires étrangères Miguel Angel Moratinos, a beaucoup voyagé ces derniers jours - il était jeudi à Alger où il a rencontré le Premier ministre algérien, Ahmed Ouyahia - pour tenter de sauver le second sommet de l'Union pour la Méditerranée d'un deuxième report. Selon des sources bien informées, l'ancien ministre espagnol des Affaires étrangères espagnol est déjà dans l'optique d'un sommet qui se tiendrait en mars ou en juin prochain. En attendant une confirmation, très probable, d'un nouveau report, il convient de rappeler les raisons lourdes qui entravent le décollage de l'Union pour la Méditerranée. Le deuxième sommet de l'UPM devait se tenir le 7 juin à Barcelone (Espagne) et a été reporté au 21 novembre. A cette époque, les diplomates espagnols et égyptiens avaient invoqué la nécessité de «donner du temps aux pourparlers indirects» entre Israéliens et Palestiniens. En clair, on tablait excessivement sur la capacité de Barack Obama à faire avancer les choses au Proche-Orient. Aujourd'hui, et après une reprise des «négociations directes» et leur nouvelle suspension, la situation est bien pire. Non seulement Israël persiste à coloniser les territoires palestiniens y compris Jérusalem-Est, mais la tannée électorale subie par Barack Obama aux élections du mid-term le rend définitivement inapte à exercer la moindre pression sur Netanyahu. Moratinos chez Ouyahia Israël est un problème central pour l'UPM qui a été lancée avec l'arrière-pensée évidente de favoriser la normalisation avec les Etats arabes. Il est difficile actuellement pour les Etats arabes, même les plus pro-occidentaux d'entre eux, de s'asseoir avec Israël dans le cadre de l'UPM. Il y a bien entendu, la solution d'avancer dans l'UPM sans Israël, mais il est clair que les Européens ne le feront pas. Ce serait le but politique de l'UPM - une normalisation sans frais pour Tel-Aviv, entre l'Etat hébreu et les pays arabes méditerranéens - qui serait ainsi remis en cause. Durant son récent périple, M. Moratinos a obtenu le soutien franc et sans surprise du président tunisien à la tenue du sommet de l'UPM. On ne sait pas par contre ce que le Premier ministre algérien, Ahmed Ouyahia, a dit à M. Moratinos. Il reste qu'il serait absolument logique que l'Algérie ne veuille pas s'asseoir à la même table d'un Etat qui bafoue les droits élémentaires des Palestiniens et refuse de se plier à la légalité internationale. Cela est tellement flagrant que même les soutiens aveugles d'Israël en arrivent à en faire le constat. Le secrétaire d'Etat français aux Affaires européennes, Pierre Lellouche, a indiqué que Paris travaillait au maintien du sommet de l'Union pour la Méditerranée mais que les «positions israéliennes ne nous aident pas et n'incitent pas les Arabes à venir à la table de l'UPM». D'un échec à l'autre Le propos est exceptionnel de la part d'un responsable français officiel sous une présidence Sarkozy très pro-israélienne et en rupture avec l'équilibre gaullien. On voit mal comment Israël qui vient de décider d'étendre la judaïsation forcée de Jérusalem pourrait «aider» les diplomaties espagnole et française à donner vie à un projet moribond. On connaît les faiblesses de ce projet: des Turcs qui se refusent à accepter l'UPM comme lot de consolation au revirement d'une partie des dirigeants européens, Sarkozy notamment, à son adhésion à l'Europe, une Europe du Nord très réticente, et bien entendu la question du Proche-Orient. Les Européens faisant preuve d'une incroyable couardise n'acceptent même pas de nommer les «territoires occupés» alors que l'UPM est conçue ouvertement comme un cheval de Troie de la normalisation. Certains ajoutent la question du Sahara Occidental comme source de blocage On peut en douter. En réalité, l'UPM avec son grand format ne pouvait éviter l'échec subi par le processus de Barcelone. Outre le fait que les pays européens n'accordent pas la même priorité à l'UPM selon qu'on s'éloigne de la Méditerranée, il faut y ajouter la grande faiblesse de la diplomatie européenne au Proche-Orient. Lors du premier report du sommet, on avait compris que les Européens tablaient sur une «percée» que réaliserait Obama au Proche-Orient. Le souhait s'est avéré faux. Aujourd'hui, l'UPM ne peut compter sur un président américain encore plus affaibli par la victoire des Républicains aux élections du mi-mandat. L'UPM est face au vide.